TOUT EST DIT

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lundi 29 mars 2010

France-Etats-Unis, un dialogue relancé

Nicolas Sarkozy, entame une visite officielle aux États-Unis lundi 29 mars et sera reçu par son homologue américain à la Maison-Blanche demain. L’occasion pour les deux présidents d’évoquer les dossiers les plus brûlants sur la table, alors que les points de convergence sont désormais plus nombreux que les sujets de frictions.

Les dossiers qui divisent

Les avions ravitailleurs

Nicolas Sarkozy espère persuader Barack Obama de faire rouvrir le dossier des avions ravitailleurs, dont Airbus a été écarté au profit de Boeing. L’affaire est ancienne : l’appel d’offres pour la fourniture de 179 avions ravitailleurs à l’armée américaine avait été attribué une première fois à Boeing en 2003, puis une deuxième fois à Airbus (EADS) et son allié américain Northrop Grumman, en 2008, et à chaque fois annulé. EADS vient de se retirer du nouvel appel d’offres, en estimant qu’il avantageait Boeing. Les chefs d’État des quatre pays européens partenaires d’Airbus – Nicolas Sarkozy, la chancelière allemande Angela Merkel, le chef du gouvernement espagnol José Luis Zapatero et le premier ministre britannique Gordon Brown –, avaient écrit en décembre 2009 une lettre aux autorités américaines à ce sujet. Le Pentagone acceptera-t-il de retarder la date de clôture de l’appel d’offres pour permettre à EADS d’y participer ?

Climat

Yvo de Boer, secrétaire exécutif de la convention de l’ONU sur le climat, estime que la conférence de Cancun (Mexique) prévue en novembre-décembre pourrait jeter les bases d’un accord international qui prendrait corps fin 2011 en Afrique du Sud. Ainsi, l’horizon d’un accord sur le climat ne cesse de s’éloigner, témoignant de l’ampleur des différends à aplanir entre l’Europe et les États-Unis, mais aussi avec les grands pays émergents et les pays en développement. Parmi les divergences transatlantiques figure le niveau d’ambition de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2020. Les États-Unis se fixent un cap de 17 % de réduction, l’Union européenne de 20 %. Mais les premiers se réfèrent à l’année 2005, obérant le fait que leurs émissions ont dérapé depuis 1990, alors que l’UE s’est engagée sur le chemin de la réduction (– 8 % sur 1990-2012). La France fait partie des pays européens qui refusent d’aller au-delà des 20 % tant que les grands pays ne prennent pas des engagements comparables. Autre divergence, le caractère contraignant du futur accord, principe auquel s’opposent les États-Unis.

Les relations avec la Russie

L’administration Obama a peu apprécié les initiatives françaises et le cavalier seul de Nicolas Sarkozy en direction de Moscou. Ce n’est pas tant la vente par la France de quatre navires de guerre de classe Mistral à la Russie qui a choqué. Mais plutôt l’annonce du président français, sans concertation préalable, qu’il est prêt à discuter avec Moscou de la création d’un « nouvel espace de sécurité européenne ». Cette idée avait été lancée par le président russe Dmitri Medvedev pour faire concurrence à l’Otan. Et la France a été la première à emboîter le pas, sans prendre l’avis de ses partenaires… L’administration Obama, en revanche, s’est rapprochée de Paris sur son hostilité à une entrée de l’Ukraine et de la Géorgie dans l’Otan.

Désarmement nucléaire

Le 24 septembre dernier, devant le Conseil de sécurité de l’ONU, présidé par Barack Obama, Nicolas Sarkozy s’était livré à une attaque en règle du projet « virtuel » d’un monde sans armes nucléaires défendu par le président américain, tandis qu’un pays comme l’Iran faisait tourner « de plus en plus de centrifugeuses ». Pour tenter de créer une dynamique vertueuse, le président américain avait voulu l’adoption par le Conseil de sécurité de la résolution 1887 visant à « créer les conditions d’un monde sans armes nucléaires ». Les États-Unis devraient signer avec la Russie le 8 avril à Prague un traité post-Start sur la réduction des armes nucléaires stratégiques. Fort de ce succès, Barack Obama veut obtenir un renforcement des instruments du régime de non-prolifération lors de la conférence d’examen du traité de non-prolifération (TNP) qui s’ouvre le 2 mai à New York. Attachée à sa force de frappe et soucieuse de défendre sa vision stricte des problèmes de prolifération, la France veut éviter d’y apparaître isolée.

Les dossiers qui rapprochent
Proche-Orient

Sceptique sur la méthode de l’administration américaine et les navettes infructueuses de George Mitchell, l’envoyé de la Maison-Blanche dans la région, Nicolas Sarkozy souhaite la tenue d’une conférence internationale (à Paris, bien sûr) réunissant Israéliens et Palestiniens pour discuter d’un plan proposé par les États-Unis et l’Europe. Les marges de manœuvre de la diplomatie française et européenne restent cependant étroites, après l’échec enregistré par l’administration américaine sur la question du gel des colonies. Dans ce contexte, la France devrait appuyer les efforts américains en faveur d’une reprise des discussionssous l’égide des États-Unis.

Iran

Les points de vue se sont rapprochés depuis que Barack Obama a mis de côté sa politique de la main tendue pour obtenir de nouvelles sanctions au Conseil de sécurité. Les États-Unis rencontrent des difficultés pour convaincre la Chine et d’autres pays membres du Conseil de sécurité de ne pas opposer leur veto. Faute d’un accord à l’ONU, Nicolas Sarkozy voudrait que son homologue l’aide à persuader certains des 27 États membres de l’Union européenne d’adopter les mesures unilatérales préconisées par la France.

Afghanistan

Barack Obama a effecuté, hier, une visite surprise à Kaboul. Washington et Paris partagent la même certitude : la solution ne peut pas être seulement militaire en Afghanistan. Début janvier, la Maison-Blanche espérait obtenir 1 500 soldats français supplémentaires en Afghanistan. Nicolas Sarkozy a refusé, campant sur une position « ni renfort ni retrait » et promettant que « la France resterait en Afghanistan aussi longtemps que les États-Unis ». Le Pentagone espère toujours l’envoi par la France de « plusieurs centaines » de formateurs militaires et policiers.

Sahel

Les États-Unis et la France sont sur la même longueur d’onde dans leur analyse du risque terroriste en Afrique subsaharienne. Fin juillet, la France a lancé un programme de formation de 500 soldats en Somalie pour le compte du gouvernement fédéral de transition (GFT). Paris et Washington souhaitent renforcer leur coopération dans la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée : programmes de formation de soldats et de policiers, fournitures de matériels et échanges de renseignements sont à l’ordre du jour.

Régulation de l’économie

Nicolas Sarkozy va plaider pour que l’« agenda de la régulation » soit poursuivi. Mieux encadrer les hedge funds (fonds spéculatifs), coordonner les efforts pour bénéficier de la reprise, travailler sur la volatilité des taux de change et corriger les monnaies sous-évaluées (notamment le yuan, mais aussi le dollar) seront les points sur lesquels il compte mettre l’accent.

Barack Obama, qui a proposé un plan visant à limiter la taille et les activités spéculatives des banques, est sans doute sur la même longueur d’onde. Mais avec des nuances de taille. D’abord, Wall Street, d’où est partie la crise financière, reste un univers suffisamment puissant et opaque pour résister aux injonctions de l’autorité publique fédérale américaine. Ensuite, l’encadrement des bonus des traders, un des objectifs fixés lors du G20 de Londres, n’a pas avancé de façon significative outre-Atlantique.

Enfin, la querelle du protectionnisme financier a surgi depuis la crise, relançant d’autres disputes commerciales. Les États-Unis redoutent qu’un projet de réforme européen visant à encadrer les fonds spéculatifs, porté par Michel Barnier, commissaire pour le marché intérieur, devienne discriminatoire pour les fonds américains.

Un sujet brûlant.

François D’ALANÇON, Alain GUILLEMOLES, Nathalie LACUBEet Marie VERDIER

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