TOUT EST DIT

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vendredi 22 février 2013

Le chanoine François Hollande


Il a accepté le titre de chanoine de Saint-Jean-de-Latran. “Par tradition”, dit-il. Mais qui est-il ? Respectueux de la France “fille aînée de l’Église” ou croisé de la laïcité ?
La question qui se pose ces jours-ci à l’Élysée est la suivante : le président de la République se rendra-t-il à la messe d’inauguration du pontificat du successeur de Benoît XVI ? Cette question n’est pas anodine après les remarques faites par le chef de l’État lors de l’annonce par le pape de sa renonciation. « Une décision éminemment respectable », disait-il d’abord, avant d’assurer qu’il laissait « l’Église catholique déterminer comment elle entend organiser la succession ». Jusque-là, tout allait bien. C’est ensuite que François Hollande s’est laissé aller : « Nous ne présentons pas de candidat », a-t-il cru bon d’ajouter. Ce n’était que de l’humour, a-t-on dit. Mais sous la “blague” perçait une ironie déplacée. Plus même, de l’indifférence, voire du mépris. Observant les dégâts dans l’opinion, les conseillers du président se sont empressés de fournir une explication : au moment où la droite l’accusait de vouloir placer partout ses “copains”, là justement, il n’en avait pas… L’explication était pire que la “blague”.
Élevé par un père de droite et une mère de gauche, mais tous deux catholiques, François Hollande aura passé ses années d’enfance et d’adolescence dans un établissement des Frères des écoles chrétiennes, à Rouen, puis chez les jésuites. Serge Raffy, son biographe, le décrit comme rebelle à cette éducation, mais jouant les élèves pieux, faisant ses deux communions, se soumettant « en apparence à toutes les règles », trouvant « la ruse pour éviter d’être promis à la damnation : il arbore un sourire étincelant ». Bref, « il est le roi de l’esquive ». Où est le vrai ? Or c’est durant ces années-là que se construisent un caractère et une personnalité. « Le style, c’est l’homme, dira plus tard François Hollande ; le style, c’est le président. »
C’est une première sous la Ve République : ce gouvernement de trente-huit ministres ne compte aucun catholique assumé ; nombre d’entre eux sont baptisés, certains mêmes mariés à l’église, mais aucun ne se signerait en public, “laïcité” oblige. Durant sa campagne d’entre les deux tours de la présidentielle, le 28 avril 2012 à Limoges, François Hollande affichait sa conception de la laïcité par opposition à celle de Nicolas Sarkozy : « Nous ne dirons jamais que le prêtre ou le pasteur a une autorité supérieure à l’instituteur et au maître ! Nous ne dirons jamais que la laïcité doit être ouverte et tolérante, parce que la laïcité, par définition, est ouverte et tolérante. » Comme si cela allait de soi, quand la laïcité de gauche a toujours été, par nature si ce n’est par définition, tolérante avec son électorat, intolérante avec ceux qui n’en sont pas.
Le roi Henri IV, qui voulut de toutes ses forces mettre fin aux guerres civiles entre Français, légua à ses successeurs le titre de chanoine honoraire de la basilique Saint-Jean-de-Latran. Un titre de protecteur et de pacificateur. Tous les présidents de la République l’ont porté. Sans remonter plus loin, le général de Gaulle plus encore que les autres, qui se rendit au Vatican dès 1944 auprès de Pie XII, puis auprès de Jean XXIII et de Paul VI. Valéry Giscard d’Estaing de même et dès 1975 ; Jacques Chirac aussi qui alla en visite officielle à Rome peu après son élection, avant d’assister aux obsèques de Jean-Paul II et à l’intronisation de Benoît XVI. Le 20 décembre 2007, Nicolas Sarkozy se rendit à son tour au Latran, dans cette « cathédrale du pape, la mère de toutes les églises de Rome et du monde », selon ses propres mots, pour y rappeler les « racines chrétiennes de la France ». François Mitterrand, l’inspirateur et le mentor de François Hollande, alla lui aussi au Vatican rencontrer le pape Jean-Paul II, dès le 28 février 1982, en précisant qu’il s’agissait d’une « visite privée ». Mais quand il accueillit l’année suivante le pape qui se rendait à Lourdes, il salua « l’homme qui porte les grandes causes qui donnent son sens à la vie ».
François Hollande a dit qu’il acceptait (sans avoir rendu visite au Saint-Siège) le titre de chanoine de la basilique Saint-Jean-de-Latran, « au nom de la tradition ». Laquelle ? Celle de la « France, fille aînée de l’Église » ? Mais s’il en est ainsi, pourquoi a-t-il provoqué l’Église au sujet du mariage, pourquoi veut-il inscrire la loi de 1905 dans la Constitution, alors que l’article 1er de celle-ci affirme déjà que la République est « laïque » et qu’elle « respecte toutes les croyances » ? La moindre des choses que l’on puisse attendre d’un président de la République serait qu’il soit le défenseur de la Constitution, y compris à l’égard des catholiques de ce pays.
À la radio, le mercredi à 8 h 50 sur France Info dans le Duel des éditorialistes ; à la télévision, le jeudi à 10 h 10 sur LCI dans Choisissez votre camp et le lundi 25 à 19 heures, chez Michel Field.

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