TOUT EST DIT

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lundi 17 décembre 2012

Hollande peut dire merci à Depardieu !

Dans une lettre ouverte adressée à Jean-Marc Ayrault, qui avait qualifié de "minable" son exil en Belgique pour des raisons fiscales, Gérard Depardieu écrit qu'il n'a "plus rien à faire en France" et accuse le gouvernement de vouloir "sanctionner" la réussite. Votre parti pris : François Hollande peut dire merci à Depardieu. Pourquoi donc ?
Au moment où la politique économique du gouvernement entretient le malaise dans sa majorité, le départ de Gérard Depardieu est une aubaine politique. Son attitude - égoïste et provocatrice - ressoude la gauche autour d'un thème fédérateur, que François Hollande a pu donner l'impression d'oublier depuis son élection : la taxation des riches. Qu'un personnage aussi célèbre, aussi fortuné - et qui en plus a bruyamment soutenu Nicolas Sarkozy - s'exile pour payer moins d'impôts, c'est le symbole inespéré d'une politique qui serait donc plus à gauche qu'on le dit. C'est donc une perte de recettes fiscales, mais le retour d'une recette politique...
Vous voulez dire que l'adjectif "minable" qu'a utilisé Jean-Marc Ayrault à propos de Gérard Depardieu peut avoir des vertus politiques ?
Sur le fond, le Premier ministre a raison de dénoncer le procédé : Depardieu s'installe tout près de la frontière pour aller en France aussi souvent qu'il le voudra, mais sans y avoir sa résidence au sens fiscal. Oui, il y a de la petitesse dans cette attitude - et de la déloyauté envers son pays. Sur la forme, Jean-Marc Ayrault a fait avec Depardieu ce qu'Arnaud Montebourg a fait avec Mittal - même s'il le lui avait reproché. Comme c'est surtout le ministre qui a tiré les bénéfices politiques de l'affaire de Florange, on peut supposer que Jean-Marc Ayrault a voulu lui aussi montrer qu'il est capable d'augmenter les taxes, mais aussi de hausser le ton.
Dans sa lettre, Gérard. Depardieu se justifie avec ces mots : "Je pars parce que vous considérez que le succès, la création, le talent, en fait la différence, doivent être sanctionnés." Est-ce que c'est forcément un argument irrecevable ?
Tous les millionnaires ne sont pas des rentiers et c'est vrai qu'une partie de la gauche tient un discours agressif et punitif envers les riches qui est malsain. Mais Depardieu s'honorerait à considérer que l'impôt est un acte de solidarité. Il pourrait aussi convenir que, quel que soit son talent, il a bénéficié du système français - notamment des aides au cinéma, qui ont financé beaucoup de ses films avec l'argent des Français. Il répond qu'en 45 ans il a payé 145 millions d'euros au fisc. Soit. Ça veut dire que jusqu'ici il trouvait qu'il payait assez. Et que, maintenant, il en a assez de payer. C'est son droit.
Un député PS a proposé de retirer la nationalité aux exilés fiscaux. Est-ce que le gouvernement peut trouver une parade à des départs de ce type ?
Il n'y a que les États-Unis qui font un lien entre l'impôt et la nationalité - ce qui permet de taxer les expatriés. Notre système à nous est fondé sur le lieu de résidence. Pour suivre l'exemple américain, il faudrait renégocier des conventions fiscales avec tous les pays du monde. Le gouvernement veut le faire avec la Belgique, la Suisse et le Luxembourg (destinations préférées de nos exilés fiscaux), mais ça prendra plusieurs années. Et ça ne changera rien au fait que les entreprises du CAC 40 profitent des écarts de fiscalité au sein de l'Europe pour réduire des deux tiers leur impôt sur les bénéfices. Comme l'exil de Depardieu, c'est légal. Mais on n'en fait pas tout un cinéma. On a tort.

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