TOUT EST DIT

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jeudi 22 novembre 2012

Gueule de bois

Gueule de bois


Dimanche, la droite avait le moral. Elle était descendue la veille dans la rue, et massivement, contre le projet de société emblématique de la gauche, le mariage gay. Elle s’y trouvait sans organisations, sans autocars, sans encadrement, sur un simple appel et pour le seul bonheur de montrer aux socialistes et à la CGT qu’elle aussi pouvait occuper les boulevards et les avenues, et non pas pour défendre des intérêts, aussi estimables soient-ils, mais une vision de la société, une manière de vivre ensemble, d’élever ses enfants, de préserver un patrimoine, de valoriser un héritage. Des manifestants décidés et joyeux, venus défiler en famille, toutes générations confondues, avec une idée en tête : faire nombre à l’intention de la planète politico-médiatique tout acquise à la gauche et qui prétend que le pouvoir et la rue lui sont réservés parce qu’elle a aussi l’exclusivité de la raison.
Le soir, la démonstration était faite. Cette droite, quasiment anonyme, avait atteint son but : même à travers les chiffres officiels, on reconnaissait qu’elle avait rassemblé plus de cent mille personnes – ce qui pouvait vouloir dire cent cinquante mille ou plus encore. Quand la ministre des Affaires sociales, Marisol Touraine, prétend maintenant que cette mobilisation était toute relative, que voilà une belle incitation à faire encore mieux lors du prochain rendez-vous (le dimanche 13 janvier) : ah bon ! la mobilisation n’était pas si forte malgré les trains, les bus et les métros bondés, les kilomètres parcourus ? Eh bien, Mme Marisol Touraine verra ce que ce sera dans deux mois puisqu’elle n’a pas bien observé…
Le dimanche, lendemain de ces défilés réussis, la droite avait un autre rendez-vous. Mais cette fois, elle avait sa carte d’adhérent en poche et ses porte-drapeaux : c’était la droite UMP qui allait en chantant élire son président, en piétinant durant des heures devant des bureaux de vote trop rares. Elle était aussi mobilisée que celle de la veille et quasiment pour les mêmes raisons : démentir les commentaires, les sondages, les médias qui prétendaient que cette campagne pour la présidence du parti avait été trop longue et ennuyeuse ; montrer au contraire qu’elle n’avait pas émoussé la passion des militants, que les salles de réunion où Copé et Fillon venaient se présenter avaient été combles partout, que c’était le moment ou jamais de se montrer en force.
Les partisans de Copé et ceux de Fillon voulaient d’une certaine façon la même chose : une droite unie, engagée, déterminée à ne rien céder à la gauche. La plupart d’entre eux auraient bien préféré élire en même temps un chef de parti, décidé à frapper d’estoc et de taille, et un leader plus classique et plus populaire avec l’expérience de la conduite d’un gouvernement. Mais comme ils n’avaient qu’un seul bulletin de vote, les électeurs militants se sont débrouillés de telle manière qu’ils ont voté à 50-50. Ils n’avaient pas voulu humilier l’un par rapport à l’autre, ils voulaient seulement les obliger à travailler ensemble. Mais là, catastrophe. La fracture. Et cette droite si fière d’être rassemblée devant un pouvoir de gauche divisé et affaibli dans l’opinion se réveillait soudain avec la gueule de bois.
Depuis la courte défaite de Nicolas Sarkozy à la présidentielle, suivie par celle, logique et acceptée (par refus d’une cohabitation), des législatives, la droite ne s’est pas accordé un instant de répit ; elle est passée d’une campagne à une autre, persuadée qu’elle allait pouvoir décider de la suite des événements et faire vaciller la gauche sur son socle parlementaire. Le matraquage fiscal lui a permis d’occuper le terrain, mais ce qui l’a fait sortir d’elle-même, c’est la prétention de la gauche à changer de société et même de nation, avec le droit de vote des étrangers et la préférence immigrée, la décomposition du mariage et de la famille, le détournement de la morale à l’école, la repentance à répétition, etc. Qu’attend-elle maintenant ? Qu’après le pitoyable épisode de l’élection à sa présidence, l’équipe dirigeante de l’UMP se montre digne d’elle et de sa mobilisation.
La reconstruction va prendre du temps. Mais il y a de la matière. François Hollande a reculé sur le droit de vote des étrangers ; reculera-t-il aussi sur les modalités du mariage ? Un premier test de l’état de santé de la droite va se lire lors des prochaines élections législatives partielles, à la suite de l’annulation de ces scrutins. Puis on entrera dans l’année 2013 – sans échéance électorale. Une année qui peut être gagnée si elle est tout entière consacrée à s’entraîner pour la suite, comme le sportif se prépare à l’épreuve.

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