TOUT EST DIT

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mardi 30 mars 2010

La sale guerre

Une violence aveugle. Un métro transformé en trappe mortelle. Qu'importe le lieu, Madrid, Londres ou Moscou. Qu'importe la cause. Les terroristes frappent toujours des civils innocents. On ne peut que se sentir solidaire des Moscovites, secoués, hier, par un double attentat.

Tous les indices le montrent, les actes de terrorisme d'hier viennent du Caucase. Plus précisément, du Caucase du Nord, aux confins méridionaux du plus vaste pays de la planète qu'est la Fédération de Russie. Cet espace, de tout temps, a toujours constitué une épine au flanc du pouvoir russe. Depuis l'effondrement de l'Union soviétique, il y a presque vingt ans, il n'a jamais été normalisé.

Trois républiques abritent les principaux foyers d'insurrection islamiste. La Tchétchénie où, malgré deux guerres d'une rare violence, Moscou n'a pas gommé une rébellion qui continue de perpétrer des attentats. Le Daghestan, frontalier, a été rendu encore plus instable par l'assassinat de son ministre de l'intérieur, en juin 2009. L'Ingouchie a également été le théâtre d'attentats suicide.

En février, le chef rebelle du Caucase, Doku Oumarov, l'actuel ennemi public numéro un de Moscou, avait annoncé la couleur. Pour établir ce qu'il appelle un émirat islamique au Caucase, il menaçait de porter la terreur dans les villes russes.

Partisan de la manière forte, dont il a dramatiquement donné la preuve durant les deux guerres de Tchétchénie, Vladimir Poutine est la première cible politique des attentats d'hier. Le choix de la station Loubianka, à deux pas du FSB, le coeur des services de renseignement, est un message on ne peut plus clair. Les terroristes entendent signifier que les méthodes répressives déployées par Moscou dans le Caucase du Nord pour mater les rébellions islamistes sont vaines.

Dans les années Eltsine, encore sous le choc de l'effondrement du pouvoir central soviétique, la gestion de ces espaces périphériques de la Fédération de Russie avait donné plus de marges aux pouvoirs locaux. Au point de créer d'authentiques fiefs où ont grandi les mouvements islamistes. Après la vague d'attentats des années 2003-2004, notamment la tragique prise d'otages de l'école de Beslan, Vladimir Poutine a décidé de siffler la fin d'une certaine autonomie pour redonner la main au Kremlin. Résultat, on a assisté à redécoupage administratif et à une recentralisation à marche forcée. De façon dramatique, les bombes du métro de Moscou traduisent, elles aussi, un recentrage des objectifs terroristes.

Le Président Medvedev a, dès hier, annoncé une répression sans faille. Le voici contraint à présent d'épouser la même intransigeance que son Premier ministre, Vladimir Poutine. C'est, là aussi, un succès des terroristes, car, ces derniers mois, Medvedev tentait, du moins en apparence, de rompre avec le seul recours au services spéciaux pour stabiliser la région, soucieux d'incarner la modernisation de la Russie. En janvier, il avait nommé pour cela un « consul du Caucase », issu, pour la première fois, non pas des services de sécurité, mais des milieux d'affaires. Cela pouvait se traduire par une lutte moins brutale dans la méthode et plus radicale contre le pouvoir des potentats locaux. En ciblant, hier, le métro de Moscou, les terroristes viennent de légitimer le pouvoir russe à reprendre ses méthodes les plus répressives. Inefficaces jusqu'ici pour stabiliser le Caucase.
Laurent Marchand

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