Nicolas Sarkozy et Angela Merkel sont convenus de soutenir «le même candidat».
Le réalisme politique et le retour en force d'Angela Merkel sur la scène européenne ont fini par peser : les Vingt-Sept ont pratiquement fait une croix sur le visage de Tony Blair, tout en laissant aux eurodéputés le soin d'infliger le coup le plus direct à son ambition de devenir le premier président du Conseil européen.«Tony Blair ne sera pas président», lâchait vendredi un ministre européen, rouvrant du même coup la course au fauteuil le plus visible de l'UE.
Connu comme «le grand communicateur», l'ex-premier ministre britannique offre le profil idéal pour la première définition du poste : donner à l'UE une voix et un visage reconnus sur la scène mondiale. Mais, plombé par une proximité gênante avec l'ancien président américain, George W. Bush, et par l'insularité du Royaume-Uni, il pèche de plus en plus sur le second critère : s'imposer à la fois comme un européen convaincu et un homme de consensus entre les Vingt-Sept.
Nicolas Sarkozy fut le premier à le faire entrer en lice. Mais «les noms de la première vague ne sont pas forcément les vainqueurs de la dernière», reconnaissait-il vendredi à l'issue du sommet européen. Le moment venu, la France et l'Allemagne «soutiendront le même candidat», a ajouté le président, en évoquant la tenue d'un «sommet extraordinaire, pour nommer le président du Conseil européen, à la mi-novembre probablement». Les réticences d'Angela Merkel à l'endroit de Tony Blair risquent de gagner Paris.
L'Europe se prépare à repartir à zéro dans sa quête de l'«oiseau rare», au moment précis où un règlement politique avec Vaclav Klaus dégage enfin la voie du traité de Lisbonne. Ce n'est pas un hasard : Nicolas Sarkozy et Angela Merkel n'avaient pas le cœur de dire franchement «non» à l'ancien du 10 Downing Street. Le drame s'est noué ailleurs, au Parlement européen.
Les deux grands partis, le PPE conservateur et les socialistes du S & D, ont décidé d'un partage des rôles qui exclut Tony Blair : la présidence du Conseil pour le PPE, les relations extérieures pour le S & D. Le grand favori britannique se retrouve éjecté de la course avant même qu'elle ne soit officiellement lancée. Londres n'a pas tout perdu. À 44 ans, David Miliband, le chef du Foreign Office, s'avance comme un bon candidat à l'autre poste phare créé par le traité : celui de haut représentant, patron désormais unique de la politique extérieure de l'UE.
Une multiplication des candidatures
Gordon Brown avait sonné l'alarme dès jeudi soir en admettant que «l'excellente candidature» de Tony Blair risquait de ne mener nulle part. Mais c'est Angela Merkel, chancelière reconduite et libérée du poids de sa campagne législative, qui a ouvert les vannes : Berlin ne verrait pas d'objection à un président venu d'un petit pays.
Au lendemain d'un dîner remarqué avec Nicolas Sarkozy à l'Élysée, le signal était clair. Tony Blair n'est plus en cour. Berlin comme Paris gardent une méfiance instinctive pour un pouvoir européen trop fort. Ou trop visible.
Parmi les Vingt-Sept, le signe le plus sûr de l'affaiblissement de Tony Blair est la multiplication des candidatures venues de petits pays, ceux qu'une presse britannique bien déçue qualifie de «Lilliputiens», voire de «Pygmées». Après le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker, la Belgique laisse filer les noms plausibles, dont l'actuel premier ministre Herman van Rompuy. La Lituanie pousse une femme, tout comme la Lettonie. La Finlande avance trois noms, dont l'ex-premier ministre Paavo Tapio Lipponen. L'Irlande, convertie de fraîche date au traité, en dénombre quatre.
Lâché de toutes parts, celui que les Britanniques appellent parfois «Conserva-Tony» paie aussi le prix du rapport de forces politiques et d'une filiation idéologique ambiguë. Les socialistes européens revendiquent pour eux le fauteuil de haut représentant parce qu'ils veulent interdire la présidence européenne à l'incarnation d'une gauche britannique qu'ils jugent dévoyée. Les conservateurs, majoritaires en Europe et au Parlement, seront trop heureux de récupérer le fauteuil n° 1.
samedi 31 octobre 2009
Tony Blair n'est plus en cour pour la présidence de l'UE
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