Les différentes mesures d'alourdissement de la taxation en
France ont suscité de nombreuses critiques pour l'incitation
supplémentaire à l'exil qu'elles représentent. Contrepoints a interrogé
plusieurs de ces candidats à l'exil, qui préfèrent quitter la France que
d'en supporter les pesanteurs, le manque d'opportunités, l'écrasante
pression fiscale ou la haine des créateurs de richesse.
Les différentes mesures d'alourdissement de la taxation en France par
François Hollande ont suscité de nombreuses critiques pour l'incitation
supplémentaire à l'exil qu'elles représentent pour beaucoup. A la clef,
moins d'entrepreneurs, de créateurs, de talents de demain pour financer
des dépenses déjà largement supérieures aux recettes. Afin d'en savoir
plus, Contrepoints a interrogé plusieurs de ces exilés ou candidats à
l'exil, qui préfèrent quitter la France que d'en supporter les
pesanteurs, l'écrasante pression fiscale ou la haine des créateurs de
richesse.
Loin des portraits de vils capitalistes apatrides que beaucoup se plaisent à caricaturer, les quatre personnes dont Contrepoints
vous propose un portrait croisé qui représente le vrai visage de ceux
que le "modèle social" fait fuir, qui iront apporter de la prospérité à
d'autres pays, et qui n'ont jamais été aussi nombreux qu'aujourd'hui.
Quelles motivations ?
Les motifs qui poussent ces français à fuir leur propre pays sont nombreuses. Pour les uns comme Pierrick, 25 ans, c'est le " rejet total des choix économiques et politiques pris par nos dirigeants", tous communiant dans l’État comme unique solution aux problèmes français.Pour Matt, bientôt 30 ans, qui a accumulé une dizaine de petits boulots en France ("dans le désordre, équipier McDonald's, monteur-maquettiste, projectionniste de cinéma, assistant de communication, éducateur technique, enseignant de la conduite automobile et de la sécurité routière"), c'est le manque d'opportunité en France qui est le facteur déclencheur :
De nouveau au chômage, j'ai eu plusieurs opportunités: monter ma propre structure d'enseignement, continuer d'être salarié-jetable, changer complètement de voie pour tenter de vivre ma passion pour l'automobile ancienne… À chaque fois, j'ai eu en travers de ma route au moins [une des scléroses de la société française], quand ce n'était pas plusieurs à la fois.Les motivations de Julien, 29 ans, ne sont pas différentes : "Après avoir fini mes études d'Histoire je n'ai trouvé aucun poste dans aucune administration (postes politisés à outrance), j'ai échoué 2 fois à l'agrégation. Pourtant après avoir envoyé des CV dans toutes les boites et administrations de la région je n'ai essuyé que des refus. Je maîtrise 2 langues parfaitement, j'ai étudié à l'étranger, j'ai Bac+5 avec mention Bien. Même la CAF n'a pas voulu de moi... Je me suis rendu compte des profondeurs qu'a touché mon pays quand j'ai voulu passer un concours de catégorie B, 15 postes sur toute la France pour presque 3000 inscrits. Du coup j'ai décidé de faire une formation professionnalisante qui me permettra d'obtenir un diplôme, je vais bientôt obtenir un CAP de pâtissier (une de mes passions) et je partirai en Suisse, [où je gagnerai nettement mieux ma vie]".
Dans le cas de Jean, 43 ans, dirigeant d'une PME qui emploie douze personnes, les motifs sont nombreux pour quitter la France, en particulier "le manque de perspective en Europe, un vieillissement structurel (et qui n'est jamais abordé, voir plus bas), la réglementation délirante en France (sociale, fiscale) et le peu de sens commun de mes compatriotes qui me désespère." Mais c'est aussi la liberté religieuse qu'il estime menacée en France : "Sans parler de l'aspect moral et religieux (catho dit "pratiquant"), bien moins oppressant ailleurs, et plus simple : réel respect des croyances, sujet non tabou, y compris au sommet de l’État."
Pour Annalea, la vingtaine, il s'agit de poursuivre ses études aux États-Unis, où son talent était reconnu : "Pour une fois, la bourse que l'on m'offrait était basée sur des critères scolaires et sur mon projet de thèse et non sur des critères ethniques, sociaux et j'en passe." Mais les opportunités futures jouent aussi : "Une de mes amies vient de trouver aux États-Unis un premier poste dans l'enseignement supérieur : salaire à 40 000 $ par an. CQFD"
Enfin pour Henri, "la France est un pays ou il fait bon vivre quand on appartient à certaines catégories" (riches profitant de la complexité fiscale, fonctionnaires ou assistés). "Pour les autres catégories de Français, il est dur de vivre en France. Instabilité juridique, criminalité, transports en Île de France relativement désastreux, prix de l'immobilier complètement hors de portée, impôts. Les classes "moyennes" et un peu au-dessus portent tout le poids des autres en France. "
Quels freins à l'exil?
La famille est clairement le principal frein cité, mais pas le seul, comme dans le cas de Jean :"Entre les études de mes enfants (3 post-bac en septembre), la vente de mon affaire (patron de PME dans l'Ouest, 12 personnes, les ventes sont délicates) et de ma maison (plus facile), cela commence à faire beaucoup de soucis."Mais les freins semblent moins forts que les incitations : "Le détail du paquet fiscal et social socialiste (RSI, SMIC, etc...) pourrait accélérer l'opération... irréversible j'en suis convaincu" pour Jean. De même, Henri, déjà parti, l'a fait avec femme et enfants.
Quelles Destinations ?
Sans surprise, les pays les plus socialistes sont loin de séduire, alors que les pays relativement plus libéraux que la France attirent, en particulier les pays anglophones : Henri a choisi le Canada : "C'est le pays le plus facile d'accès au monde en dehors des autres pays européens. Facile par les lois sur l'immigration, facile par la proximité linguistique (mais pas culturelle), facile par les 6h d'avion qui nous séparent de Paris (à contrario de Wellington, NZ ou Sidney, AUS...)."Pierrick a lui choisi l'Australie : "J'ai décidé de partir pour 1 an minimum à Melbourne via un visa working holiday." Le tout pour un départ dès début septembre.
Matt lui étudie plusieurs options : "Après, Canada, USA, Japon ou même Mongolie, de toute façon je suis certain que d'ici peu de temps on m'accordera un statut de réfugié politique…"
Jean envisage pour sa part "les États-Unis qui ont notre préférence, pour le ratio espace/liberté/sécurité et distance de la France (famille...). S'installer en Afrique, OK, mais, malgré une stabilisation politique, y investir n'est pas toujours si évident. L'Afrique du Sud présente de très bonne opportunités financières (les entreprises sont peu chères). L'Australie encore plus, mais la distance reste un sacré frein pour les vacances scolaires des enfants."
Reviendront-ils?
Rares sont les cas où la décision de partir a été prise de gaîté de cœur. Et ceux qui ont une famille excluent rarement de rentrer, même si sûrement pas avant un certain temps. Mais les obstacles sont grands. Pour Henri, "quand la poussière sera retombée [..], si les impôts baissent de moitié et que le pays redevient attractif [..], si la police peut faire son travail sans que la justice le casse. [..] Pour revenir il faut au moins une décennie, que les Français prennent conscience des problèmes et trouvent des solutions réalistes".Mais les plus jeunes se demandent vraiment si revenir un jour en France est une option. Pour Julien, "franchement non je ne reviendrai pas ou alors pour quelques mois le temps de revoir la famille. Les destinations qui m'attirent sont très compétitives en matière de santé, éducation ainsi que dans tout ce qui permet une vie de famille heureuse".
Annalea est réservée elle-aussi, critiquant en particulier le manque de liberté académique réelle en France : "Je ne suis pas hostile à un retour en France mais le monde de la recherche laisse peu d'espace de liberté (choix de sujets, orientations épistémologiques, - et donc de publication -, direction d'étudiants en thèse etc.) pour 1) qui ne correspond pas au profil (les Ph.D. américains ne sont pas reconnus sans une équivalence approuvée par une commission composée à majorité de professeurs "bien orientés") 2) qui ne rejoint pas les [mandarins] dans leur conviction".
Au final, note d'optimisme dans leur discours, tous aimeraient que la France les accueille enfin à bras ouverts et cesse de rejeter le succès et d'empêcher les talents d'émerger par un modèle figé. Ces talents dont la France se prive espèrent pouvoir revenir quand la France tournera le dos aux recettes qui assurent son échec depuis des décennies. Comme le dit Matt, "je suis d'un optimisme à faire peur, sinon, je crois que je serais déjà mort!".
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