TOUT EST DIT

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lundi 4 avril 2011

Sortir du cycle de la violence


Les troupes d'Alassane Ouattara ont mis à peine quatre jours pour gagner Abidjan. L'information sur les tueries perpétrées dans leur sillage, à Duékoué, une semaine. La vérité est plus lente que les armes, mais les témoignages finissent toujours par arriver. Ce que tout le monde redoutait, ces dernières semaines, est en train de se produire. Le refus de Laurent Gbagbo de quitter le pouvoir et de se conformer au résultat des urnes, aux résolutions des Nations unies et aux pressions de la communauté internationale, est en train de rallumer le terrible incendie des violences intercommunautaires.

Avec un million de personnes déplacées, plus de 100 000 réfugiés au Libéria, une économie totalement déprimée et la peur qui habite à chaque coin de rue, la Côte d'Ivoire est dans un état de délitement particulièrement préoccupant. Ce processus ne date pas des derniers rebondissements électoraux. Il est, en grande partie, à mettre au compte du cycle de violences inauguré par la crise déclenchée en 2002, mais aussi de la dérive inégalitaire et de l'éclatement du sentiment d'appartenance nationale qui a caractérisé l'après-Houphoët-Boigny, mort en 1993.

À cet égard, la Convention de la société civile ivoirienne, qui regroupe de nombreuses associations et ONG, rappelle quelques éléments utiles. Depuis l'accession à l'indépendance, la superficie fertile a été divisée par cinq, pendant que la population était, elle, multipliée par cinq. Le nombre de pauvres, en une génération, a été multiplié par dix. Après l'Afrique du Sud, la Côte d'Ivoire est l'un des pays les plus inégalitaires du continent.

Si la fin du monopartisme, dans les années 1990, ne pouvait qu'être saluée comme une bonne nouvelle sur le chemin de la démocratie, il faut bien reconnaître que l'avènement du multipartisme a favorisé les prédateurs de l'économie.

La politique, en Côte d'Ivoire, dopée par la rente des revenus des matières premières et les soutiens étrangers sans le contrepoids d'une stabilité institutionnelle, génère de la violence. Pour accéder au pouvoir, et pour s'y maintenir. C'est ce qu'est en train de faire le sortant Laurent Gbagbo, assiégé avec ses fidèles dans Abidjan. C'est malheureusement ce que fait aussi Alassane Ouattara. Il devait être l'homme de la rupture de ce cycle, celui qui allait accéder à la présidence par la seule force des urnes. Ce formidable tournant a été raté. C'est par les armes qu'il est en train de réclamer son dû électoral. Avec maintenant, en sus, des soupçons de massacres perpétrés par ses fidèles.

Au coeur de ces violences, la France est dans une position délicate et contradictoire. Elle ne pouvait mettre Ouattara sur le trône sans être accusée d'ingérence et redevenir une cible, comme elle le fut en 2004. Elle ne peut à présent regarder, inerte, les violences perpétrées, alors que 12 000 Français et près de 1 500 soldats sont présents sur le sol ivoirien. Il faut désormais tout faire pour chasser Gbagbo. C'est ce à quoi, manifestement, Paris s'emploie tout en protégeant nos compatriotes. Mais il faut aussi conditionner toute aide à Ouattara au seul engagement qu'attendent, d'abord, les Ivoiriens : la sortie du cycle de la violence.

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