TOUT EST DIT

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samedi 30 juin 2012

La prévention des mariages forcés, garantie de la liberté du mariage

Sans qu'il soit possible de les répertorier avec précision, on sait les mariages forcés fort nombreux. Des jeunes filles, souvent mineures et souvent d'origine musulmane, sont mariées contre leur gré par la seule décision de leur famille. Bien entendu, elles peuvent demander au juge la nullité du mariage, a posteriori, dès lors que le consentement libre et éclairé de l'un des époux n'existe pas.
Dans sa décision rendue sur QPC du 12 juin 2012, le Conseil constitutionnel valide le dispositif français de lutte contre les mariages forcés. Sans qu'il soit possible de les répertorier avec précision, on sait qu'ils sont fort nombreux. Des jeunes filles, souvent mineures et souvent d'origine musulmane, sont mariées contre leur gré par la seule décision de leur famille. Bien entendu, elles peuvent demander au juge la nullité du mariage, a posteriori, dès lors que le consentement libre et éclairé de l'un des époux n'existe pas. Le droit positif s'oriente cependant, de plus en plus, vers une action de prévention dans ce domaine.
L'âge du mariage, âge de la majorité

La loi du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple et commises contre les mineurs a porté l'âge requis pour se marier à dix-huit ans, aussi bien pour l'homme que pour la femme. L'âge du mariage est désormais celui de la majorité, ce qui permet aux jeunes femmes de s'opposer plus efficacement au mariage forcé, dès lors qu'elles ont le droit d'agir en justice.Il est vrai que le Code civil autorise le mariage d'une mineure, en cas de "motifs graves". Mais ces derniers sont appréciés par le procureur de la République, celui là même qui va apprécier l'éventuel absence de consentement. Dans ce cas, il peut s'opposer à la célébration du mariage  (art. 145 c. civ.).
C'est précisément cette question du consentement qui est à l'origine de la présente QPC. L'article 146 du code civil fait du consentement des époux une condition de validité du mariage, et l'article 180 de ce même code précise que ce consentement doit être "libre". Est donc nul le mariage auquel l'un des époux n'a pas librement consenti.
La liberté du mariage
Le requérant soutient que le consentement au mariage est un acte formel, le "oui" fatidique prononcé par les époux suffisant à le caractériser. Il ne conteste pas l'existence d'une jurisprudence de 1963 affirmant que "le mariage est nul, faute de consentement, lorsque les époux ne se sont prêtés à la cérémonie qu'en vue d'atteindre un résultat étranger à l'union matrimoniale". Mais il insiste sur la consécration par le Conseil constitutionnel de  la "liberté du mariage", définie comme une "composante de la liberté individuelle" par la décision du Conseil constitutionnel du 13 août 1993, puis comme une "liberté personnelle" par celle du 20 novembre 2003. Aux yeux du requérant, le mariage conçu comme une liberté impose un régime répressif, le contrôle sur la réalité du consentement des époux ne pouvant intervenir qu'a posteriori, lors d'une action en nullité.
Le Conseil récuse cette interprétation. La liberté du mariage s'exerce, comme beaucoup d'autres libertés, dans le cadre des lois qui la réglementent. Le législateur peut donc librement établir un contrôle a priori, permettant d'apprécier l'effectivité du consentement des époux.
Un contrôle a priori
Depuis la loi Maîtrise de l'immigration du 13 août 1993, le parquet peut former opposition au mariage dans tous les cas d'éventuelle nullité. Ce principe était déjà acquis dans le cas des mariages blancs, dans lesquels les époux poursuivent un but étranger à l'union matrimoniale, puisqu'il s'agit généralement d'acquérir un titre de séjour, voire la nationalité française. Dans sa décision rendue sur QPC le 30 mars 2012, le Conseil admet la conformité à la Constitution de cette intervention du procureur de la république, faisant du détournement de finalité un vice du consentement.
La décision du 12 juin 2012 reprend exactement ce raisonnement. Le Conseil constitutionnel considère que l'intervention du Procureur pour empêcher un mariage forcé se justifie par la non conformité de ce type d'union à l'ordre public français.
Cette jurisprudence est très proche de celle de la Cour européenne des droits de l'homme. Dans un arrêt du 18 décembre 1987, F. c. Suisse, celle-ci précise que la loi peut restreindre le droit au mariage, à la condition toutefois qu'il ne soit pas atteint dans sa substance même. Plus tard, une décision de la Commission européenne des droits de l'homme du 16 octobre 1996 Dagan et Sonia Sanders c. France considère comme licite une ingérence du législateur dans la liberté du mariage, dès lors que les règles édictées ont pour objet de lutter contre les mariages blancs.
Le terme d'ingérence, issu de la Convention européenne, est particulièrement bien choisi dans ce cas. Les dispositions qui autorisent le procureur de la république à contrôler la réalité du consentement, et donc à empêcher un mariage forcé, constituent certes une ingérence, mais certainement pas une restriction à la liberté du mariage. C'est au contraire la condition de son libre exercice.

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