TOUT EST DIT

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samedi 20 novembre 2010

Maître chanteur

En se disant « spécialement inquiet » pour les otages enlevés au Mali, mardi soir, le président Sarkozy a anticipé les mauvaises nouvelles tombées hier. Contrairement à d’autres dossiers, qui ont pu, ou pourront, se régler par des contacts plus ou moins directs avec les ravisseurs, et dans lesquels l’argent peut — notoirement — jouer un rôle décisif, les terroristes qui détiennent nos compatriotes dans la région du Sahel ont placé leurs victimes au cœur d’un chantage qui touche à la politique mondiale.

En liant la libération des prisonniers au retrait des troupes françaises d’Afghanistan, ce ne sont pas seulement l’image ou le prestige de la France, ni même des intérêts économiques, qui sont attaqués, mais des options cruciales de sa politique extérieure et de sécurité : sa participation à la mise en œuvre d’un mandat des Nations unies (contrairement à la guerre en Irak, que Paris avait refusée), sa solidarité avec ses partenaires de l’Alliance atlantique, son choix — peut-être naïf — de croire aux chances de faire émerger en Afghanistan une société libérée de l’obscurantisme des talibans. Aucune de ces options n’est indiscutable. Certaines sont d’ailleurs contestées chez nous, tout comme aux États-Unis, en Allemagne et au Royaume-Uni. Mais ces critiques se situent dans le cadre d’un débat démocratique, médiatique et public.

Avec leur message-chantage, les preneurs d’otages du Sahel nous ramènent sur le terrain de la vraie guerre, dans toute sa dureté, où les vies humaines n’ont guère de valeur, dans tous les camps d’ailleurs. Le pessimisme est donc justifié, en effet. À moins qu’un art du contact ultrasecret ne réussisse à conserver une place derrière les menaces et les outrances. On a parfois vu, dans l’histoire, des liaisons étonnantes s’établir dans l’ombre de confrontations sanglantes, et n’être révélées que des années après les faits.

Mais pour que de tels échanges aboutissent, il aurait fallu que les sbires de Ben Laden au Maghreb, qui le mettent en scène comme maître chanteur, donnent son adresse. Elle est très recherchée.

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