Mais un système restait nécessaire pour prévenir contre une panique bancaire. Les politiciens ont donc mis en place l'ELA (Emergency Liquidity Assistance, en français Soutien exceptionnel à la liquidité bancaire). Ce mécanisme permet de sortir du rôle classique de la BCE, en permettant aux différentes banques centrales européennes de mettre de l'argent à disposition des banques rencontrant des problèmes de liquidités, comme c'est le cas en Grèce, et ce afin d'éviter le début d'une panique financière. Mais la dette relève alors de la responsabilité de la banque centrale nationale et de son gouvernement.
mercredi 27 juin 2012
S'unir ou périr : la zone euro à l'heure du jugement dernier
Pour le financier américain John
Mauldin, il ne resterait plus que deux choix à l’Europe : permettre à la
zone euro de se dissoudre, ou avancer vers une union fiscale, avec des
contrôles budgétaires centralisés.
Le plus dur dans une crise économique, c'est
d'estimer à quel moment la confiance des investisseurs se lézarde.
Carmen Reinhart et Ken Rogoff l'exposent clairement dans This Time Is Different qui retrace huit siècles de crises financières. Les économistes ne savent pas appréhender le moment où la confiance s'effondre. Leur
incapacité à mesurer exactement la fragilité de cette confiance est le
principal facteur donnant lieu au syndrome du "Cette fois c'est
différent" qui pousse les acteurs économiques à s'imaginer que la
période qu'ils vivent n'a rien à voir avec les crises financières du
passé.
"Ce
que l'on voit, encore et encore, dans l'histoire des crises financières,
c'est que lorsqu'on s'attend à un accident, il finit par se produire.
Quand les pays deviennent trop profondément endettés, ils vont au-devant
d'ennuis (…). Mais le moment exact peut être très difficile à deviner
et une crise qui paraît imminente peut parfois prendre des années à
s'enflammer", ajoutent les auteurs.
Le
conseiller financier John Mauldin part d’un constat simple : on sait que
l’argent s’envole des banques grecques. Certaines d’entre elles sont
clairement insolvables, et pourtant elles répondent aux demandes de
retraits. "D’où vient ce cash ? La réponse est à trouver dans un
nouvel acronyme européen : le ELA. Y aura-t-il une limite à cette
générosité ?”, s'interroge l’expert.
Selon le consultant, pour
comprendre la débâcle grecque, il faut revenir sur le rôle d'un
organisme qui a joué un rôle central dans la crise de l'eurozone : la
Banque centrale européenne. Car le rôle de la BCE ne se limite pas à imprimer des billets et à mettre de l'argent en circulation.
La banque centrale européenne dispose d'un "bureau" qui la gouverne et
s'avère assez proche du "Federal Open Market Committee" de la Réserve
fédérale américaine. La BCE se réunit et fixe les grandes lignes
politiques auxquelles se conformeront ensuite les banques centrales des
différents pays européens.
Ainsi,
lorsque la BCE décide de réinjecter mille milliards d'euros dans les
banques européennes, comme ce fut le cas lors de la récente "Opération
de refinancement à long terme" (LTRO), ce sont en vérité les différentes
banques centrales européennes qui effectuent la transaction pour leurs
banques nationales. Et la BCE se porte garante pour tous les risques des prêts qu'elle autorise, plutôt que les banques centrales nationales.
Lors
du récent LTRO, le taux d’intérêt à été fixé très bas, et les banques
qui en ont profité ont ensuite pu prêter l'argent à des clients ou bien
acheter des obligations du gouvernement. L’Espagne et l'Italie sont les
deux pays qui ont le plus bénéficié de cet argent bon marché.
Alors
que les banques des autres pays ont utilisé l'argent à d'autres fins
que l'achat de dette publique, les banques d'Espagne et d'Italie ont
emprunté à 1% pour acheter leurs propres obligations d'Etat.
Selon Joseph Leddet, conseiller indépendant auprès des entreprises et des collectivités, "La
BCE, avec l'appui des banques centrales des pays de la zone euro,
finance sans limites tout le secteur bancaire européen, qui ne sert à
rien pour l'économie, car il ne prête plus rien aux acteurs économiques
réels, replaçant tout son cash auprès de la BCE. A contrario, celle-ci
ne fait rien ni pour les États (comme en témoigne la dramatique crise de
la dette grecque ou espagnole), ni pour les collectivités locales, ni
pour les entreprises, ni pour les ménages, à qui les banques
commerciales (inondées pourtant d'argent de la BCE), coupent les
crédits. Il paraîtrait ainsi utile de réquisitionner les banques de la
zone euro, en leur enjoignant - d'une manière autoritaire - de prêter,
voire de donner via la BCE, une certaine somme d'argent aux agents
économiques : par exemple 3000 € aux ménages et 20 000 € aux PME. Sinon,
nous nous approchons rapidement de la guerre civile."
Mais
la BCE ne garantit pas les dépôts des banques dans les pays membres,
comme le fait la Réserve fédérale américaine. Dans ces circonstances,
comment l'Euro
A la création de l'eurozone, les politiciens ont
voulu éviter d'établir un équivalent du FDIC américain, le Federal
Deposit Insurance Corporation. Pas question de garantir les dépôts des
banques nationales des pays membres. Certains pays ayant
d'immenses secteurs bancaires, les autres ne souhaitent pas garantir
des dépôts sur lesquels ils n'ont strictement aucun contrôle.
Un tel système aurait signifié une régulation à l'échelle de la zone
euro, tout comme le FDIC aux Etats-Unis régule les banques américaines.
Mais
les Allemands et les Français n'ont pas souhaité abandonner leur
relative indépendance : chaque pays sera donc responsable de la
régulation et de la garantie de ses propres banques.
Mais un système restait nécessaire pour prévenir contre une panique bancaire. Les politiciens ont donc mis en place l'ELA (Emergency Liquidity Assistance, en français Soutien exceptionnel à la liquidité bancaire). Ce mécanisme permet de sortir du rôle classique de la BCE, en permettant aux différentes banques centrales européennes de mettre de l'argent à disposition des banques rencontrant des problèmes de liquidités, comme c'est le cas en Grèce, et ce afin d'éviter le début d'une panique financière. Mais la dette relève alors de la responsabilité de la banque centrale nationale et de son gouvernement.
Mais un système restait nécessaire pour prévenir contre une panique bancaire. Les politiciens ont donc mis en place l'ELA (Emergency Liquidity Assistance, en français Soutien exceptionnel à la liquidité bancaire). Ce mécanisme permet de sortir du rôle classique de la BCE, en permettant aux différentes banques centrales européennes de mettre de l'argent à disposition des banques rencontrant des problèmes de liquidités, comme c'est le cas en Grèce, et ce afin d'éviter le début d'une panique financière. Mais la dette relève alors de la responsabilité de la banque centrale nationale et de son gouvernement.
Si
les comptes de la banque fédérale américaine sont relativement
transparents, c'est moins le cas de ceux de la BCE concernant le Soutien
exceptionnel à la liquidité banquaire. "On ne dit pas quand on est
dans une situation d'urgence, parce qu'alors vous faites empirer la
situation. Je ne vois donc vraiment pas l'intérêt d'être plus
transparent", commentait récemment le gouverneur de la banque centrale belge, Luc Coene, dans une interview accordée au Financial Times.
Les comptes exacts du ELA ont été relégués dans la catégorie "Autres" du bilan de la BCE. Mais il
est possible d'estimer le montant du ELA, précisément parce que la
catégorie "Autre" a brutalement augmenté depuis que le ELA y a été
intégré. elle serait d'environ 150 milliards selon le Financial Times, mais plus de 200 milliards ont probablement été prêtés cette semaine, alors que la Grèce et d'autres pays ont dû faire face à des situations critiques.
Dans la catégorie "autre" du bilan de la BCE, les créances sont brutalement passées de 50 à plus de 200 milliards en un an.
L'aide
d'urgence sous forme de liquidités permet ainsi aux différents
gouvernements nationaux européens de créer des prêts en euros auprès de
leurs banques lors de situations d'"urgence". La Grèce, via sa banque
centrale, a donc la possibilité d'imprimer des euros. Plus de
600 millions d'euros quittent ainsi le système bancaire grec chaque
jour, sachant qu'il ne reste qu'environ 150 milliards, soit 2% des
dépôts effectués par semaine.
D'où les conclusions auxquelles arrive Thomas Warner dans un article publié sur Seeking Alpha :
"Comme
l'amas de prêts consentis au titre de l'aide sous forme de liquidités
augmente, les gouvernements d'Europe du Nord vont probablement commencer
à mener campagne pour imposer des limites à l'utilisation par la Grèce
de cette aide ou à la couper complètement. Si le gouvernement grec
menace l'Europe de défauts de paiement sur ses dettes, la question de
couper l'aide d'urgence sous forme de liquidités à la Grèce devrait être
soulevée en même temps. Mais à la périphérie et en France, des voix
s'élèveront en faveur de la clémence. Un vote pour couper l'aide
d'urgence à la Grèce serait un vote condamnant son système bancaire. Ce
qui reviendrait à envoyer un message très effrayant aux épargnants des
banques espagnoles, italiennes, irlandaises et portugaises et pourrait
créer une banqueroute générale à l'échelle européenne."
pe peut-elle se prémunir d'une banqueroute générale ?
Selon lui, l'Europe sera donc contrainte à
faire des compromis pour éviter un effet domino d'effondrement des
systèmes bancaires européens. L'aide accordée à la Grèce sous forme de
liquidités pourra être limitée, mais elle ne disparaîtra pas
complètement, afin que la Grèce ne se retrouve pas en défaut de
paiement.
Et comme il n'y a aucun moyen
de forcer la Grèce à payer les pertes engendrées par l'aide consentie
sous forme de liquidités, c'est l'Europe qui devra payer, d'une façon ou
d'une autre, la facture.
"La seule
question sera de savoir si elle paiera de façon pro-active, à travers un
autre plan de sauvetage de la Grèce plus important, repoussant le
remboursement à une échéance future, ou si elle paiera en ne permettant
plus à la Grèce de bénéficier de l'aide d'urgence de la BCE, forçant les
banques grecques à fermer, avant de devoir reconstituer le
capital de la BCE anéanti par l'incapacité de la Grèce à garantir ses
prêts issus de l'aide d'urgence", conclut Thomas Warner.
Quand, donc, la confiance va-t-elle définitivement se rompre ? "Je pense que le moment est assez proche",
avance Mauldin. L’Espagne ne peut plus emprunter l’argent dont elle a
besoin pour renflouer ses banques à un taux acceptable et a en réalité
été éjectée du marché obligataire. Selon lui, c’est "mathématique"
: l’Espagne n’aura pas seulement besoin d’un plan de sauvetage mais
aussi de restructurer sa dette ou de faire défaut sur une partie.
Et
quand l’Espagne aura besoin de cet argent, le marché deviendra très
nerveux au sujet de l’Italie, sans oublier le Portugual, et l’Irlande,
qui auront également besoin d’"oublier" leur dette, selon l’analyste. La
chancelière allemande Angela Merkel a mis en garde contre la politique
de François Hollande, qui selon elle pourrait détruire l’eurozone en
amenant la crise de la dette souveraine jusqu’en France.
Un
sommet censé avoir lieu dans quelques semaines se prépare. Gordon
Brown, l’ancien premier ministre britannique, a déclaré que "les
plans standards, mais souvent vides, généralement décidés dans de tels
sommets ne suffiront pas alors que le jour du jugement dernier pour la
zone euro approche." Il a prévenu : "la crise menace de s’étendre et d'arriver en Italie, voire jusqu'en France".
Il
resterait donc deux choix à l’Europe; soit permettre à l’eurozone de se
dissoudre, soit avancer vers une union fiscale, avec des contrôles
budgétaires centralisés. Cette dernière option signifie la mise
en place d’eurobonds et une autorité de taxation centrale. Cela veut
également dire que les syndicats nationaux cèdent le contrôle aux
technocrates et aux politiciens de Bruxelles, et le tout entraine donc
un changement de la législation du travail.
“Il y a une limite à la dette que le marché voudra bien tolérer",
explique Mauldin. Cette limite, personne ne la connait vraiment avant
qu’elle ne soit atteinte, et il est alors trop tard. La limite a de
toute évidence été atteinte en Espagne. Ce sera bientôt le cas en Italie
et en France si de sérieuses réformes ne sont pas prises. L'expert en
veut pour preuve les crédits default swaps de l’Allemagne qui
grandissent un peu plus chaque semaine.
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