TOUT EST DIT

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dimanche 7 octobre 2012

Pour les «pigeons», le combat continue

Son coup de gueule contre le projet de loi de finance avait été à l'origine du mouvement des « pigeons ». Jean-David Chamboredon, cofondateur du fonds d'entrepreneurs Internet ISAI, juge insuffisantes les concessions du gouvernement.

LE FIGARO. - Êtes-vous satisfait d'avoir fait reculer le gouvernement?
Jean-David CHAMBOREDON. - Le gouvernement n'a pas reculé. Vendredi 28 septembre, il a présenté une réforme fiscale d'une brutalité inouïe et il vient de s'engager à en rectifier une toute petite partie. Pour reprendre l'image des pigeons, c'est comme s'il avait dit «je vais vous plumer entièrement» et après qu'il concédait, «non, tout sauf la tête». En l'état actuel du projet, l'écosystème des PME de croissance est toujours menacé.
Jean-David Chamboredon
Pourquoi?
Les entreprises de croissance ont besoin de leurs quatre piliers. Les créateurs et leurs salariés qui doivent être associés au capital, les business-angels qui mettent leur argent personnel puis les fonds de capital-risque qui accompagnent la croissance. Le gouvernement fait un geste bienvenu en faveur des «créateurs d'entreprise». Il reconnaît la prise de risque. J'ai peur, cependant, que cette fiscalité pour les «créateurs» ne devienne une usine à gaz car ce concept de «créateur» n'est pas défini fiscalement. En outre, le problème reste leur financement. Si nous voulons vraiment avoir une politique économique, il faut créer les conditions pour que les entreprises de croissance reçoivent du capital. Ce n'est pas le cas. Or, pour les entreprises de croissance, le capital c'est comme l'eau. S'il n'y en a pas, on meurt.
Et là, l'eau ne coulera plus?
Il ne faut pas être très fort en calcul pour comprendre que le jeu n'en vaut plus la chandelle pour les business-angels, qui ont une chance sur deux de perdre de l'argent et vont désormais subir un prélèvement marginal de 60 % en cas de succès. Le gouvernement a proposé d'accélérer le planning d'abattement en fonction de la durée de détention des parts: 12 ans c'est deux siècles Internet! Ils devraient être moins taxés que ceux qui perçoivent des dividendes… Enfin, les gens qui gèrent des fonds (comme moi) sont susceptibles dans le projet actuel d'être taxés entre 80 % et 95 % alors que nous investissons notre propre argent dans un secteur très risqué… ­Bercy a tout de même reconnu que ce niveau était exagéré…
Que vont faire les «pigeons»?
Les «pigeons» vont sans doute continuer, au moins jusqu'au vote final du Parlement. Ils veulent rester un relais entre l'opinion et le gouvernement. Pour moi, le grand bénéfice de cette mobilisation a été de faire évoluer positivement l'image de l'entreprise, et notamment des start-up, aux yeux de la population. Les gens se sont rendu compte que les entrepreneurs étaient des gens qui bossaient beaucoup et que certains étaient très jeunes…
On a accusé les «pigeons» d'être manipulés par la droite…
Nous sommes un mouvement d'entrepreneurs! Quand il est né, vendredi 28 septembre, j'ai vérifié que les membres initiaux étaient bien des entrepreneurs du Web avant de leur apporter mon soutien. Je ne me suis pas posé la question de savoir s'ils étaient de gauche ou de droite. Très vite, le mouvement a été rejoint par un millier de personnes, des gens qui nous étaient proches, des amis de nos amis qui se connectent le samedi sur Facebook. Ensuite, seulement, nous avons reçu des sollicitations venant de milieux plus politisés, nous proposant par exemple d'organiser la manifestation. Nous les avons tous écartés. Des mauvaises langues ont pu voir un lien avec l'UMP parce que Pierre Kosciusko-Morizet, un de mes associés, est le frère de Nathalie, l'ex-ministre. Mais je ne l'ai même jamais rencontrée!
Pierre Moscovici a dit qu'il voulait protéger les entrepreneurs. Le croyez-vous?
Nous ne voulons pas être protégés! Cela fait 13 ans que je suis investisseur dans l'Internet en France. Nous avons connu l'éclatement de la bulle en 2001. Après cela, nous avons été traités comme des lépreux. Notre industrie, nous l'avons bâtie tout seuls et nous en sommes fiers. Les start-up créent chaque année des dizaines de milliers d'emplois dans notre pays, de toutes les origines sociales. C'est le dernier ascenseur social qui fonctionne en France. Cela explique ma tribune assez «lyrique» le 28 septembre. Je vais continuer à me battre pour cela!

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