samedi 16 novembre 2013
Petites leçons de survie pour éviter le pire en temps de crise
Alors que la situation économique du pays ne cesse de s'aggraver, faute de réformes structurelles nécessaires, l'image de la France, elle aussi, en prend un coup tant à l'intérieur qu'à l'extérieur. Pourtant, les Français semblent bien déterminés à sortir de la spirale infernale dans laquelle est plongé le pays. Par leurs propres moyens.
Lorsque Barak Obama rencontre un chef d’État étranger, on raconte qu’il lui pose toujours la même question. François Hollande n’aurait pas récemment échappé au dialogue :
"Alors François, aurait dit le président américain, comment va la situation française, en un mot... ?
- En un mot, répond le président français qui hésite, en un mot : bien.
- Et en deux mots, François ?
- Barak, tu sais, en deux mots : pas bien !"
Le Wall Street Journal raffole de ce genre d’anecdote. D’autant que pour le journal de la bourse, la situation évolue de mal en pis. Pour les Américains de New York, la France est un champ de ruines.
"C’est vrai qu’à Paris, l’impôt prélève 75 % du revenu… ?
- C’est vrai, oui, mais pas à tous les contribuables !
- Mais c’est 75% toutes taxes confondues ?
- Non madame, c’est hors taxe !"
A ce moment-là du diner très chic dans un appartement luxueux à l’angle de la 5ème avenue et de la 68ème rue, l’hôtesse se tourne alors vers son mari banquier à Wall-Street :
"Darling, ce n’est peut-être pas une bonne idée que d’aller en vacances à Paris. On ferait mieux de rester en Italie avant de rentrer faire des courses à Londres. De toute façon, on m’a dit aussi que tous les magasins des Champs-Elysées étaient fermés. C’est vrai cela ???".
A ce moment-là, vous, petit Franchie de passage, vous faites semblant de ne pas avoir entendu. Mais quelle image ! Quel diner ! Combien de temps va-t-on laisser se dégrader ainsi l’image de la France ?
Pas facile de décrire la situation économique du pays. Pour les étrangers, elle est désastreuse. Pour la majorité des Français elle est mauvaise, sans visibilité, sans espérance, ni projets. Ils ont raison. Tous les indicateurs sont au rouge. La croissance pique du nez à nouveau, l’emploi ne décolle pas, le pouvoir d’achat, les dettes, le déficit … tout part en vrille. Et pour couronner le tout, l’impôt apparait comme la dernière variable d’ajustement des finances publiques. Ce qui devient insupportable.
Quand on demande aux Français, comment ils vont, eux personnellement, la plus part répondent : " Moi ? Je me débrouille, ça pourrait être mieux mais on fait avec !! ". Les Français sont pessimistes pour les autres, et pour le pays mais pour eux, ils sont plutôt résignés, déçus.
" Les Français sont découragés » disaient récemment Valery Giscard d’Estaing, et l’ancien président de la République de répondre du tac au tac, avec son humour grinçant : « Les Français sont découragés, mais c’est normal, nous avons un président décourageant… "
Il y a du vrai bien sûr. La responsabilité du président de la République est énorme. Il a plombé son quinquennat dès le départ avec des tonnes de promesses irréalisables qui l’ont d’emblée privé de légitimité quand il s’est agi de demander un effort aux Français. Résultats : pas de politique, pas de stratégie, pas de perspectives, pas d’ambitions, pas de rêve. La gouvernance est paralysée.
Le communiqué de Standard&Poor’s était assassin la semaine dernière. L’agence de notation ne dénonçait pas la situation économique, elle dénonçait un pouvoir politique désormais incapable -compte tenu de la situation sociale- de proposer des reformes structurelles qui, elles seules, pourraient faire en sorte que le pays se remette à créer de la richesse.
Faut-il pour autant sombrer dans la fatalité du déclin. L’ensemble de la classe politique spécule aujourd’hui sur des solutions politiques. Un remaniement gouvernemental, une dissolution. Bref tout balayer et essayer de retrouver une nouvelle légitimité. Possible ! Sauf qu'on retomberait dans les débats politiciens, les luttes intestines aux partis politiques pour l’accès au pouvoir. Des formes de cohabitation qui ajouteraient du chaos au chaos. Dans la mesure où aucune personnalité capable de porter un effort de redressement et de dépasser les corporatismes qui paralysent tout n’émerge, les solutions politiques paraissent vouer à l’échec. Certains expliquent que ce n’est pas les politiques au pouvoir qu’il faut changer, mais la politique qu’ils conduisent qu’il faut revoir. Évidemment, mais comment changer de cap sans changer les pilotes, sans perdre définitivement toute crédibilité ?
Il y a donc assez peu de solutions sauf à admettre que dans l’Histoire, la crise, la vraie, la dure, a souvent rendu intelligent les gens de pouvoir. Sauf à penser que la crise rend l’opinion publique capable d’entendre un langage de vérité... Des larmes, du sang et de la sueur. François Hollande ne peut plus jouer les Churchill.
Depuis le début de la crise, en 2008, le système économique mondial a pourtant échappé à la catastrophe par deux fois. La première fois, en octobre 2008, quand il a fallu restaurer la confiance dans le système bancaire complètement fracassé. Les chefs d’État du monde entier ont réussi à se mettre d’accord en très peu de temps sur un ensemble de garanties capables de sécuriser le système financier.
La deuxième fois quand l’Europe a signé des accords pour éviter l’explosion en raison des difficultés par la Grèce, l’Italie et l’Espagne. Fin 2011, on a enfin instauré en Europe des dispositifs d’alerte et de correction pour éviter les incendies. La France et l’Allemagne ont réussi à s’entendre sur un minimum de solidarité. On a même réussi à s’entendre sur une Banque centrale qui s’est mise à fonctionner comme les autres Banques centrales. Ce jour-là il y avait assez peu de place à la querelle idéologique, c’est le pragmatisme qui a permis de sauver la construction européenne. Personne ne le regrette aujourd’hui.
Le traité a été révisé. François Hollande, qui avait beaucoup menacé de le rejeter pendant la campagne, l’a accepté et l’a fait ratifier. Les faits sont têtus, les chiffres ne mentent pas. La crise rend intelligent dès qu'elle est assez grave pour mettre en jeu la survie d’un peuple ou d’une nation. L’Histoire rendra peut être justice à cette poignée d’hommes d’État et chefs de gouvernement qui ont sauvé le système. Les opinions publiques ont été ingrates. Ils ont tous été balayés par le suffrage universel. Tous, sauf Angela Merkel, qui a survécu brillamment. Décidément, l’Allemagne n’aura jamais rien fait comme les autres. Même sa démocratie ne fonctionne pas à la démagogie.
Au-delà de ces réactions de survie collective dont l’Histoire nous a souvent gratifié, il y a aussi des réactions individuelles, égoïstes. L’instinct de survie des peuples a ses limites. L’instinct de survie des hommes en a beaucoup moins. Aujourd’hui, en France beaucoup souffrent de difficultés et parfois même de la misère. Mais beaucoup aussi s’arrangent avec le ciel ou avec la loi. les Espagnols ont fait jouer les solidarités familiales, les Italiens ont réactivé les réseaux, ils sont champions du monde des réseaux. Quant aux Français les plus démunis, ils se raccrochent aux générosités du modèle social. Ils basculent dans l’illégalité pour échapper en partie à la pression fiscale, D’autres, parce qu’ils le peuvent, s’expatrient là où la fiscalité est plus soft ou tout simplement là où ils peuvent travailler. Pour ce qui est des jeunes diplômes, des bac +7, des très riches et des retraités, on s’arrange, on se débrouille mais tout cela ne fait pas une économie forte.
Le pouvoir a fait deux erreurs énormes.
Un, il n’a pas voulu expliquer la réalité et la gravite de la crise structurelle. Il n’en a pas eu le courage, parce qu'il n’a pas voulu assumer la nécessité d’une politique d’offre qui seule pouvait nous faire gagner en compétitivité. Pour ne pas avoir à affronter le mécontentement, la gouvernance a, au contraire, nier la crise, et prétendu qu' il existait des portes de sortie.
Deux, il sous-estimé la capacité des chefs d’entreprise à s’adapter aux contraintes, à réagir. Les responsables politiques ne connaissaient ni l’entreprise privée, ni ceux qui les dirigent. Ils pensaient que l’Etat et les énarques pouvaient tout régler. Plus grave, ils ont considéré les chefs d’entreprise comme les responsables du fiasco. Quelle erreur que d’avoir pensé cela ! Les chefs d’entreprise sont et seront les instruments du redressement pourvu qu'on les laisse travailler.
Dans un de ses films, le réalisateur américain Spielberg fait donner à un de ses personnages un cours de management d’entreprise. Le film, c’est Catch me if You Can.Dans la pénombre d’une salle de conférence, Di Caprio écoute, ébahi, un professeur raconter l’histoire de deux petites souris.
" Deux petites souris tombent dans un sceau plein de crème. La première désespérée se laisse mourir immédiatement. La seconde refuse ce destin funeste et se débat. Elle se débat tant et tant qu'elle transforme la crème en beurre…et ainsi elle sort du sceau. Je vous propose, dit le professeur, d’appartenir à la famille de la deuxième petite souris.".
Les chefs d’entreprise sont de cette espèce-là.
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