TOUT EST DIT

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jeudi 12 août 2010

Immigration clandestine : la France est devenue un pays de passage

Eric Besson a fixé à 200 le nombre de filières d'immigration clandestine à démanteler d'ici à la fin de l'année. Cette criminalité organisée est devenue de plus en plus rémunératrice pour les passeurs, qui n'hésitent pas à mettre la vie de leurs « clients » en danger pour passer les frontières.
Depuis quelques mois, la communication du ministère de l'Immigration a changé de ton. Hier, c'était le nombre de personnes expulsées qui faisaient la une des communiqués de presse. Aujourd'hui, c'est le nombre de filières clandestines démantelées. Pas moins de deux depuis le début du mois d'août, trois autres filières de grande ampleur interpellées au mois de juin. La volonté du ministre est clairement affichée : « Les filières d'immigration clandestine constituent désormais la deuxième activité criminelle dans le monde, derrière le trafic de drogue. Elles doivent être combattues sans répit […] Nous devons lutter sans relâche ni pitié contre cette forme d'esclavagisme moderne. »
Démanteler 200 filières

Depuis le début de l'année, les services de police ont démantelé 122 filières, soit une croissance de plus de 60 % par rapport à 2009 selon le ministère. Comme pour les expulsions, Eric Besson a fixé un objectif chiffré : 200 filières doivent avoir été démantelées d'ici fin 2010. Côté police, la lutte contre les filières d'immigration clandestines est une préoccupation déjà ancienne face à laquelle la France est plutôt bien armée par rapport à ses voisins européens. C'est l'Ocriest (Office central pour la répression de l'immigration irrégulière et de l'emploi d'étrangers sans titre), placé sous la tutelle de la police aux frontières, qui en est l'acteur majeur. Près de 600 personnes y travaillent.

L'office est composé de groupes opérationnels structurés par grandes régions (Chine, Asie du Sud-Est, Asie méridionale, Moyen-Orient, Afrique et Amérique du Sud), épaulés par une unité de renseignement et d'analyse stratégique en relation constante avec Europol et Interpol. Equipés de matériels de pointe pour la captation d'image et la géolocalisation via les téléphones portables notamment, les policiers de l'Ocriest passent au minimum six mois sur chacune de leurs enquêtes, où se mêlent le plus souvent des passages clandestins de frontières, de la fraude documentaire et du travail illégal. Pour Jean-Michel Fauvergue, patron de l'Ocriest, l'une des difficultés vient de la dilution des filières : « Il y a souvent plusieurs réseaux qui entrent en jeu pour un même client, avec une multitude d'acteurs : les rabatteurs, les passeurs, les logeurs, les employeurs. C'est une chaîne à plusieurs maillons. »
Autre difficulté, le fait que la France soit devenue un « pays de rebond » -de passage -, et plus seulement un pays de destination finale, les populations migrantes sont donc plus fluctuantes dans l'Hexagone : « Beaucoup de clandestins marocains ou algériens cherchent à gagner le Royaume-Uni, et il n'est plus rare de voir des Maliens qui veulent aller au Canada. Par ailleurs, les pays sources de migration deviennent à leur tour des pays de destination, comme l'Algérie ou la Libye par exemple. »
De plus en plus coûteux

Les routes de migrations fluctuent donc à grande vitesse et les tarifs, eux, n'en finissent pas de grimper : 15.000 euros pour être acheminé d'Irak en France, parfois jusqu'à 30.000 euros pour les pays plus lointains comme la Chine. Et tous les profits sont bons à prendre : certains passeurs facturent les nuits passées en centre de rétention pour les clandestins qu'ils récupèrent à leur sortie. D'autres, comme à Cherbourg, leur font payer les repas distribués par les associations d'aide aux migrants. Si le voyage est de plus en plus coûteux, il est aussi de plus en plus dangereux : les noyades sont fréquentes après embarcation en mer, et les trafiquants n'hésitent plus à faire passer leurs clients par des camions frigorifiques, des cuves contenant des produits toxiques. Sans compter les cas d'exploitation sexuelle et par le travail. « La dangerosité de ce type de criminalité s'est clairement accrue. Les passeurs mettent souvent la vie de leurs clients en danger et les règlements de comptes entre eux sont de plus en plus violents. En comparaison de la gravité des faits, les peines encourues sont trop basses », estime Jean-Michel Fauvergue. La peine maximale pour associations de malfaiteurs avec circonstances aggravantes est de dix ans de prison. La plupart du temps, les peines prononcées tournent autour de trois ans.
MARIE BELLAN

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