TOUT EST DIT

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samedi 17 septembre 2011

Le vote danois confirme le rejet en Europe des pouvoirs sortants

Au lendemain de la victoire des sociaux-démocrates aux législatives danoises, que signifie le retour de la gauche au pouvoir, après dix ans de gouvernement libéral-conservateur ? Cette alternance historique pour le Danemark est surtout le résultat de la crise économique. La montée du chômage et la morne croissance ont été imputés à l'équipe sortante, menée par le libéral Lars Loekke Rasmussen.

Avec un taux de chômage de 4,1 % (10 % pour les jeunes) et un déficit qui devrait représenter  4,6 % du PIB en 2011, le Danemark affiche pourtant des statistiques dont rêveraient nombre de pays européens. Mais ces chiffres sont très en deçà de ses performances habituelles. Le pays a énormément souffert de la crise de 2008 (après laquelle l'Etat a dû nationaliser neuf banques) et affiche la plus mauvaise performance économique des nations scandinaves, évitant de justesse cette année un retour à la récession grâce à un maigre rebond de croissance au deuxième trimestre (+ 1 %).
La sociale-démocrate Helle Thorning-Schmidt a promis d'augmenter  les dépenses publiques et les taxes. Elle propose également d'allonger le temps de travail de douze minutes par jour, soit une heure par semaine, afin de relancer l'économie. Toutefois, "avant d'être un vote d'adhésion aux idées sociales-démocrates, le vote de jeudi marque le rejet du pouvoir en place en matière d'économie", analyse Jacob Christensen, professeur associé en sciences politiques à l'université d'Odense.
L'EXTRÊME DROITE EN RECUL
Les Danois semblent ainsi s'inscrire dans un vaste mouvement d'alternance à l'échelle européenne : avant le Danemark, l'Irlande, le Royaume-Uni, le Portugal et les Pays-Bas ont tous connu des changements à l'occasion d'élections. En Espagne, les socialistes au pouvoir sont affaiblis à l'approche des législatives du 20 novembre, tandis que la chancelière allemande Angela Merkel essuie une série de revers électoraux depuis mai 2010.
L'économie a complètement éclipsé les thèmes de l'immigration et de la sécurité dans la campagne danoise, deux dossiers qui ont pourtant nourri ces dernières années la rhétorique de l'extrême droite. Ce recul des thèmes sécuritaires sur l'agenda politique explique en parti le repli du Parti du peuple danois (DF) sur l'échiquier parlementaire : le DF a en effet perdu trois sièges, mais garde un noyau dur d'électeurs à 12,3 % des voix, son niveau de 2001 (contre 13,9 % en 2007).

Jacob Christensen avance une autre explication à ces résultats du DF : la réforme des retraites approuvée juste avant l'été. "Le DF avait promis de ne pas toucher à l'âge de départ en retraite mais, en mai, il est revenu sur sa promesse [l'âge de départ a été reculé de 65 à 67 ans et la fin progressive des départs anticipés, jusqu'alors possibles dès 60 ans, a été entérinée]. Il est fort probable que des électeurs du DF, qui se sont sentis trahis, aient reporté leur voix sur les sociaux-démocrates."
PAS D'ASSOUPLISSEMENT DE LA POLITIQUE MIGRATOIRE
Ce relatif affaiblissement de l'extrême droite danoise signifie-t-il une libéralisation de l'opinion publique vis-à-vis des thèmes de l'immigration et de la sécurité ? "On va peut-être assister à une libéralisation et à un assouplissement des conditions d'accueil des étrangers, prédit Jacob Christensen. Mais dans l'ensemble, la politique migratoire danoise fait consensus : elle est approuvée par les deux tiers de la population." Pour le politologue, la future première ministre, Helle Thorning Schmidt, ne touchera pas aux mesures phares de cette politique migratoire. Notamment à la très symbolique "règle des 24 ans", qui fixe un âge minimum au regroupement familial pour lutter contre les mariages blancs, une mesure à laquelle l'opinion publique danoise reste attachée.
Il n'y a donc pas d'assouplissement spectaculaire à attendre en matière de politique migratoire ou sécuritaire. En revanche, l'arrivée au pouvoir des sociaux-démocrates donne un sérieux coup de frein à l'escalade anti-immigrés et anti-islam de ces dernières années. Des dizaines de lois ont été passées au cours de la décennie écoulée sur ces thèmes, sous l'impulsion du Parti du peuple. La dernière en date, emblématique, concerne la réintroduction en mai de contrôles permanents aux frontières intra-européennes du pays. Mais le Parti du peuple se trouve désormais marginalisé au sein du Parlement. "Ses voix ne sont pas essentielles aux sociaux-démocrates, analyse Jacob Christensen. Helle Thorning-Schmidt n'aura donc pas à leur faire de concessions sur ces sujets."
En revanche, la future première ministre aura fort à faire pour constituer une coalition solide et trouver un terrain d'entente entre des groupes politiques aussi hétéroclites que la Liste de l'unité (6,7 % des voix), située à l'extrême gauche, et le Parti radical (9,5 %), économiquement à droite. Selon le quotidien Berlingske, Helle Thorning-Schmidt "adore être sur la brèche et n'est pas intimidée par une forte pression médiatique". Jacob Christensen se montre lui aussi confiant : "Contrairement à la France, nous sommes habitués à avoir des gouvernements minoritaires. Nous avons une tradition de compromis plus forte."
C'EST BIEN UNE ANALYSE DU "MONDE", ÇA !

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