mercredi 26 octobre 2011
Vigilance démocratique
La première place obtenue dimanche par le parti Ennahda confirme que l’ancien président Ben Ali se vantait beaucoup en faisant croire qu’il avait jugulé la montée de l’islamisme en Tunisie. En réalité, il s’était borné à casser le thermomètre.
La percée d’Ennahda («Renaissance ») s’explique par son ancienneté, son travail de terrain et ses appuis pécuniaires. Né il y a trente ans dans le giron des Frères musulmans, interdit jusqu’en mars dernier, ce parti a su se donner un ancrage national. Mais sa victoire change son statut. Se poser en plus vieil opposant était une parfaite carte de visite électorale mais cela ne vous transforme pas automatiquement en parti de gouvernement efficace et encore moins en démocrate sincère.
Les divergences stratégiques chez les islamo-conservateurs vont s’exacerber. Autant la direction d’Ennahda affiche un visage modéré, autant la base peut se montrer expéditive. Ces contradictions pèseront sur les alliances gouvernementales (moyennant quelles concessions ?) et détermineront la tonalité de la future Constitution, dont l’écriture sera le travail majeur des nouveaux élus.
Rédiger une Constitution est un acte solennel: la nation s’y engage face au reste du monde autant que face à ses propres concitoyens. On examinera donc minutieusement les articles qui encadreront les libertés publiques, le statut de la femme, la place des religions (et pas seulement de l’islam) et la très discutée « identité arabo-musulmane ». Mais la vigilance devra aller bien au-delà.
Une Constitution trop habile est vite un trompe-l’œil. Pour connaître les vraies orientations de la nouvelle Tunisie, il faudra par exemple surveiller ce que diront les tribunaux chargés des divorces. Il faudra aussi regarder comment sera réformée la police, comment seront gérés les médias et comment seront attribués les marchés publics, trois domaines que Ben Ali et sa famille tenaient d’une main de fer et où la rupture doit être visible, rapide et sans bavure.
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