TOUT EST DIT

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vendredi 16 mai 2014

Du mépris à la haine du peuple


Une grande partie de l’intelligentsia française, après avoir été de toutes les révolutions, éprouve désormais une peur panique du peuple français.
Il règne aujourd’hui en France un climat de haine sociale particulièrement préoccupant. Je ne parle pas ici bien sûr de la bonne vieille détestation du bourgeois qui, après avoir été un argument de campagne, est quasiment autorisée quand elle n’est pas encouragée. Non, je veux parler de cette haine du peuple que des élites “progressistes” propagent de façon alarmante.
J’avais été frappé il y a quelques mois de l’accueil réservé par la critique à un roman largement autobiographique, En finir avec Eddy Bellegueule, dans lequel un jeune homosexuel racontait son douloureux divorce d’avec des origines populaires et picardes. Non pas que cette version prolétarienne du “famille, je vous hais”, malgré quelques faiblesses de style, ne méritât l’éloge, mais la violence des propos avec laquelle nos belles âmes du Quartier latin frappaient une famille de gens simples sans aucun moyen de répondre à ce lynchage public m’apparaissait particulièrement choquante.
Il y a quelques jours, les commentaires d’un chroniqueur du Nouvel Observateur, à l’occasion de l’intervention de François Hollande sur RMC, ont, dans le même registre, dépassé toute mesure. À le croire, la France des auditeurs de Jean-Jacques Bourdin n’était pas digne d’un dialogue avec le chef de l’État. Coupable d’avoir entretenu François Hollande de ses souffrances et de ses angoisses, cette France « sans ambition, repliée et frileuse » — je cite le texte — n’était pas la France mais une « certaine France », la « petite France [de]petits Français », entendez par là de “petits Blancs”. Une France qui n’avait rien de « républicain »ni de « socialiste », une France, enfin, ressemblant à s’y méprendre, toujours selon notre esprit éclairé, à la France de 1939… Une France à épurer en quelque sorte.
Voilà désormais qu’une grande partie de l’intelligentsia française, après avoir été de toutes les révolutions, depuis la révolution sexuelle jusqu’à la “révolution de jasmin”, éprouve une peur panique du peuple et surtout du peuple français. Un peuple qu’elle a commencé à mépriser lorsqu’elle a compris, dès le lendemain de 1968, qu’elle ne parviendrait pas à lui imposer ses utopies, et auquel elle voue aujourd’hui une haine totale. La pire des haines, celle qui naît de la peur, peur de l’autre, peur de l’ennemi politique et plus généralement peur de tout ce qui respire au-delà des grands boulevards et des grands magasins.
Une peur comme en éprouvaient les bourgeois épouvantés de 1848 ou de 1871, la peur de la Révolution et de la dépossession.
Car c’est bien de cela que tremble tout un petit monde confortablement installé depuis plus d’un demi-siècle dans ses certitudes, ses anathèmes et ses privilèges. Une révolution, non pas politique, mais culturelle qui viendrait mettre un terme à la toute-puissance idéologique et donc à la domination de la France du Nouvel Obs

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