TOUT EST DIT

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mardi 15 octobre 2013

Brignoles, Marseille ... la montée du ras-le-bol de l'élite parisienne


Le résultat de la cantonale de Brignoles (Var) et celui du premier tour des primaires socialistes à Marseille expriment, chacun dans leur genre, un ras-le-bol des "élites". Il indiquent aussi que le phénomène de rejet des politiques menées successivement s'enracine de plus en plus, faute de résultats jugés probants dans la vie quotidienne.
C'est un sacré aveu. Du fond de l'Afrique du Sud où il est actuellement en déplacement, le président de la République a reconnu, à propos de la victoire du Front National à la cantonale de Brignoles (Var),  "qu'obtenir des résultats" sur le terrain de "l'emploi, la croissance, la sécurité" était "une obligation" pour contrer la progression du Front national.
Son ministre du Travail, Michel Sapin, a enfoncé le clou sur RTL en estimant que cet avertissement visait le gouvernement "comptable de la situation d'aujourd'hui". "Il nous faut absolument (...) entrer dans le temps des résultats", a-t-il ajouté, soulignant que "des résultats, pour les gens, c'est simple, ce n'est pas un pourcentage, ce n'est pas un pourcentage de déficit, (...) ce n'est même pas une balance commerciale, (...) c'est le chômage".
La défiance face aux élites
Car, certes, il y a eu Brignoles, mais ce serait oublier la primaire socialiste de Marseille, tout aussi révélatrice. Voilà, une ministre du gouvernement, Marie-Arlette Carlotti, secrétaire d'Etat aux Personnes handicapées et à l'Exclusion, qui mord la poussière dès le premier tour de cette élection interne en ne se plaçant que troisième derrière Patrick Menucci et, surtout, Samia Ghali.
Pourtant, la ministre était la "tombeuse" de l'UMP Renaud Muselier, éternel dauphin du maire Jean-Claude Gaudin, lors des législatives de 2012. Elle fait partie de la vieille famille socialiste marseillaise (son père était un proche collaborateur de Gaston Defferre). Mais c'est sans doute justement cela qui l'a perdu. Marie-Arlette Carlotti, apparaissait trop comme la candidate de l'élite", celle encouragée par Paris, face à une autre prétendante locale, la sénatrice Samia Ghali, fière représentante des difficiles quartiers Nord de la ville phocéenne.
Ces deux élections, Brignoles et Marseille, si différentes dans leur nature, ont donc un point commun: elles expriment un rejet et un ras-le-bol. Un phénomène qui vient de loin.
Un non au "diktat" de l'Europe
Après 40 ans de chômage de masse, il y a un rejet du politique. Une impression que "rien ne marche" et que tous les gouvernements de droite comme de gauche ont échoué. Un sentiment, pour beaucoup, d'être les laissés pour compte de la mondialisation, cette sorte de Léviathan qui dévore tout. Un malaise nourrit par la  construction européenne, perçue comme une formidable machine à faciliter  la circulation des capitaux et à détruire les emplois.
C'est l'Europe et les élites parisiennes - personnifiées non seulement par l'ensemble du personnel politique mais aussi par les économistes et autres intellectuels de renom - qui sont dès lors responsables de ces plans d'austérité qui frappent les plus faibles, tout en épargnant les plus riches, au nom du nécessaire rétablissement des comptes publics.
Or, le problème est que les 50% de français qui gagnent moins de 1.675 euros ( le salaire mensuel brut médian) n'ont pas vraiment l'impression d'être les responsables de ces déficits publics. Eux qui peinent à boucler les fin de mois. D'où leur dénonciation du fameux "mille feuille" administratif français et de la "gabegie" qu'il entraîne.
Un hiatus entre l'équipe au pouvoir et les Français
Et c'est sans doute là que que le hiatus intervient avec l'équipe en place dirigée par François Hollande. Ce dernier a été élu par un rejet de Nicolas Sarkozy, considéré comme un homme qui parlait fort mais, finalement, agissait peu. Bien qu'il ait peu promis durant sa campagne, François Hollande apparaissait comme l'homme qui allait permettre un changement juste.
Il avait certifié pouvoir obtenir d'Angela Merkel un pacte de croissance européen, pendant du pacte budgétaire. Il prônait également une révolution fiscale, passant, notamment par une fusion entre l'impôt sur le revenu et la CSG. Or, sur le premier point, il a obtenu bien peu... Et le second devra attendre des jours meilleurs.
François Hollande où l'absence d'affirmation d'un cap
Et puis, les faits étant têtus, François Hollande s'est retrouvé, comme son prédécesseur, a devoir gérer le rétablissements des comptes publics. Certes, la chose a été aggravée par le fait qu'en un seul quinquennat, Nicolas Sarkozy ait creusé le "trou" de 600 milliards d'euros supplémentaires. Certes, François Hollande a obtenu un sursis de deux ans (fin 2015) pour ramener le déficit de la France dans la limite des 3% du PIB.
Mais ces faits sont totalement ignorés. Tout comme passent totalement inaperçus les différents frémissements enregistrés sur la situation économique, tant (trop?) mis en avant par l'ensemble des ministres. Pourtant, il est vrai que la croissance repart doucement (0,4% attendu au dernier trimestre), que le moral des chefs d'entreprise se redresse doucement aussi, que le chômage des jeunes - grâce aux contrats aidés - se stabilise, que le commerce extérieur reprend des couleurs...
Des résultats qui apparaissent abstraits
Mais Michel Sapin a raison. Que pèsent ces "pourcentages" dans des villes et régions sinistrées par la désindustrialisation et où le taux de chômage dépasse de deux, voire trois fois, la moyenne nationale (10,6%)?  Et, quand, de surcroit, le gouvernement décide plus de 30 milliards d'impôts supplémentaires en deux ans, pesant essentiellement sur les ménages, l'indice du commerce extérieur ou celui du moral des entreprises apparaissent alors comme totalement abstraits...
Tout comme semblent lointains les pourtant intéressants 34 projets industriels défendus par Arnaud Montebourg, le ministre du Redressement productif. Dans ce contexte déprimé et déprimant qui croit encore au fameux théorème de Helmut Schmidt selon lequel "les profits d'aujourd'hui font les investissements de demain et les emplois d'après demain"?

Bien sûr que François Hollande ne peut faire autrement qu'afficher un certain optimiste et faire preuve de volontarisme. En économie, la confiance est mère de tout et les prophéties auto-réalisatrices existent. Mais alors, il faut donner l'impression d'avoir un cap et de s'y tenir. Et là, l'équipe gouvernementale a de gros progrès à faire. Quand le ministre de l' Économie évoque un nouvel impôt sur l'excédent brut d'exploitation (EBE) des entreprises, pour finalement renoncer à ce projet dans la foulée car le patronat a élevé la voix, ça fait désordre. Et ça donne aussi l'impression que le Medef fixe, maintenant, sa loi à Bercy. 
Idem quand  Manuel Valls, le ministre de l 'Intérieur,  change d'avis comme il change de chemise dans le conflit opposant les taxis aux véhicules de tourisme avec chauffeur (VTC). Même chose encore avec les voltes faces sur les taxes poids-lourds ou diésel. Sans parler dela réforme des retraites ou de nombreux salariés du privé ont l'impression que les "nantis" de la fonction publique et des régimes spéciaux sont épargné par les efforts demandés... Ce qui est inexact mais l'apparence est là.
Sans résultats économiques probants, le PS laminé aux élections de 2014
Bref, un sentiment que le gouvernement mène une politique économique de gribouille, au doigt mouillé. Qu'il est incapable de réduire les inégalités. Qu'il ne "tape" pas là où il faudrait. Qu'il est condamné à éteindre les feux dans l'urgence, comme l'atteste la polémique sur le travail dominical. François Hollande se doit d'intervenir et de fixer avec davantage de solennité ce fameux cap. Il est obligé de parler justice, comme l'y invite de plus en plus de composantes du PS.
Sinon, à ce train là, sans des résultats économiques probants et rapides, et vue l'état de déliquescence de l'opinion, les élections municipales et européennes de 2014 s'annoncent très difficiles pour la majorité en place. Au ministère de l'Intérieur, on estime que la gauche pourrait perdre plus de 200 villes de plus de 10.000 habitants et que le parti de Marine Le Pen pourrait arriver... en tête aux élections européennes de mai.
Brignoles et Marseille où les deux faces d'un même "ras-le-bol".

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