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jeudi 26 juin 2014

«L'enfer» érotique de la bibliothèque soviétique de Moscou dévoilé

 Quelque 12.000 objets sulfureux, images et littérature confondues, reposent dans un coin bien gardé. L'État y a accumulé les œuvres saisies pour cause «d'idéologie bourgeoise», tout en les mettant à la disposition de ses sbires. 
Une esquisse de femme se masturbant signée Vasily Masyutin, qui illustra Tchekhov, des gravures japonaises sensuelles, des photos et une vaste gamme de littérature pornographique... Tels sont les trésors que recèle un département très confidentiel de la Bibliothèque d'État de Russie à Moscou, longtemps tenu secret. Ces ouvrages sont les vestiges d'une collection toute particulière constituée depuis les années 1920, réunissant tous les écrits et images saisies par l'État soviétique pour préserver les bonnes mœurs. 12.000 objets transgressifs au total; un ensemble jamais ouvert au public.
Jugés «idéologiquement néfastes», ils avaient été relégués dans l'ombre. Les ouvrages érotiques de la bibliothèque nationale sont mis au grand jour par le Moscow Times . L'institution a ouvert ses portes au journaliste Joy Neumeyer, qui relate l'histoire de cette collection visitée par certains puissants de l'époque.

1920. Les Bolcheviques transforment un musée en bibliothèque, baptisée Lénine. L'équipe de l'établissement ouvre à ce moment un département spécial où elle stocke la littérature compromettante des aristocrates, confisquée à ses détenteurs. Avant la révolution, il était de bon ton de posséder ces «Livres pour dames» aux dessins très suggestifs. Dans les années 1930, on saisit également les écrits sur la sexualité et les publications médicales abordant la contraception. Sous Staline, la collection est mise à disposition de ses sbires amateurs d'images explicites, parmi lesquels l'officier et chef de cavalerie rouge Semion Boudienny et le dirigeant Mikhaïl Kalinine, selon la légende.

Une collection qui représentait un «danger considérable»

Mais c'est grâce à un fervent collectionneur que le département «sexe» de la bibliothèque s'est élargi. Nikolai Skorodumov, directeur de la Bibliothèque de l'université d'État de Moscou, avait amassé dessins et livres érotiques depuis des années et les autorités n'ont mis la main sur son trésor qu'après sa mort. Il se raconte que le chef de la police politique de Staline, très porté sur la chose, l'aurait mis sous sa protection pour profiter lui-même de ses stimulantes possessions. Quand la collection de Nikolai Skorodumov est saisie, l'État soviétique refuse de l'acheter à sa veuve, avançant qu'elle ne présentait aucun «intérêt scientifique ou historique pour les lecteurs». Il lui fut toutefois interdit de la conserver à cause de sa nature «nocive», qui représentait un «danger considérable»... Elle atterrit donc dans l'éternel département érotique.
Les dernières pièces arrivées dans ses étagères datent des années 70 et 80, résultat de saisies à la douane. Certains livres sont à présent accessibles au public mais la collection «secrète» reste à l'abri des regards et personne ne s'est vraiment attelé à répertorier les œuvres dans un catalogue. «L'enfer» de la Bibliothèque d'État de Russie reste donc intouché, comme la relique profane d'un temps révolu.

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