TOUT EST DIT

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jeudi 12 novembre 2009

La commission Juppé-Rocard propose un emprunt de l'ordre de 35 milliards

Près de 250 auditions, tenues avenue Marigny, dans le 8e arrondissement de Paris, juste en face de l'Elysée. La commission Juppé/Rocard chargée de travailler sur l'emprunt et ses finalités n'a pas fait dans la demi-mesure. Mercredi 11 novembre, au cours d'une ultime réunion elle a arrêté un chiffre qui ne devrait pas être éloigné des 35 milliards d'euros évoqués par Alain Juppé devant des militants UMP. La version finale du rapport reste néanmoins en cours de rédaction.
Le montant se situe dans la fourchette fixée la semaine dernière par le président de la République – entre 25 milliards et 50 milliards d'euros. Il résume les lourdes contraintes qui ont pesé sur l'exercice : certes, la France a besoin d'investir massivement pour combler son retard dans l'enseignement supérieur, ne pas en prendre dans les secteurs d'avenir (énergies renouvelables, avion du futuretc) et consolider son tissu de PME. Mais elle ne peut se permettre de trop emprunter en raisonde son lourd passif : à force de financer ses dépenses courantes par du déficit, elle a déjà accumulé une dette qui représente 84 % du produit intérieur brut et devrait monter à 93 % en 2013.

"100 milliards de dépenses d'avenir, ce n'est pas assez mais 100 milliards d'emprunts c'est trop" résume un membre de la commission, alors que le débat fait rage à droite : "Si le montant de l'emprunt n'est pas très important, nous prendrons du retard sur la croissance à venir" ne cesse de répéter Henri Guaino, le conseiller spécial du président, sur fond de divisions des élus UMP: une partie des députés s'inquiète de l'endettement, une autre estime qu'à moins de 50 milliards d'euros, l'emprunt ratera sa cible.

LA THÈSE ROCARD L'A EMPORTÉ

Autant les débats ont été animés à l'extérieur de la commission, autant le climat a été serein à l'intérieur. "Ça s'est bien passé" confirment plusieurs sources. Ce n'était pas gagné d'avance. En choisissant de nommer deux anciens premiers ministres pour coprésider la commission qu'il a installée le 26 août, Nicolas Sarkozy s'exposait à une guerre des égos. D'autant que Michel Rocard et Alain Juppé se connaissaient mal. Ils se sont apprivoisés et respectés.

"Juppé est bien élevé, intelligent. A la différence des monétaristes, il a le sens de l'Etat", confiait Michel Rocard au Monde le 28 septembre. "On s'entend bien, mais c'est surprenant, Rocard est parfois plus libéral que moi !", rétorque Alain Juppé. L'homme de droite était partisan de financer par l'emprunt les dépenses d'infrastructures. L'homme de gauche y était opposé.

C'est la thèse Rocard qui l'a emporté : la commission ne retient pas les infrastructures dans les priorités, préférant cibler fortement l'enseignement supérieur qui devrait bénéficier d'une dizaine de milliards d'euros, par le biais de fondations.

C'est peut être l'un des effets de l'audition de l'économiste Daniel Cohen : à l'entendre, il aurait fallu mettre tout le produit de l'emprunt sur les universités tant le retard français est énorme : "Nous formons moins de 30 % d'une classe d'âge dans l'enseignement supérieur contre 50 % aux Etats Unis et 80 % au Japon" confirme un membre de la commission.

Certaines des auditions étaient "visionnaires" comme celle d'Henri Verdier, président du pôle de compétitivité Cap Digital (création numérique) qui a visiblement séduit l'auditoire. D'autres ressemblaient davantage à un défilé de lobbyistes flairant le financement prometteur.

Mais s'il ne fallait retenir qu'une idée des travaux de la commission, c'est celle-là : pas question au XXIe siècle de renouveler les erreurs du plan calcul. Si la puissance publique est là pour dégager les priorités et apporter des financements, la réalisation doit se faire au plus près du terrain et par un étroit maillage entre argent public et privé.

La commission préconise de passer systématiquement par des appels à projet. Elle recommande de ne pas multiplier les nouvelles structures de financement ou d'accueil des fonds. Elle veut aussi que l'emprunt soit fléché afin de vérifier que les sommes vont bien aux investissements. Bercy sera sous surveillance.

Le rapport de la commission devrait être remis jeudi 19 novembre à Nicolas Sarkozy. Ce n'est que début décembre que le président de la République en arrêtera le montant et les modalités (appel ou non au public). L'une de ses idées est d'y affecter les 13 milliards d'euros que l'Etat avait prêtés aux banques et qu'il a récupérés.
Françoise Fressoz et Claire Guélaud

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