INFOGRAPHIE - Les économies d'énergie contribueront plus à la lutte contre le réchauffement que les énergies renouvelables ou le nucléaire. La facture globale pourrait toutefois atteindre les dix mille milliards de dollars.
L'équation est simple. Si la consommation mondiale d'énergie poursuit sa trajectoire actuelle, sans modifier ses sources, les émissions de CO2 qu'elle génère doubleront d'ici à 2050. Les chercheurs préconisent de réduire de moitié les rejets de CO2 à cette même échéance de 2050. Qu'il s'agisse de freiner le réchauffement climatique ou plus prosaïquement de sécuriser les approvisionnements énergétiques fondés sur des ressources fossiles limitées, une révolution est indispensable. L'énergie représente les deux tiers des rejets de gaz à effet de serre d'origine humaine.
«Si tous les protagonistes s'accordent sur la nécessité de l'action contre le changement climatique, la réticence des pays à s'engager s'explique par le coût supposé de cette action», résume Benoît Leguet, directeur de la mission climat de la Caisse des dépôts. La perception du coût par les responsables politiques a été en partie bouleversée par la publication, fin 2006, du rapport Stern.
Chargé par le gouvernement britannique d'évaluer le prix économique du changement climatique, Sir Nicholas Stern, ancien économiste en chef de la Banque mondiale, estime que l'inaction pourrait coûter 5 % de PNB mondial par an. Voire 20 % dans le scénario le plus pessimiste. Par opposition, une politique de réduction des rejets de gaz à effet de serre coûterait 1 % du PNB par an. Comme toute prévision, le rapport Stern est contestable et contesté, mais c'est l'étude économique la plus poussée sur le sujet.
Comment réduire les rejets de gaz à effet de serre à un coût raisonnable ? Les chefs d'État du G8 ont demandé à l'Agence internationale de l'énergie (AIE) d'apporter des réponses. L'AIE a présenté en octobre son scénario, baptisé «450». En référence à la limite de concentration de gaz à effet de serre dans l'atmosphère de 450 parties par million (ppm) que le Giec (Groupe d'experts intergouvernemental sur le climat) préconise de ne pas dépasser. Au-delà, les savants estiment que la hausse des températures mondiales pourrait dépasser les 2 °C et devenir incontrôlable.
Toute prospective a ses limites
Suivre le «scénario 450» de l'AIE, c'est atteindre un pic d'émissions annuelles anthropiques de 30,9 milliards de tonnes dès 2020. Cela suppose que les pays industrialisés respectent leurs engagements et que les grands pays émergents appliquent les politiques volontaristes annoncées avec plus ou moins de précision. En examinant, secteur par secteur, région par région, la panoplie des outils disponibles, l'AIE chiffre à 10 500 milliards de dollars l'investissement nécessaire pour limiter le réchauffement. Chaque année d'attentisme ajouterait à la facture 500 milliards.
L'AIE compare son scénario vertueux avec un scénario attentiste («business as usual», disent les économistes). Le scénario 450, baptisé dans notre infographie ci-dessous «scénario Copenhague», permettrait d'épargner à l'atmosphère 14 milliards de tonnes de CO2 en 2030 par rapport au scénario «statu quo». Soit plus que les rejets actuels cumulés de la Chine et des États-Unis. Toute prospective a ses limites, mais une certitude demeure : il n'y a pas de solution miracle qui s'appellerait éolien, solaire ou énergie de la mer. Il faudra agir sur tous les leviers à la fois.
La révolution des mœurs au bout du pot d'échappement
Et si un simple gadget électronique fixé à votre pot d'échappement, conçu en Inde, provoquait une révolution chez le conducteur que vous êtes ainsi qu'une baisse massive des émissions de gaz à effet de serre ? Experts et décideurs prévoient les effets des grands choix énergétiques. Mais des innovations, non prévues dans leurs scénarios, peuvent apporter leur petite pierre, voire bouleverser la donne.
GBS Bindra (les Indiens se désignent par les initiales de leurs prénoms), directeur du centre d'innovation de la société d'informatique Logica, à Bangalore, est convaincu que l'«EMO», conçu par ses équipes, est l'une de ces pépites révolutionnaires. Il s'agit d'un capteur de CO2 qui s'ajuste au pot d'échappement. L'appareil est connecté à un calculateur qui mesure les rejets en temps réel. C'est à l'étape suivante que le concept innove vraiment : lorsque vous arrivez à la pompe à essence, celle-ci, dûment équipée, enregistre automatiquement par transmission radio vos performances.
Une des innovations de l'année
Vous avez conduit vertueusement, sans trop appuyer sur le champignon ni pousser les rapports ? La pompe vous calcule une ristourne sur le litre d'essence. Avec la même voiture, vous avez la conduite polluante ? La pompe vous facture le litre plus cher. «Nous sommes en pourparlers avec des compagnies pétrolières et des autorités en Europe et aux États-Unis», assure GBS Bindra, par téléphone depuis Bangalore. «Des pays scandinaves semblent intéressés.» «Le conducteur, en voyant que son voisin paie son essence moins cher, changera de comportement», prédit l'ingénieur, convaincu qu'un prix variable peut agir sur le comportement, bien mieux qu'une taxe fixe. Selon ses calculs, les émissions de CO2 liées aux voitures pourraient baisser de 12 à 16 % si l'EMO était généralisé. Les transports représentent 13 % du carbone rejeté par l'homme. L'invention a été distinguée par The Economist comme l'une des innovations de l'année.
L'Agence internationale de l'énergie n'attend pas un décollage du marché des voitures électriques avant 2015. Moteurs électriques et hybrides représenteraient la moitié du marché à partir de 2050 seulement. Le moteur à combustion a encore de beaux jours devant lui. Il n'est donc pas vain de continuer à plancher pour en réduire les émissions, comme le font les constructeurs et l'ingénieur Bindra.
lundi 7 décembre 2009
Réchauffement : quel scénario pour 2030 ?
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