Un couple, évidemment, ça ne s’oublie pas comme ça, on a été ensemble pour son meilleur, et ça reste quand le pire se profile. Ainsi Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy.
Le plus bel instant de la dame fut le moment du triomphe de l’homme: ce printemps 2007 de l’enivrante campagne. Lui promettait à la France de vivifiantes ruptures, elle enchantait la gauche, qui se grisait d’avenir. Rationnellement, le parallèle s’arrêterait au résultat, comme au football où seule la victoire compte?
Mais ce qui fut se prolonge et les rattrape. Sarkozy préside mais voit ses constructions s’effilocher; on annonce le retour de l’extrême droite, qu’il avait réduite et dépouillée; les vieilles France s’agitent, le renouveau est en panne, les sondages glissent tels les déficits, le chef est seul à la tête d’une droite qui souvent ne l’aime guère. Il bouge et consolide, construit et accélère, mais sans jamais retrouver l’élan d’avant. Royal, c’est pareil et c’est pire, puisqu’elle n’a pas d’Etat, même pas un parti. Elle subit une solitude qu’on lui impose et qu’elle a fabriquée, et elle aussi a perdu ses équations d’antan, et ne peut compter sur personne qu’elle-même, et encore: tant elle s’ingénie à défaire par ses provocations ce que son génie lui inspire.
Et pourtant. Royal a tous les défauts qu’on lui prête et quelques autres encore, mais qui d’autre, à gauche fait ainsi le métier? Vendredi, Sarkozy chargeait les socialistes dépensiers et fiscalistes, ressuscitait le doux Jacques Faizant, qui peuplait jadis ses cartoons figaresques de vieux messieurs de droite allergiques à l’impôt. Ainsi chantera l’UMP, pour éloigner la gauche des Français aux régionales? Tout le monde l’a vue, la manœuvre du stratège. Mais elle seule s’est levée pour la contrer.
Ségolène seulement est allée au devant de Sarkozy, avec suffisamment de force, d’impavidité, de culot aussi, pour s’installer devant l’adversaire. C’est cette interview au JDD, où elle tance celui qu’elle se refuse à qualifier de "Président". Elle affiche pour Nicolas Sarkozy cette détestation glacée et méprisante que Mitterrand, jadis, pouvait réserver à Rocard (chez lui) ou Chirac (en face)… Cela conserve, cela vous pose, cela vous mettra, un jour, à nouveau, en situation, contre lui? Tu attaques la gauche en ses régions, je t’attaque et j’attaque l’Etat. Nous sommes ensemble, l’un contre l’autre… Pendant ce temps, Bayrou et Cohn-Bendit se faisaient des mignardises, Delanoë soupesait son moment (ce sera aujourd’hui, sur Europe 1), et où donc était Martine Aubry? Dans le Nord, réglant une querelle de clochers roses autour de son grand stade… Seule Royal, sans décence ni prudence, saisissait le moment.
Qu’ils se ressemblent, elle et lui, jumeaux du bougisme devenu leur permanence, presque rassurante, tant leurs trucs sont connus. Se choisissant aussi? Les imagine-t-on pour toujours ensemble, jusqu’à l’ultime duel d’un couple fourbu, épuisé, usé d’avoir tant été vu, mais indissociable…
dimanche 22 novembre 2009
Elle et lui
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