« Les lumières du Nord. » C'était le titre d'une exposition, il y a quelques années, sur les chefs-d'oeuvre de la peinture scandinave. C'est peut-être également ce dont l'Europe a besoin : un modèle politique, économique et social sinon éthique, face à la compétition grandissante des nouvelles puissances.
L'avantage comparatif de l'Europe dans le monde n'est certainement pas d'ordre démographique. En 2050, nous ne serons guère plus de 6 % de la population mondiale. Nous ne pouvons pas compter non plus sur notre supériorité militaire. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, notre sécurité dépend très largement de notre allié américain. Et sur le plan économique, nous accumulons des dettes au moment où l'Asie affiche des taux de croissance impressionnants.
Le seul espoir pour l'Europe est de devenir une « niche d'excellence », un continent que l'on respecte et qui continue de séduire par son « essence » plus que par ses « performances ». Si nous pouvons encore « faire la différence », c'est dans le domaine des idées et des idéaux. Et sur ce plan, une partie de l'Europe l'emporte clairement : l'Europe du Nord.
Bien sûr, il existe des mouvements d'extrême droite xénophobe au Danemark. La Suède n'est plus aussi ouverte aux immigrants qu'elle a pu l'être... Et pourtant, il existe une « modernité » dans les pays scandinaves, qui pourrait servir d'exemple. Le pouvoir y est modeste, et généralement honnête. La rigueur et la simplicité sont communément pratiquées. Les femmes jouent un rôle majeur dans la société depuis longtemps. Le capitalisme a pris une forme plus humaine, sinon plus morale à travers des formes variées de social-démocratie. Les écarts de richesse entre les citoyens sont moins grands, et donc plus acceptables. Enfin, le respect à l'égard des immigrants est normal.
Vu du Sud, ce Nord présente une image particulière. Ce sont de petits pays, par la population sinon par la géographie ; le climat y est froid et rigoureux, les valeurs puritaines... Autrement dit, « ce n'est pas pour nous », nous pour qui la politique est un jeu et le pouvoir une drogue, et le sentiment de supériorité sur les autres, souvent un réflexe.
Mais avant de rejeter un éventuel « modèle » scandinave, il convient de jeter un regard lucide sur l'évolution du monde. Nous ne pouvons parler de démocratie, d'État de droit, de respect des droits de l'homme, d'équilibre relatif entre les classes sociales, de protection des plus pauvres, face à la brutalité des rapports sociaux en Chine et en Inde et à l'omniprésence de la corruption, que si nous pratiquons avec rigueur, chez nous, ce que nous prêchons pour les autres.
Pour réconcilier l'Europe avec ses citoyens, il faut d'abord réhabiliter la politique aux yeux des citoyens. Cela ne passe pas par des dérives populistes et démagogiques. Cela passe par la rigueur morale, plus encore qu'économique, et le respect de soi-même et de ses principes. Pour faire face au vent d'Est et à ses propres dérives, le vent d'Ouest a besoin du vent du Nord.
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