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lundi 26 septembre 2011

Le sans-faute de Christine Lagarde après 100 jours au FMI

L'ex-ministre de l'Economie française a su se couler dans l'héritage réformiste de son prédécesseur, Dominique Strauss-Kahn, tout en préservant son indépendance et son style.

Souriante sous les flashs des photographes, Christine Lagarde a entamé jeudi une fin de semaine marathon. Devant une salle de presse archicomble, la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) s'est livrée à un exercice qu'elle maîtrise à la perfection, en préambule aux assemblées générales du FMI, qui débutent officiellement ce vendredi. Peu avant, Robert Zoellick, président de la Banque mondiale, avait salué "les compétences, la vision et le leadership d'une partenaire inestimable dans ces moments difficiles pour l'économie mondiale".
Près de cent jours après sa prise de fonctions, le 5 juillet, l'ex-ministre de l'Économie française fait l'unanimité, hors et dans une institution où elle commence à prendre ses marques. "Jusqu'à présent, elle a été à l'écoute. Elle a posé de nombreuses questions aux membres du Conseil, ce qui est plutôt inhabituel pour un directeur général, explique Domenico Lombardi, président de l'Oxford Institute for Economic Policy et ancien administrateur du Fonds pour l'Italie. Elle a entamé un débat avec eux sur le futur rôle du FMI dans les crises internationales, sans a priori. Les représentants des économies émergentes ont ainsi pu avoir des opportunités pour exprimer leurs inquiétudes."
Depuis son intronisation, Christine Lagarde a également multiplié les interviews et les interventions publiques, comme à New York devant l'influent think tank Council on Foreign Relations (CFR) ou tout récemment face aux caméras de CNBC, la puissante chaîne d'informations financières. Sa sortie la plus remarquée reste son discours à Jackson Hole, lors du symposium annuel des banques centrales. "Elle m'a particulièrement impressionné, se souvient Steven Dunaway, membre du CFR et ancien directeur du département Asie-Pacifique du FMI. Elle a attiré l'attention sur les dangers de la rigueur budgétaire." Devant les grands argentiers de la planète, la nouvelle directrice générale du FMI a prouvé "qu'elle n'hésiterait pas à exprimer ses opinions" alors que les gouvernements européens se sont engagés dans des plans massifs d'économies, ajoute Edwin Truman, du Peterson Institute for International Economics. "Il était important qu'elle prouve rapidement qu'elle servait les intérêts de tous les pays, et pas seulement ceux des Européens", poursuit cet ex-secrétaire adjoint du Trésor américain.
Bâtir sa crédibilité
En affirmant publiquement qu'une recapitalisation des banques européennes était "urgente", Christine Lagarde s'est certes attiré les foudres des responsables politiques européens. Mais "elle a aussi montré qu'elle s'adaptait aux vues du personnel du FMI et aux recherches qu'ils avaient effectuées avant son arrivée", estime Edwin Truman. "Elle s'est attachée à défendre l'indépendance de l'institution, à bâtir et à renforcer sa crédibilité personnelle et à montrer qu'elle n'avait pas l'intention de se plier aux pressions émanant des dirigeants européens", renchérit Domenico Lombardi. Une absolue nécessité vis-à-vis des autres membres du Fonds, dont certains redoutaient qu'elle ne soit qu'une simple "exécutante", une "marionnette" aux services de ses ex-collègues du Vieux Continent. "Mais si la Grèce ne parvient pas à remplir ses promesses d'ajustements, passera-t-elle outre les éventuelles pressions politiques pour refuser de fournir de nouvelles aides financières ? Osera-t-elle dire non aux responsables européens ?", s'interroge Steven Dunaway.
Dilemme en perspective
Pour l'instant, le FMI ne veut pas mettre en péril les programmes d'aide aux économies en difficulté de la zone euro. Mais cela pourrait bien changer : au sein de l'institution, notamment parmi les représentants des pays émergents, le scepticisme grandit. Si bien que certains envisagent de ne pas cofinancer les prochains plans de sauvetage. Un potentiel dilemme en perspective pour Christine Lagarde, qui y jouera à nouveau sa crédibilité en tant que directrice d'une institution indépendante. "Le Fonds sera bien plus prudent avant de s'engager, estime Domenico Lombardi. Dominique Strauss-Kahn aurait certainement milité pour une attitude plus active et agressive." Mais "la substance de son message envers les Européens est sensiblement la même, nuance Edwin Truman. Il y avait dans les propos de son prédécesseur le même sens de l'urgence face à la situation en Grèce".
Trois mois après son arrivée, Christine Lagarde n'a pas rompu avec l'héritage de Dominique Strauss-Kahn, dont le travail au sein de l'institution a été unanimement salué. Elle devrait ainsi s'efforcer de mener à bien la réforme du FMI, même si les Européens se montrent toujours réticents à tout changement qui réduirait leur poids et leurs droits de vote. "Elle va essayer d'influer sur les membres du Fonds durant ces assemblées générales pour qu'ils acceptent la réforme" votée en décembre 2010, avance Domenico Lombardi. "Avec le temps, elle fera probablement des choix différents de ceux que DSK aurait pu faire", anticipe Edwin Truman. Elle imprimera alors sa marque de fabrique.

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