Les céréaliers, les plus jeunes en tête, attendent de pied ferme Nicolas Sarkozy, qui visitera mardi une exploitation en Ile-de-France, s'estimant doublement pénalisés par la crise et la diminution des aides européennes.
Le président de la République est attendu à 10h00 à Buno-Bonnevaux (Essonne) dans l'exploitation céréalière de Samuel Herblot. Ce dernier est adhérent au syndicat des Jeunes Agriculteurs (JA) dont la section Ile-de-France (IDF) a mené ces derniers mois plusieurs actions spectaculaires.
Cet automne, une cinquantaine d'agriculteurs franciliens ont bloqué pendant deux heures le trafic sur les Champs-Elysées avant de déverser en décembre de la paille devant le palais présidentiel.
Au salon de l'agriculture, ils avaient menacé de perturber la visite du chef de l'Etat avant de renoncer après avoir obtenu un rendez-vous avec ce dernier. Nicolas Sarkozy les a reçus à la mi-mars et leur a promis cette visite dans l'Essonne.
"Nous sommes totalement exsangues financièrement", affirme Christophe Hillairet, 39 ans, céréalier et président de la chambre d'agriculture d'Ile-de-France, une structure qui mène le combat aux côtés des JA sans le soutien du réseau des chambres d'agriculture.
Selon lui, "si aucune mesure n'est prise "un tiers du secteur des grandes cultures (céréales, colza,...) aura disparu en 2011". Son exploitation de 170 hectares est dans le rouge et c'est son "épouse qui (le) fait vivre".
Les jeunes céréaliers demandent des annonces. "C'est une question de survie. Il faut des mesures", martèle Damien Greffin, 34 ans, président des JA IDF, qui se dit prêt à en découdre à nouveau.
L'an dernier la filière a vu ses revenus baisser de 51% dans la foulée de la chute des cours des céréales (-24%) qui avaient été au plus haut en 2006 et 2007.
La baisse de la rémunération des céréaliers est similaire à celle des producteurs laitiers alors qu'en moyenne le monde agricole a enregistré une diminution de 34% de ses revenus en 2009.
"Pour les agriculteurs qui sont en vitesse de croisière c'est déjà difficile mais pour les jeunes qui sont en phase d'installation avec un endettement lourd sur 10 à 12 ans c'est encore plus compliqué", explique M. Greffin.
En toile de fond de cette exaspération, il y a surtout la décision en 2009 de l'ancien ministre de l'Agriculture Michel Barnier de rééquilibrer les aides européennes pour une politique agricole commune (PAC) "plus juste".
Cette décision prévoit qu'à partir de cette année, plus d'un milliard d'euros vont être réorientés vers des secteurs à soutenir (agriculture bio, élevage,...), aux dépens des céréaliers, jusqu'ici les plus favorisés.
Un choix mal accepté par ces derniers et qui a suscité d'importantes dissensions au sein du monde agricole. Une délégation de jeunes céréaliers est même venue l'an dernier manifester son mécontentement lors du congrès de la FNSEA à Poitiers, en prenant à partie son président, Jean-Michel Lemétayer, qui avait entériné la décision du ministre.
"Cette redistribution des aides a été décidée lorsque les prix étaient hauts, sauf qu'aujourd'hui les prix n'ont jamais été aussi bas depuis 20 ans et qu'on va nous enlever 100 euros de soutien à l'hectare", martelle Damien Greffin.
Ce dernier ne veut pas entendre parler de nouveaux programmes d'aides avec des prêts à taux bonifiés comme ceux annoncés ces dernières semaines pour venir en aide aux agriculteurs. "L'idée c'est d'obtenir une compensation à l'euro près, soit 1,2 milliard d'euros", prévient-il.
mardi 6 avril 2010
Sarkozy affronte ce matin la colère des jeunes agriculteurs céréaliers d'Ile-de-France
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