Etre acculé, Vladimir Poutine sait ce que cela veut dire. Enfant dans le Leningrad d’après-guerre, muni d’un bâton, il pourchassait les rats dans la cage d’escalier de son immeuble décrépit. Un jour, a-t-il raconté dans son autobiographie, il en coinça un gros dans un cul-de-sac. Privé d’échappatoire, le rongeur lui sauta au visage, lui occasionnant la peur de sa vie.
Aujourd’hui, c’est le président russe qui est acculé. Provoqué manifestement par un tir de missile sol-air de ses protégés ukrainiens, le crash du Boeing de la Malaysia Airlines, qui a fait 298 morts, a rebattu les cartes. En mars, les Européens avaient honteusement fermé les yeux sur l’annexion de la Crimée par Moscou. Là, ils ont réagi avec vigueur, étendant mardi, pour la première fois, leurs sanctions à des secteurs clés d’une économie russe déjà en piteux état : la haute technologie, la prospection et l’exploitation pétrolière, l’armement, l’accès au marché financier occidental.
Le raidissement européen, programmé, était inévitable. Il n’y a aucun doute que Vladimir Poutine, tout à ses chimères de restauration de la puissance russe, porte une lourde responsabilité dans l’escalade.
Mais l’Europe ne doit en aucun cas s’arrêter là. Car elle a autant à perdre que la Russie dans une spirale des mesures de rétorsion. Des dizaines de milliers d’emplois sont en jeu (rien que le contrat Mistral a créé 1 000 emplois à Saint-Nazaire). Seule une détente russo-occidentale peut stopper la guerre civile en Ukraine, offrir un avenir à ce pays charnière et garantir l’approvisionnement énergétique européen. Tout en restant ferme, l’Europe doit tendre la main à Vladimir Poutine. Pour lui offrir une échappatoire. En espérant qu’il aura l’intelligence de la saisir.