dimanche 1 juillet 2012
Ah les cons!
Ne voient ils pas la reculade française au sommet européen...?
Les organisations de gauche voient
aujourd'hui les promesses de Hollande prendre l'eau. Faible hausse du
Smic, baisse du nombre de fonctionnaires... et sommet européen. Car si
les médias ont salué une "victoire diplomatique", Hollande a en fait dû
ravaler ses ambitions. "Ah les cons", pourrait répéter Edouard Daladier,
74 ans après le sommet de Munich...
Munich 1938 demeure une référence historique en
matière d’abdication et de fourvoiement. Et c’est justement parce que ce
Munich marqua à jamais les esprits en tant qu’exercice d’abdication,
que cinq décennies plus tard, pour dénoncer ce qu’il jugeait comme une
intolérable absence de priorité donnée à la lutte contre le chômage,
Philippe Séguin parla d’un « Munich social ».
Aujourd’hui
il y a matière à dresser un autre parallèle avec Munich, cette fois-ci
dans le domaine du fourvoiement. Mais avant de poursuivre, il convient
de rappeler la fameuse anecdote à propos du chef du gouvernement
français de l’époque, Edouard Daladier, lors de son retour à Paris.
Lorsque l’avion se pose sur l’aéroport du Bourget et Daladier regarde la
foule amassée pour l’accueillir, il prit peur, craignant des actes de
violence physique contre lui pour avoir montré tant de compromission
avec le nazisme. Quelle ne fut pas sa surprise, à sa sortie de l’avion,
de voir la foule l’accueillir, non pas avec des hués, mais avec des
applaudissements. Daladier ne put alors se retenir, exclamant son
célèbre « Ah les cons ! ».
Des propos
semblables peuvent aujourd’hui être proférés à l’égard des organisations
de gauche, y compris des organisations syndicales, qui, après s’être
ralliées avec espoir et dévouement à la candidature de François
Hollande, observent impuissantes combien leur candidat donne
l’impression de les avoir flouées.
A
commencer par la hausse du smic, promesse symbolique de la campagne de
Hollande. La montagne qui accouche d’une souris. Ou plutôt d’une fourmi.
Car, quelque vingt euros par mois d’augmentation, le prix de quelques
tasses de café, c’est s’être moqué du monde.
Il y aussi la question de la stabilisation des effectifs de la fonction publique. Qui
allait dire aux syndicats qui s’étaient battus contre le
non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite,
règle établie par le précédent président français, que François
Hollande, celui dont la victoire électorale doit tant à ces syndicats,
allait durcir la règle dans toute l’administration à l’exception de
trois ministères, l’appliquant désormais à deux départs sur trois ?
Quant
au pacte budgétaire européen visant à parvenir à l’équilibre des
comptes publics dans les pays de l’Union, pacte dénoncé par François
Hollande pendant la campagne électorale, ce n’est un secret pour
personne qu’il s’apprête à le signer dans les jours ou les semaines à
venir. Non pas de plein gré, mais de peur de voir, dans le cas
contraire, les marchés augmenter les taux d’intérêt appliqués aux
obligations de l’Etat français.
Cerise sur le gâteau, l’accord intervenu à Bruxelles
dans la nuit du 28 au 29 juin entre Angela Merkel, François Hollande,
Mario Monti et Mariano Rajoy. Accord présenté par plus d’un commentateur
de l’Hexagone comme une victoire diplomatique et politique du nouveau
président français puisque, nous dit-on, on a enfin ajouté grâce à
Hollande un pacte de croissance au pacte budgétaire.
Sauf que, il suffit de lire dans la revue The Economist
un article titré « Hopeful or hopeless », daté du 28 janvier courant,
donc bien avant le début du quinquennat de Hollande, où l’on se réfère à
l’importance accordée à la croissance dans la préparation d’un sommet
européen qui se sera tenu deux jours plus tard.
Autrement
dit, les dirigeants européens n’avaient pas attendu l’élection de
François Hollande pour mettre la croissance au cœur de leurs travaux.
D’après
le même article, bien que tous les dirigeants aient alors convenu de
promouvoir la croissance, chacun y allait de sa petite musique quant à
la façon dont il faudrait agir. Avec le texte sur la croissance adopté
le 29 juin, y a-t-il quelque chose de changé à propos des ambiguïtés à
ce sujet ? Evidemment que non.
Ce qui a par contre changé, c’est que François
Hollande a dû remettre dans sa poche sa proposition de création d’euro
obligations, car Angela Merkel y a porté un refus catégorique. Ce qui a
changé aussi, c’est que François Hollande s’apprête à signer le pacte
budgétaire, celui-là même qu’il avait tant exécré du temps de la
campagne électorale.
S’il y a des gagnants concrets dans le sommet de Bruxelles, ce sont plutôt l’Italie et l’Espagne,
qui ont fait le forcing, avec succès, pour que leurs banques puissent
être recapitalisées par des fonds européens directement, c’est-à-dire
sans accroître la dette souveraine de ces pays. Quant aux Allemands, ils
y ont obtenu le droit de regard sur les budgets nationaux et sur les
banques du continent ; une véritable avancée pour Mme Merkel.
Rien
d’étonnant que le désarroi et la frustration commencent à se faire
sentir, et à s’exprimer, dans les rangs des mouvements politiques et des
organisations syndicales qui ont contribué activement à la victoire
électorale de François Hollande.
Tout ce beau monde ne peut s'en prendre
qu'à lui-même pour avoir fait preuve de tant de naïveté.
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