TOUT EST DIT

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jeudi 11 octobre 2012

Que s'est il passé mardi soir au dîner des Pigeons? Un coup de force du Medef

Bercy a très mal pris l'injonction patronale lui demandant de retirer le texte sur l'alignement de la fiscalité du capital sur celle du travail. Pour les participants à la réunion de mardi soir, Laurence Parisot, la présidente du Medef, a voulu récupérer le mouvement des Pigeons et servir ainsi les intérêts de l'organisation patronale. La CGPME, qui représente les PME, a dénoncé violemment auprès de ses membres cette ligne jusqu'au-boutiste.

« Etat d'urgence entrepreneurial ». Le communiqué coup de poing publié tard dans la soirée de mardi par les organisations patronales, comme le Medef, Croissance Plus, et l'AFEP, les représentants du numérique comme France Digitale ou la Fédération Syntec (ingénierie, éditeurs de logiciels, SSII...), des fonds d'investissement (l'AFIC) et le porte-parole des Pigeons, Jean-David Chamboredon, a mis le feu au ministère de l'Economie et des Finances. Selon nos informations, l'appel au retrait du texte sur l'alignement de la taxation du capital sur le travail a braqué Bercy, permettant aux tenants de la ligne fiscale la plus dure de reprendre la main et de revenir sur les concessions déjà faites sur le texte.
Si au lendemain de ce coup de force, les signataires du texte affichaient une belle unanimité, la rencontre de la veille au soir avait en réalité été plutôt houleuse. Parmi la trentaine de participants, certains ont eu le sentiment d'être pris en otage par un Medef  pressé de récupérer un mouvement qui donnait une image positive des entreprises dans l'opinion. Seul à se démarquer officiellement du communiqué patronal pour dire ce que beaucoup pensent tout bas, la CGPME (qui représente les PME). Non seulement, son président, Jean-François Roubaud, s'est déclaré favorable aux propositions d'aménagement du texte obtenues dans la journée, mais il a aussi violemment condamné la position radicale adoptée par les autres associations.
La CGPME s'emporte contre les organisations patronales
Dans un texte obtenu par la Tribune et envoyé aux membres de la CGPME, Jean-François Roubaud écrit :« En clair, le gouvernement, au vu des documents dont nous disposons, s'est engagé à revenir sur les dispositions concernant la taxation des plus values de cession que nous avons combattues avec vigueur ». Et de s'emporter : « le communiqué « Etat d'Urgence Entrepreneurial » risque de ruiner nos efforts en braquant les parlementaires et en faisant échouer les amendements pourtant salutaires pour les entreprises et leurs dirigeants ».
Laurence Parisot débarque
Au départ, rien ne préjugeait d'une issue si brutale à cette  réunion, même si plusieurs convives redoutaient un traquenard. Invités à l'initiative de Marie Ekland (France Digitale) et de Croissance Plus  pour déterminer comment « agir de concert » ou « coordonner les messages et la communication » face au texte gouvernemental, certains participants ont été très étonnés de voir débarquer Laurence Parisot en personne. Un premier tour de table a eu lieu, chacun exprimant ses positions. Ainsi, les propositions d'aménagement faites par Bercy dans la journée aux uns et aux autres n'ont d'ailleurs pas été discutées. En revanche, très vite, une ligne de fracture est apparue entre les tenants de la poursuite des négociations avec les services de Jérome Cahuzac et la demande pure et simple du retrait du texte. Partisane d'une attitude virile vis-à-vis de Bercy, Laurence Parisot a lancé qu'il fallait avoir « une ligne maximaliste ! », selon des propos rapportés.
Selon un convive, le Medef "demande la convergence de lutte"
Présent au dîner, un témoin décode : « le Medef est venu demander aux Pigeons la convergence de lutte ». De fait, certains représentants du numérique ont fait valoir la spécificité des entrepreneurs, et de leurs bailleurs de fonds, dont la réussite est fondée sur la prise de risque. En réponse, les organisations patronales ont expliqué qu'il ne fallait surtout pas diviser les entrepreneurs. Qu'il n'y avait pas que les entreprises de croissance (les start-ups), mais aussi les industriels. Autrement dit, pour le Medef ou pour l'AFEP, un actionnaire de Total ou de L'Oréal vaut autant qu'un business angel.
Soucieux de ne pas donner l'impression d'avoir été instrumentalisé, Jean-David Chamboredon justifie son ralliement : « J'étais sceptique en me rendant à ce dîner, ne connaissant pas trop les problématiques des grosses boîtes. J'ai réalisé qu'elles subissaient à long terme le même préjudice que nous. Cela ennuie par exemple l'AFEP (Association française des entreprises privées, ndlr) qu'à terme les actionnaires des entreprises puissent tous devenir des non résidents ».
Exercice d'équilibriste
Dubitatif sur la ligne jusqu'au-boutiste dure, le Syntec numérique, une division de la fédération Syntec, a attendu mercredi pour rejoindre le mouvement. Se prévalant d'une attitude modérée, son président Guy Mamou-Mani justifie les raisons qui ont poussé le syndicat à soutenir le patronat : « La réunion que nous avions eue dans l'après-midi à Bercy s'était très bien passée. Mais j'ai réalisé que malgré la bonne volonté du cabinet, la situation était inextricable et que l'on ne pourrait jamais clarifier les définitions d'investisseur et de créateur. Que ce serait une usine à gaz ! ». Le Syntec Numérique ne souhaite pour autant pas rompre avec les services du ministère. Trois autres fédérations professionnelles, l'Afdel (éditeur de logiciels), le Comité Richelieu (Association des PME innovantes) et le SNJV (Syndicat des jeux vidéos) tentent aussi cet exercice d'équilibriste, qui consiste à rester solidaire des signataires tout en poursuivant les négociations avec le ministère de l'Economie et des Finances. A une différence près, elles n'ont pour le moment pas encore signé le texte de mardi soir.

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