TOUT EST DIT

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jeudi 24 mars 2011

Course en avant

Le ministre de l’Industrie, Éric Besson, ne manque pas d’air. Il dément « catégoriquement » la perspective d’une hausse de 30 % des tarifs d’EDF, d’ici 2015… en annonçant, en même temps, une « légère augmentation » pour l’été prochain. Augmentation qui s’ajoutera aux 6,4 % déjà appliqués depuis un an ! À ce rythme, les 30 % visés par EDF sur cinq ans seront pulvérisés… avec la bénédiction du gouvernement. Mais chut, il ne faut pas le dire. Pierre Gadonneix, l’ancien PDG d’EDF, a été remercié parce qu’il réclamait 20 % d’augmentation sur trois ans. Son successeur Henri Proglio a des exigences encore plus élevées, sauf qu’il s’arrange plus discrètement pour obtenir gain de cause.

EDF et le gouvernement expliquent les besoins d’argent de l’électricien national par les investissements dans les énergies renouvelables et par la nécessaire modernisation du parc de centrales nucléaires. Ils oublient volontairement de citer deux autres motifs d’inflation beaucoup moins avouables : la privatisation partielle d’EDF a fait entrer des investisseurs qui veulent être – fortement – rémunérés. Et la libéralisation du marché de l’électricité tire les prix vers le haut. Grâce au nucléaire, nous payons notre électricité 30 % moins cher que nos voisins européens. Comme c’est bizarre : c’est justement ces 30 % qu’EDF réclame pour s’aligner sur ses concurrents. Il s’agit, pour le groupe français, de lutter à armes égales pour acquérir des participations dans d’autres pays. La priorité de la société nationale n’est plus de proposer le meilleur service au meilleur prix possible en France. Elle est d’arracher des parts de marché aux États-Unis, en Grande-Bretagne, en Pologne…

EDF a déjà connu beaucoup de déboires dans la conquête des Eldorados étrangers, notamment américain. Elle risque d’en connaître encore beaucoup plus à l’avenir. La catastrophe de Fukushima, au Japon, n’est pas une publicité pour l’énergie nucléaire, qui est le point fort du groupe. Celui-ci va être, très vite, engagé sur deux fronts, avec une mise en sécurité sans doute plus coûteuse que prévu pour ses centrales déjà en service, et des pertes de contrats à l’étranger, au profit d’autres énergies. Les tarifs n’ont pas fini de grimper. Malheureusement, les investissements en France ne justifient qu’une partie de cette course en avant dans la libéralisation effrénée du marché de l’électricité.

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