TOUT EST DIT

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dimanche 9 mars 2014

Lettre ouverte à Dominique Besnehard


Ça s’est passé sur le plateau de Salut les Terriens, l’émission de Thierry Ardisson sur Canal Plus. Ce soir-là j’étais venu débattre avec José Bové, mais à peine maquillé je me suis fait sermonner par un autre invité… Un zozoteur à la trogne folklorique, affublé de lunettes rondes : c’était vous, Dominique Besnehard, l’ami des stars. Vous étiez venu chez Ardisson pour assurer le service après-vente de votre dernier bouquin, une compilation de souvenirs… écrite par un autre.
Je vous connaissais peu. Je savais tout juste que vous aviez soutenu Ségolène Royal en 2007. Vous, vous m’aviez entendu dénoncer sur RMC l’absurdité du financement du cinéma français. Assis à côté de moi, face à Ardisson, vous avez soudainement suffoqué : « Vous n’avez dit que des conneries à la radio. Heureusement que l’État aide le cinéma. Vous, les gens de droite, vous n’aimez pas le cinéma. Ce que vous avez dit est scandaleux ! »
Dans un premier temps, cette tirade m’a laissé coi. Je vous ai répondu : « Vous êtes discourtois. » Puis je me suis interrogé : comment faire comprendre à ce militant un peu bas du front que le drame intime du cinéma français, c’est précisément la béquille de l’État ? Cette perfusion qui n’existe dans quasiment aucun autre pays (Almodóvar, Nanni Moretti, Wong Karwai, Hayao Miyazaki n’ont pas besoin du CNC, eux !). Vous le savez bien : en France, il suffit de sortir quelques copies en salles pour percevoir des aides. Des financements générés par les taxes sur les billets de cinéma, les obligations de financement des télévisions, les éditeurs vidéo, les taxes sur les distributeurs de programmes, les crédits d’impôt, les aides régionales…
Dans l’histoire, la culture et l’État et n’ont jamais fait bon ménage. Molière, Berlioz, Piaf, Gance, Gabin, Melville, n’ont pas eu besoin d’argent public pour faire rayonner leur art… Certes, M. Besnehard, vous vivez de cette industrie aidée, et je comprends que vous en soyez l’infatigable défenseur. Mais le constat est là : sur les 200 films français subventionnés chaque année, 2 ou 3 seulement connaissent une vraie carrière internationale.
Pis, en 2013, seuls 20 films français se sont avérés rentables, c’est-à-dire 10 %… L’an dernier, le déficit de l’industrie cinématographique française a atteint 400 millions d’euros alors qu’on nous annonçait une année record pour les studios de production hollywoodiens. D’où l’urgence de libérer notre cinéma de l’assistanat financier et de la tutelle incestueuse de l’État. Il faut produire moins de films, mais mieux…
Quant à prétendre que les gens de droite n’aiment pas le cinéma, j’ai trouvé l’apostrophe aussi sotte que minable. Ardisson aussi sans doute : il a préféré couper votre sortie au montage. Je ne vous salue pas, M. Besnehard.

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