TOUT EST DIT

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mardi 10 juillet 2012

"Oui, il fallait publier les enregistrements Merah, qui montrent l'aveuglement de la France sur les dérives islamiques"

La diffusion sur TF1 des enregistrements téléphoniques entre le RAID et Mohamed Merah, dimanche soir dans Sept à Huit, a provoqué une avalanche de réactions hostiles de la part des familles, mais aussi de la presse. Pourtant, si elle provoque ce tollé, elle est d'autant plus nécessaire qu'elle nous en apprend plus sur le tueur, et nous alarme sur la société actuelle...

Dimanche soir, TF1 a retransmis dans l’émission Sept à Huit des extraits d’enregistrements téléphoniques entre la police et Mohamed Merah. Est-ce que cette diffusion est normale, opportune, voire nécessaire ?

Ivan Rioufol : Elle ne me choque pas. Je trouve que pouvoir entendre ce témoignage de Merah est plutôt judicieux,  et même très intéressant. D’autant qu’il faut rappeler qu’il a été tué donc qu’on ne l’entendra jamais plus. On aurait pu avoir ses explications lors d’un procès. En l’occurrence il les a données en testament.

C’est cela qu’il nous est donné d’écouter aujourd’hui. Je ne comprends pas très bien l’émoi que suscite cette diffusion. Autant j’aurais bien compris ce qu'il aurait eu d’insupportable à diffuser les vidéos des assassinats qu’il avait filmés, mais la situation actuelle est foncièrement différente. La réaction de la presse est démesurée. Je récuse ce journalisme lisse et anesthésiant.

 

Robert Ménard : Normale oui. En revanche je trouve problématique tout d’abord le peu d’égards qu’on a manifesté vis-à-vis des familles. S’il est exact qu’on ne les a même pas prévenues, c’est de la goujaterie. D’autre part je suis exaspéré par ceux qui habillent ça sous couvert d’un devoir d’information et de la liberté de la presse. Il en va surtout d’un scoop que n’importe quel média aurait diffusé. Je suis agacé de l’emploi de grands mots alors qu’en réalité ce n’est qu’un coup journalistique. Par ailleurs ceux qui prennent leurs distances avec TF1 sur cette histoire auraient fait exactement la même chose s’ils avaient été en possession de tels documents. Enfin, ces mêmes journalistes se gaussaient d’éthique criaient au scandale déontologique quand Al-Jazheera publiait des communiqués de Ben Laden. 
Il n’y a pas de problème de déontologie : la presse se fout de la déontologie. Nous avons affaire à un simple coup journalistique qui tombe à pic pour TF1, mais qu’on ne se gargarise surtout pas de grands mots en invoquant la liberté de la presse et le droit à l’information : c’est du baratin. La liberté de la presse est autrement menacée en Chine, à Cuba ou en Arabie Saoudite qu’en France.
Néanmoins quand Emmanuel Chain défend cette diffusion, il a absolument raison, mais qu’on arrête de jouer les Tartuffe…

Concrètement, en quoi cette diffusion est-elle utile ?

Ivan Rioufol : Tout d’abord, elle contredit la propagande lancée par l’avocat du père de Mohamed Merah et éteint la théorie du complot. En effet, celui-ci laissait entendre qu’il y avait des enregistrements dans lesquels il apparaissait que Merah avait été manipulé.
La diffusion est utile car elle montre bien que Merah a agi seul et a été autonome dans son désir de tuer. En outre, elle donne à voir ce que peut produire notre société, qui se gausse d’humanisme et de gentillesse, comme monstruosité et comme monstres. Il est utile que ces derniers soient désignés et regardés comme tel.
On a tendance, hélas, dans la presse, à mettre sous le tapis ou jeter un voile pudique sur toutes les choses qui dérangent notre confort intellectuel. Il est vrai que Merah dérange ce confort, mais il dit des choses non pas seulement sur lui-même et sur sa folie mais aussi sur l’inconséquence, l’aveuglement et la faiblesse de notre société. En effet, elle a laissé grandir ces monstres qui parlent avec l’accent toulousain, qui se disent Français et qui se disent que, parce qu’ils sont français c’est plus facile d’attaquer la France. D’autant plus qu’il reprend toutes les attitudes du bon islamiste qui privilégie la mort à la vie etc.

Robert Ménard : Il faudrait le demander à ceux qui ont donné ces enregistrements à TF1. On voit bien que dans ce genre d’opérations on ne sert aucune liberté fondamentale, mais plutôt les intérêts personnels des détenteurs de l’information. Au demeurant je comprends ce mécanisme, et je n’irai pas pester contre cette publication, mais ça me fait la même impression que lorsqu’un PV d’audition sort dans la presse alors que l’audition a eu lieu le matin même. Il y a un vrai problème quant au secret de l’instruction. En outre ce n’est plus du journalisme d’investigation, mais de délation.
Toutefois, l’intérêt réel est que ces documents montrent le cynisme, le caractère abject, la duplicité assumée du personnage. Nous devrions donc nous inquiéter sur une partie des musulmans de France qui peuvent se retrouver dans de tels criminels, ce qui donne un coup à un certain nombre de bisounours qui pensent que l’immigration et l’Islam ne posent jamais aucun problème. J’ai lu des extraits de ces discussions, qui laissent songeur… Je ne peux m’empêcher de rire quand certains de mes confrères semblent découvrir aujourd’hui la violence d’une partie de la communauté musulmane. On doit alors légitimement se poser la question de l’aveuglement avec lequel certains ont traité ce Mohamed Merah. 

Toutefois, cette diffusion demeure une violation du secret d’instruction. Cela ne vous choque pas ?

Ivan Rioufol : Le secret d’instruction est violé allègrement tous les jours. On trouve cela totalement normal quand il est violé pour mettre en cause Nicolas Sarkozy dans l’affaire Bettencourt, par exemple, et ce serait choquant quand il met en cause un monstre dont on n’aurait pas à connaître les turpitudes.

Robert Ménard : Je trouve que c’est problématique par rapport à la loi, d’autant plus si c’est préjudiciable au justiciable. Malheureusement on me dit souvent que ce secret ne s’applique pas aux journalistes. Trop souvent, le journaliste qui publie ce genre de documents est instrumentalisé par telle ou telle partie. Il existe une sorte de connivence, pour ne pas l’appeler autrement, entre juges d’instruction, avocats et journalistes, pour tourner à la petite tambouille qui se fait sur le dos des gens. 


Que pensez-vous de l’argument des familles qui sont profondément choquées par cette diffusion ?

Ivan Rioufol : Je comprends l’émoi suscité par les familles des victimes, c’est certainement très douloureux d’entendre la voix de cet assassin qui ne montre aucun remord, aucun regret et qui agit comme un monstre froid.
Toutefois, je ne vois pas très bien ce qui peut choquer dans les propos diffusés. Au contraire, il me semble que cela peut les aider à faire comprendre à l’opinion publique quel était ce bourreau. Leur douleur est due à l’acte, pas au fait que l’on ait à comprendre qui était ce démon.

Ne pensez-vous pas que les journalistes se cachent derrière la liberté d’expression alors que la seule raison pour eux est celle de l’audience ?

Ivan Rioufol : La presse est aussi une entreprise commerciale. Je serais patron de presse, j’aurais publié cette information sur le seul motif du droit à savoir en dehors des considérations mercantiles. Le journalisme est fait pour décrire des faits, pour rapporter des témoignages, pour mettre une lumière crue sur des sujets crus. Aujourd’hui, il est de moins en moins descriptif et de plus en plus politisé. Dans ce cas, nous sommes en présence d’un fait brut qui mérite d’être diffusé autant qu’il mérite d’être commenté. On ne peut pas reprocher à TF1 de vendre son information car il serait hypocrite de penser que ces sujets sont hors des considérations commerciales. De plus, il n’y a pas eu d’effet d’annonce de la part de la chaîne, on l’a découvert le soir même. C’est donc un procès assez peu convaincant que l’on fait à la chaîne.

Il y a quelques mois, Nicolas Sarkozy s’opposait fermement à la diffusion des images de l’intervention du RAID. Est-ce un problème du même ordre aujourd’hui ?

Ivan Rioufol : Ce n’est pas la même chose. Les images mettaient en scène la mort d’un homme. Dans le cas présent, il n’y a pas de voyeurisme dans ce que l’on découvre. Il y a une différence entre le voyeurisme malsain qui peut s’assimiler à s’arrêter pour regarder un accident de voiture, et le simple fait d’essayer de comprendre comment un assassin arrive à ce degré d’inhumanité dans une société qui ne cesse de se réclamer des droits de l’homme et de la tolérance. C’est cette contradiction qui est intéressante, celle qui revient à se demander comment les « belles âmes » produisent des horreurs par leur aveuglement.

TF1 S'EST INSCRITE CONTRE LA PENSÉE UNIQUE, C'EST DE LA PURE INFORMATION, BRAVO !

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