Putain, vingt-trois ans ! Arrivés à l’antenne (sous le titre "Les Arènes de l’info") le 29 août 1988, quatre mois après la réélection de François Mitterrand, "Les Guignols" s’apprêtent à couvrir leur quatrième campagne présidentielle. Ceux qui accéderont au droit de vote en 2012 sont nés après que la parodie de journal télévisé animée par "PPD" a reçu ses deux premiers 7 d’or.Autant dire que l’affaire est techniquement rodée. De la réunion matinale des auteurs jusqu’au direct du soir, le rituel n’a pas varié. Habilleuses, costumières et accessoiristes s’affairent dans le bâtiment qui est réservé aux "Guignols", à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), où s’entassent quelque 350 marionnettes. En fin d’après-midi, marionnettistes et imitateurs enchaînent les répétitions à quelques centaines de mètres de là, au Studio104 de la Plaine Saint-Denis, sous la baguette d’Yves Le Rolland, producteur et grand ordonnateur de l’émission depuis 1995. Au rayon imitateurs, si Nicolas Canteloup (désormais sur TF1 à 20h35) a été discrètement remplacé depuis la rentrée, Yves Lecoq reste fidèle au poste – essentiel, puisqu’il assure en moyenne près de 70% des voix – qu’il occupe depuis l’origine. Bref, tout le monde est là. Y compris les téléspectateurs, que "Les Guignols" ont retrouvés en nombre (plus de 2 millions en moyenne, selon Canal+) depuis que leur diffusion a été avancée à 19h50, face à la pub qui précède la grand-messe des (vrais) JT.
Les explications avancées sont multiples. Primo, le trio d’auteurs de "l’âge d’or" du début des années 1990 (Bruno Gaccio, Benoît Delépine et Jean-François Halin) est a posteriori jugé "brillantissime". "Des orfèvres", estime Julien Hervé. Secundo, le contexte – médiatique et politique – est radicalement différent. Quand l’offre de programmes s’est multipliée, l’esprit "Guignols" – l’art de la dérision et de l’autodérision emblématique de la chaîne cryptée – s’est largement diffusé hors des frontières de Canal+. "Les Guignols ont ouvert une brèche. Tout le monde s’y est engouffré", souligne Lionel Dutemple. "On évite de regarder ou d’écouter les autres. Sinon ça pourrit la tête", ajoute Julien Hervé. "Il est plus difficile d’exister aujourd’hui alors que tout s’est 'guignolisé'", note un de leurs prédécesseurs, Alexandre Charlot.
Jean-Baptiste de Montvalon
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