Leur amitié de trente-cinq ans survivra-t-elle à l’affaire Karachi? Dix jours après les derniers rebondissements dans l’enquête sur le financement de la campagne d’Édouard Balladur de 1995, Brice Hortefeux, le plus vieil ami du chef de l’État, attend toujours un
signe. L’ancien ministre de l’Intérieur, qui a été entendu vendredi pendant trois heures par les policiers, n’a pas reçu de coup de fil de Nicolas Sarkozy. Il n’a pas non plus été reçu à l’Élysée. Parrain de l’un des fils du Président (Jean), proche parmi les proches, Brice Hortefeux ne veut pas en faire une affaire personnelle. À 53 ans, l’Auvergnat connaît les dures règles de la vie politique et nous confie que ses liens avec Nicolas Sarkozy sont "inoxydables".
Cet homme fidèle en amitié est passé à l’offensive. Dès la fin de son audition par la police, il est allé s’expliquer au 20 Heures de France 2 sur l’origine de ses appels controversés à Thierry Gaubert. Décidé à ne pas "rester immobile", Brice Hortefeux, touché, tente de rebondir. Passé le moment de colère des premiers jours, le chef de l’État lui aurait fait passer ces dernières heures quelques conseils : "Brice doit se défendre et répondre aux attaques!" Au final, les deux hommes devraient se revoir mardi matin lors du petit déjeuner hebdomadaire de la majorité.
Takieddine : "Je veux voir Sarkozy un quart d’heure"
À l’Élysée, on s’offusque des commentaires sur un éventuel "lâchage" de "l’ami Hortefeux" : "Il n’y a pas du tout de lâchage. Brice reste son ami. Nicolas Bazire aussi, assure un conseiller. Simplement, le Président a compris que ses adversaires voulaient l’attirer dans le chaudron des affaires et de la politique politicienne. Eh bien, il ne leur fera pas ce
cadeau. Jusqu’à la fin de l’année, il s’occupera exclusivement des préoccupations des Français. En 2012, viendra le temps de la politique." Quant au sort de Brice Hortefeux, l’Élysée maintient qu’il aura un "rôle important" en 2012. Directeur de campagne? "C’est la presse qui a promu Brice à ce poste", corrige un sarkozyste. Plusieurs noms (Camille Pascal, Olivier Biancarelli) circulent déjà pour le remplacer.
À sept mois de la présidentielle, Nicolas Sarkozy retrouve sur sa route une nouvelle fois le juge Renaud Van Ruymbeke. Une veille connaissance puisque c’est le magistrat qui avait instruit le dossier Clearstream, ce que ne manque jamais de rappeler en privé le chef de l’État. Mercredi, Van Ruymbeke a convoqué celui avec lequel, selon tous les experts du dossier, "tout peut arriver": Ziad Takieddine.
Cet "homme de l’ombre", silencieux depuis dix-sept ans, parle depuis une semaine tous les jours ou presque. "Je donne à Nicolas Sarkozy quarante-huit heures pour lever le secret-défense. Je veux le voir un quart d’heure, en tête à tête, d’ici mercredi", assure Takieddine au JDD, engagé dans un bras de fer avec la présidence, dont nul ne connaît l’issue. Jusqu’où ira Takieddine, l’homme des millions de l’Arabie saoudite, qui fréquentait Thierry Gaubert, Jean-François Copé, Brice Hortefeux et Nicolas Bazire? "Il y a comme un sanglier blessé au milieu du champ de maïs", décrypte un avocat du dossier, médusé par l’ampleur du "grand déballage" auquel se sont livrées devant les policiers deux femmes en instance de divorce, Mme Takieddine et Mme Gaubert. Une chose est
sûre, Nicolas Sarkozy devra faire avec le poison des affaires, invitées obligées de chaque élection présidentielle depuis 1969. Pour l’heure, le chef de l’État fait le gros dos. Ce n’est pas encore Waterloo. Mais les hommes du Président, sous la mitraille qui s’annonce, vont devoir former le carré. Et serrer les rangs.
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