Mme le ministre peut continuer à plonger tranquille : l'économie française a bien la tête hors de l'eau. La production nationale progresse à un rythme voisin de 1,5 % (0,8 % au premier semestre), comme l'a indiqué l'institut de la statistique. Ce n'est pas flambant mais, en ces temps de crise, il faut savoir se contenter de peu. Il est même possible de trouver cinq raisons d'espérer. D'abord, les chiffres sont un peu meilleurs que prévu. Ensuite, ils couvrent un printemps particulièrement agité, où la tempête s'est portée sur les dettes publiques européennes. Troisième raison, la baisse de l'euro n'a pas encore relancé les exportations ; il y a donc encore des impulsions positives à venir dans les prochains mois. Et puis les signes d'une confiance retrouvée dans les entreprises se multiplient - embauches, accroissement des investissements pour la première fois depuis deux ans, reconstitution de stocks. La meilleure nouvelle se situe d'ailleurs sur le front de l'emploi. Les entreprises ont moins licencié qu'on ne pouvait le redouter au plus fort de la crise, même si la saignée a été terrible dans une industrie qui a perdu 10 % de ses effectifs. Et elles ont recommencé à recruter alors même que la croissance est faible. Dernière raison : la France n'a pas à rougir de la comparaison avec l'Allemagne, qui vient d'enregistrer un taux de croissance à la chinoise. Par rapport au pic de l'activité au premier trimestre 2008, la production au deuxième trimestre 2010 a été inférieure de 2,2 % en France et de 2,8 % en Allemagne.
Mais Mme le ministre a d'autant plus intérêt à profiter de ses vacances corses que la rentrée va être rude. Les signes d'espoir restent fragiles. Après avoir acheté des voitures pour profiter de la prime à la casse, puis des téléviseurs pour regarder les Bleus s'effondrer en beauté lors du Mondial de football, les consommateurs vont regarder ce qui leur reste au fond de leur portefeuille - et il ne reste pas grand-chose, sauf à moins épargner. Les exportateurs auront peut-être du mal à profiter d'un euro moins fort au moment où la demande ralentit dans les pays émergents. Les industriels ne vont pas faire monter leurs stocks jusqu'au ciel - or cette accumulation de stocks expliquent l'intégralité de la croissance de 0,6 % observée au printemps. L'activité demeure bridée.
Or le gouvernement avait bâti son scénario de rééquilibrage des finances publiques sur l'hypothèse d'une pente de croissance forte (2,5 %) à partir de l'an prochain, un objectif désormais inaccessible. Il va devoir l'admettre lors de la préparation du budget 2011. Et donc préparer de nouvelles mesures de rigueur, à l'orée d'une campagne présidentielle, sans casser la machine. Intelligence et doigté requis.
JEAN-MARC VITTORI
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire