jeudi 6 septembre 2012
L’insulte suprême
Luc Châtel vient d’accuser Vincent Peillon de pétainisme à propos de
la formule de « redressement moral ». Au premier degré, on peut y voir
un juste retour de bâton envers des socialistes qui n’ont cessé de
proférer la même injure envers l’ancien de gouvernement et ses hommes.
Mais au second, ce renvoi d’ascenseur exhale une odeur malsaine.
L’invocation permanente des « heures sombres » dans le débat
contemporain ne grandit pas la politique. Faudrait-il s’interdire toute
parole rappelant la logorrhée de Vichy ? Mais on entrerait alors dans
une logique de censure sans fin ! Certes les mots « redressement » et «
morale » devraient être interdits, mais aussi ceux de « jeunesse », «
d’école », « d’Etat », « d’ouvrier » de « paysan », de “nation”, qui
ressortent dans tous les discours de cette période, voire même celui
“d’Europe” (Laval 22 juin 1942) ! Dans un pays anéanti par la débâcle
militaire, l’essentiel de la classe politique, de l’extrême droite à
l’extrême gauche (communiste), comme la plupart des Français, a
accueilli l’armistice avec un « lâche soulagement ». Il s’est trouvé une
infime poignée de héros, venus de tous les horizons idéologiques, y
compris de la droite traditionnelle, pour vouloir continuer la guerre.
C’est un historien insoupçonnable de sympathie envers ce camp, Eugen
Weber, dans son livre l’Action française qui l’écrit lui-même : « Dans
tous les mouvements de Résistance, l’Action française (royaliste) s’est
trouvée représentée, tant en France qu’au-delà des mers : Colette, qui
avait tiré sur Laval, en était un ancien membre ; de même Henri d’Astier
de la Vigerie, inspirateur de la résistance en Afrique du nord ; et
Fernand Bonnier de la Chapelle, dont le père était un militant à
Constantine et qui lui, réussit son attentat contre Darlan ; et Guillain
de Benouville, et Jacques Renouvin qui mourut dans un camp de
concentration ; et Honoré d’Estienne d’Orves, l’un des premiers fusillés
de la Gestapo, et tant d’autres qui furent parmi les premiers membres
de la Résistance. » Si des événements comparables venaient à se
reproduire, un cataclysme de cette ampleur (120 000 morts, un million
de prisonniers, 10 millions de réfugiés sur les routes), il ne fait
guère de doute que les mêmes comportements se reproduiraient à
l’identique en particulier le ralliement d’une vaste majorité de la
classe politique, de l’extrême droite à l’extrême gauche, à la solution
de la paix. Se trouverait-il encore aujourd’hui une poignée de héros
prêts à tout sacrifier à la France en continuant la guerre, leur maison,
leur famille, leur vie ? C’est la seule vraie question…! En tout cas,
franchement, il serait bon que les politiciens cessent de faire joujou
avec cette époque et de s’en servir comme d’un instrument d’insulte.
C’est ridicule. Nul, surtout pas eux-mêmes, ne sait quel eût été leur
comportement et leur engagement en de telles circonstances, même si l’on
s’en doute parfois un peu…
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