La France n'a pas seulement des muscles qui lui rapportent des médailles en athlétisme et natation. Elle a aussi un peu de tête, même si parfois l'actualité nous en ferait douter. Les deux lauréats de la médaille Fields et celui du prix Gauss doivent d'abord cette gloire, dont le pays s'enorgueillit aujourd'hui, à leurs qualités personnelles et leurs parcours singuliers. L'un, Vietnamien d'origine, est Français depuis cette année. On tremble à l'idée que cette naturalisation aurait pu lui être refusée par une administration assez kafkaïenne pour en recaler bien d'autres.
L'avenir nous apprenant à ne jamais l'insulter, qui sait si, dans 25 ans, un fils de Rom, expulsé puis revenu, ne nous rapportera pas un prix Nobel ? Quant au second médaillé, natif de la Corrèze, c'est un prof de 3e qui lui a su lui donner la passion des maths. Le lauréat ajoute qu'il faut faire des efforts comme un pianiste qui veut bien jouer. Bref, rien à voir avoir la soi-disant « bosse des maths » sur le front. Il faut surtout... bosser !
Ce rappel survient opportunément le jour même où sont listés les lieux d'expérimentation d'un nouveau rythme scolaire : cours le matin, sport l'après-midi. L'effort sportif pour retrouver ou entretenir le goût de l'étude ? Pourquoi pas, mais nos brillants scientifiques montrent qu'il leur a fallu plus que ce minimum pour arriver aux médailles. Une passion assez puissante pour profiter au mieux de la qualité et de l'exigence du système français, classes prépas sélectives et recherche en laboratoires, à l'université et dans les grandes écoles.
L'excellence française en maths ne doit pas conduire à l'autosatisfaction générale. La paradoxale 31e place aux récentes Olympiades de mathématiques et le classement de Shanghai soulignent à quel point la France a du mal à se faire reconnaître dans la compétition mondiale. Les chercheurs ont besoin de temps, de moyens, de liberté pour résister aux sirènes de l'étranger. Comme l'amour, la recherche a besoin de preuves qu'au-delà des louanges d'un jour ou d'une réception à l'Élysée, elle est bien une priorité nationale.
XAVIER PANON
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