Nicolas Sarkozy a défendu mardi 31 janvier au matin, à l'Elysée, devant les parlementaires de la majorité (UMP, Nouveau centre, Alliance centriste) les mesures qu'il a annoncées dimanche pour tenter d'enrayer le chômage et d'améliorer la compétitivité française. Et a demandé à ces élus "de prendre le relais législatif" de ces mesures, selon des propos du président rapportés par plusieurs élus UMP sur Twitter.
Peu avant, Nicolas Sarkozy avait débriefé son émission télévisée avec les ténors de l'UMP, lors du petit-déjeuner de la majorité.
"JE SUIS LE SUICIDAIRE LE PLUS EN FORME DE FRANCE"
Même s'il est distancé dans les sondages par le candidat socialiste, François Hollande, M. Sarkozy a de nouveau réaffirmé sa conviction selon laquelle le match est loin d'être joué à l'avance, selon des participants à la réunion.
"On me dit suicidaire, je suis le suicidaire le plus en forme de France", a notamment déclaré le chef de l'Etat, selon le député UMP Sébastien Huygue, sur Twitter.
Le chef de l'Etat faisait allusion à de récentes déclarations d'un autre député UMP, Lionnel Luca, selon qui la hausse de la TVA annoncée pour financer la protection sociale ne relève pas du courage mais du "suicide politique". Réitérant ses critiques contre la TVA sociale, M. Luca n'est d'ailleurs pas venu à cette réunion.
"Je suis déterminé comme jamais", a-t-il ajouté, rapporte l'ancienne ministre et sénatrice UMP de Paris, Chantal Jouanno, sur le réseau social. "Si votre candidat arrive à faire passer ses idées, on a des chances de l'emporter" aux élections présidentielle et législatives, a encore estimé M. Sarkozy, selon un membre de l'UMP, cité par l'AFP.
Selon M. Huygue, le président s'est montré "en grande forme, à l'offensive, complètement tourné vers l'intérêt de la France et des Français". Une impression également relayée par les députées UMP Valérie Rosso-Debord et Laure de La Raudière.
"PARFOIS, L'ATTENTE FAIT MONTER LE DÉSIR"
Pressé par une partie de la majorité d'accélérer l'officialisation de sa candidature à l'élection présidentielle des 22 avril et 6 mai, le chef de l'Etat a souligné l'avantage de l'annoncer le plus tard possible. "Parfois, l'attente fait monter le désir", a-t-il expliqué, selon M. Huygue.
"Je vous demande d'être patients et ne pas tomber dans tous les pièges. Le moment n'est pas encore venu", a-t-il ajouté, selon Mme Jouanno.
A près de 80 jours du premier tour de la présidentielle, le locataire de l'Elysée a également livré son analyse sur la manière dont le scrutin "se jouera", en précisant les thèmes qui, selon lui, seront au cœur du débat. "La présidentielle ne se jouera pas sur la gauche, la droite ou le centre. Elle se jouera sur la prise en compte de ce nouveau monde", a-t-il estimé, selon Chantal Jouanno.
Avant d'ajouter, toujours selon cette dernière : "La présidentielle ne se joue pas avec des petites décisions dans un pays frondeur et qui aime le panache comme la France." "On croit au travail, c'est notre marque de fabrique, notre singularité", aurait encore lancé M. Sarkozy, reprenant son thème de campagne de 2007.
Pour la campagne électorale, "parler du bilan, c'est insuffisant, et les projets, plus personne n'y croit. Il convient de faire un mix entre les projets d'aujourd'hui et de demain", a-t-il déclaré, selon une source UMP citée par l'AFP. Pour l'avenir, M. Sarkozy croit "à quatre ou cinq mesures très fortes".
"LE DRAME VIENT DE L'EUROPE OÙ NOUS PERDONS DES PARTS"
M. Sarkozy a également justifié les réformes engagées à la fin de son quinquennat. "Notre boussole est : 'qu'est-ce qui est bon pour la France' ?", s'est-il interrogé, selon Sébastien Huygue.
"Le drame ne vient pas de la Chine mais de l'Europe où nous perdons des parts", a-t-il regretté pour justifier les mesures annoncées pour améliorer la compétitivité française. "Les principales pertes de part de marché du 'fournisseur' France sont vis-à-vis de nos clients européens sur ces neuf dernières années", a-t-il expliqué, selon le député UMP Olivier Carré.
Le chantier prioritaire reste la formation des chômeurs pour rendre obligatoires les formations qualifiantes vers les secteurs en croissance, a encore précisé M. Sarkozy. Il a répété qu'il avait dû faire preuve de courage pour mettre en place la taxe sur les transactions financières, note Olivier Carré.
"COMMENT VOULEZ-VOUS ATTENDRE TRANQUILLEMENT LES ÉLECTIONS ?"
Le chef de l'Etat a aussi, selon M. Huygue, justifié le tempo des réformes engagées : "Si on ne fait rien maintenant, on attendra après la présidentielle, puis après les législatives, puis après les vacances donc pas avant septembre".
"Comment voulez-vous après avoir dit que nous sommes devant un mur, attendre tranquillement les élections ?", a-t-il ajouté, selon Mme Jouanno. "Vous voyez le président de la République dire a une personne au chômage : 'il y a les élections on fait rien...' ?", s'est-il encore interrogé à voix haute, selon Valérie Rosso-Debord.
Le locataire de l'Elysée a regretté les critiques dont il a été l'objet pour avoir mené la réforme des retraites, en 2010. "J'ai pas de chance. Les retraites on m'a dit c'est trop tôt. Et maintenant on me dit c'est trop tard !", a-t-il dit, selon Mme Jouanno.
UNE PIQUE POUR HOLLANDE
M. Sarkozy a aussi ironisé sur les critiques du PS sur la hausse de la TVA, estimant - d'après Mme Jouanno - ne pas à avoir à recevoir de leçons de la part de "ceux qui ne proposent que des impôts !"
Et a également lancé une pique à son adversaire François Hollande, qui voudrait, selon lui, "attendre septembre pour prendre des mesures" contre le chômage. Partant de ce constat, M. Sarkozy a demandé, selon la même source : "Ça donne envie de voter pour lui ?!"
"LE DIALOGUE, ON L'A AVEC LES FRANÇAIS, PAS AVEC LA PRESSE"
Le président de la République a enfin donné son sentiment sur l'état d'esprit des Français face aux réformes engagées. "Et si tout un coup on faisait confiance à notre peuple ? La vérité est que le peuple Français est plus courageux que ses élites. La réalité est que les élites sont dans le politiquement correct", a-t-il lancé, d'après Mme Jouanno.
Et de trancher, selon le député UMP Olivier Carré : "Je dois faire mon devoir et j'ai confiance dans les Français. Le dialogue, on l'a avec les Français, pas avec la presse."
Récemment, le conseiller spécial de M. Sarkozy, Henri Guaino, a justement jugé que le camp du président sortant n'était "pas beaucoup aidé dans les médias" et se battait "dans une hostilité générale".
A la fin de son discours, le chef de l'Etat aurait été "très applaudi par tous les parlementaires présents", précise encore M. Huygue. Certains le faisant par politesse, d'autres avec plus d'entrain...