TOUT EST DIT

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vendredi 7 juin 2013

Prudence et tolérance

Prudence et tolérance


On ne sait pas si Clément Méric est mort en raison de ses idées politiques. On ignore les intentions, au moment des faits, d'agresseurs qui, seule certitude, appartiennent à un mouvement extrémiste de skinheads.
L'affaire de la profanation du cimetière de Carpentras, il y a vingt-trois ans, qui fit descendre, y compris un président de la République, dans la rue, devrait nous inciter à la prudence : évitons les sentences et les extrapolations définitives avant de connaître la véracité des faits ! Surtout lorsqu'elles émanent de ceux-là mêmes qui contribuent à enrichir le terreau sur lequel pousse l'ivraie.
Mais, fortuit ou non, il y a eu un drame. Et ce drame provoque une onde de choc politique dont l'ampleur traduit une inquiétude générale et fondée : il existe, en France, comme ailleurs en Europe, une extrême droite violente qui se sent pousser des ailes.
Ces groupes drainent assez peu de monde : quelques centaines de personnes dans les grandes villes, quelques milliers au plan national. Mais leur capacité à nuire dépasse leur nombre. Et leur résurgence traduit un climat dégradé.
Depuis qu'il présente un visage fréquentable, le Front national a ouvert un espace sur sa droite. Le parti de Marine Le Pen ne contrôle plus ces groupuscules violemment nationalistes et racistes que Jean-Marie Le Pen gardait sous son influence.
Devenus des électrons libres, ces individus évoluent dans des groupuscules nombreux, mouvants, aux appellations changeantes selon les villes et les circonstances. L'idée de les interdire est louable. Sauf qu'aucun décret ne détruit la bêtise humaine et qu'aucun curseur ne permet de délimiter le bon et le mauvais extrémisme.
L'affaire de tous
De l'espace - seconde explication de leur développement - ils en trouvent aussi dans les médias, spécialement sur Internet. L'insulte ad hominem et la haine collective qui circulent sur les réseaux sociaux révèlent l'état d'intolérance à l'oeuvre dans les tréfonds du pays. Elles illustrent aussi une impunité et une libération de la parole qu'aucune loi n'endigue plus. Cette intolérance peut produire les pires effets sur des individus fragiles et potentiellement violents.
Enfin, le climat politique et social donne du grain à moudre à cette sinistre idéologie. La crise nourrit le nationalisme primaire. La dureté du discours politique, où l'insulte le dispute trop souvent à l'allusion douteuse, autorise tout dans le débat. La radicalisation de la vie politique expose les mouvements de masse, comme La manif pour tous, à des dérives incontrôlables et à des provocations violentes.
Même si les auteurs de l'agression sont arrêtés et, demain, jugés, il ne faudrait pas, à présent, qu'à la haine réplique la revanche. C'est-à-dire que la réponse à ce climat délétère soit le contraire de la politique qui reste l'unique moyen d'organiser une vie collective pacifique.
Il en va de la responsabilité de tous : des partis à cesser les surenchères ; du pouvoir à réconcilier les Français, ce qui était l'objectif de François Hollande ; et de chacun à s'informer et à réfléchir deux minutes avant de juger, de condamner, d'injurier, d'exclure. Puisse Clément Méric être mort pour la tolérance.

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