TOUT EST DIT

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mardi 28 septembre 2010


Une arnaque clandestine

A combien de lois sur l'immigration en sommes-nous ?
Le sujet est légitime, évidemment, mais il est submergé par la peur. Envahi par les fantasmes. Colonisé par la mauvaise foi des uns, les hypocrisies des autres. Ce n'est plus une réflexion consensuelle mais un affrontement nourrit d'ignorances et de faux-semblants. Comment légiférer positivement dans ces conditions ?
En pleine polémique sur les Roms, le texte d'Éric Besson arrive au plus mauvais moment à l'Assemblée nationale. Pour ses concepteurs, peu importe : il n'a pas l'ambition de construire mais de rassurer. Sa logique, que le gouvernement assume, est exclusivement défensive. Il ne s'agit pas, cette fois, d'exalter la diversité ou de donner un cadre à la France d'après, forcément métissée. Non, décidément, ce n'est pas dans l'air du temps et la France black-blanc-beur qu'on célébrait pendant l'été 1998 après la victoire des Bleus en coupe du monde s'est définitivement évanouie dans le vacarme de la crise, les vapeurs d'électoralisme et les brouillards trompeurs des populismes.
Cette fois, le projet affiche une tonalité si répressive que pour deux Français sur trois (66%, dans un sondage BVA) les positions gouvernementales s'approchent de celles du Front national. Cette assimilation inavouable dérange bon nombre d'élus de la majorité, y compris à l'UMP, mais elle ne gêne pas l'Élysée. Et pour cause : le but de la manœuvre, en effet, c'est de rattraper par la manche une partie de l'électorat d'extrême droite qui avait voté Sarkozy en 2007... et s'en détourne en 2010.
On sort donc l'artillerie lourde : la déchéance de la nationalité pour certains criminels naturalisés depuis moins de dix ans. Populaire et spectaculaire, elle est si difficile à mettre en œuvre qu'elle ne servira à rien. Même la transposition de règles européennes n'apparaît guère plus applicable tant elle suppose une augmentation de moyens humains (plus de policiers, plus de juges) qui n'est pas vraiment à l'ordre du jour des restrictions budgétaires.
Tout ce semblant de fermeté tape-à-l'œil se résume à une arnaque politique. Si elle était votée, la loi ne renforcerait en rien, concrètement, le juste contrôle des flux migratoires. En revanche, elle contribuerait à faire grandir la méfiance envers les immigrés, soupçonnés, en bloc, d'être des clandestins récidivistes. Qui sait que plus de 40% d'entre eux sont déjà des Français à part entière ?
L'instrumentalisation d'une politique agressive, qui remet en question l'égalité entre citoyens dits « de souche » et ceux d'origine étrangère, prend le risque d'aggraver l'atomisation de la société française quand il faudrait lui apprendre à reconnaître, et à aimer, son nouveau visage.


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