TOUT EST DIT

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lundi 15 octobre 2012

IEP : Institut d'Études Politisé

Le refus de laisser son financement à la charge de ceux qui en bénéficient pour le faire peser sur tous les contribuables est le meilleur moyen d'enfermer l'enseignement dans un vase clos de la pensée étatiste.
La disparition du directeur de l'IEP Paris et le rapport préliminaire de la Cour des Comptes sur la gestion de l'établissement donnent lieu à de nombreux débats, et certains aimeraient en profiter pour donner toujours plus de place à l’État dans l'enseignement supérieur. Là où la mise à contribution des étudiants et les partenariats avec des entreprises permettent de faire financer les établissements par ceux qui bénéficient de l'enseignement et de rapprocher les étudiants du monde du travail, il faudrait que l’État s'immisce pour toujours plus de contrôle et aux frais du contribuable pour déboucher sur une issue constructiviste.

La Cour des Comptes fait un constat qu'elle devrait étendre à de nombreux pans de l'intervention de l’État : "l'absence de tout contrôle exercé par l’État, pourtant principal financeur de la fondation, apparaît particulièrement fautive".
Plutôt qu'un appel à un État vigilant sur ses dépenses pour éviter que le poids qu'il fait peser sur l'économie soit un fardeau inutile, Nicolas Robin, président de l'UNEF Sciences Po et Arnaud Bontemps, vice-président du Conseil de direction de l'IEP de Paris, auteurs d'une tribune dans Le Monde, préconisent un État qui s'immisce dans la gestion, au motif que le financement par les bénéficiaires de l'enseignement serait dangereux : "La réduction actuelle de la part du financement public par rapport à celle du financement privé de l'établissement est ainsi porteuse de dangers réels, tant sur l'ouverture sociale que sur l'indépendance de l'établissement".
Leur raisonnement illogique stipule que les frais de scolarité variables selon le niveau de revenus – fondamentalement injuste par ailleurs – oblige l'établissement à comporter une part dans ses effectifs d'étudiants issus de milieux aisés. Ainsi, le financement par les plus aisés des autres rend l'établissement dépendant de leur financement :
Une des raisons majeures de cette réduction provient de l'explosion des frais de scolarité, calculés sur la base du revenu de la famille de l'étudiant. Sur la période 2003-2012, leur plafond a triplé, passant de 4000 à 13 500 euros annuels. Ces frais de scolarité représentent aujourd'hui un quart des ressources de l'établissement, et leur augmentation continue est allée de pair avec un financement décroissant de l’État par étudiant. Sachant que les boursiers sont exonérés de frais de scolarité, ce modèle de financement n'est viable qu'à la condition de garder une proportion importante d'étudiants payant des frais de scolarité élevés. 20% des étudiants, issus de familles disposant d'un revenu supérieur à 200 000 euros par an pour une famille avec deux enfants, ainsi que les étudiants dont le foyer fiscal est situé en dehors de l'Espace économique européen, paient aujourd'hui le montant maximum de frais : sans ce "quota" d'étudiants très aisés ou étrangers, l'établissement ne pourrait plus se financer, ce qui rend la diversification sociale du corps étudiant impossible.
La "diversification du corps étudiant" telle que conçue dans leur logique constructiviste est donc impossible : pour faire entrer plus d'étudiants issus de milieux modestes, il faut maintenir une part d'étudiants payant plus cher pour les financer. La diversité est donc pour eux uniquement mesurée à la part d'étudiants de milieux modestes…
Aussi peu souhaitable à leurs yeux que la présence d'étudiants de milieux aisés est celle des entreprises finançant l'établissement :
La solution de plus en plus souvent évoquée par les dirigeants de Sciences Po consiste à se tourner vers le mécénat d'entreprise. Alors qu'un logo L'Oréal orne déjà le hall d'entrée de l'Institut, il ne faut pas avoir peur de poser la question de l'influence que peuvent porter ces financeurs - rarement désintéressés - sur les contenus académiques et sur l'orientation des enseignements. Un établissement d'enseignement supérieur, de surcroît lorsqu'il prétend incarner un modèle institutionnel et pédagogique pour l'ensemble du milieu universitaire, ne peut risquer à ce point de sacrifier son indépendance scientifique.
On sent bien l'indépendance "scientifique" des auteurs quand ils appellent à faire financer l'établissement uniquement par l’État. C'est alors qu'intervient le collectivisme si cher à nos deux compères :
Les ménages et les entreprises doivent être mis à contribution, mais cette contribution ne saurait garder la forme directe qu'elle revêt actuellement. C'est bien au contraire par la solidarité nationale, à travers l'impôt, que doit être financé l'enseignement supérieur. Il revient donc à l’État d'assurer un financement suffisant à Sciences Po, comme au reste de l'enseignement supérieur. Ce financement public doit aussi mettre le gouvernement en position de rappeler à Sciences Po ses obligations et missions de service public […] en particulier en ce qui concerne la démocratie et l'ouverture sociale.
Le financement par l’État – toujours dans ce souci d'indépendance scientifique – permettra également à l’État de décider de tout, partout, pour tout le monde. Et à mettre en place notamment une "ouverture sociale" unilatérale. Ils admettent pourtant que la diversité s'est accru ces dernières années : "Les efforts d'ouverture sociale de Sciences Po doivent être repensés et amplifiés. Au-delà des critiques de la Cour des comptes, l'évolution de la composition sociale de l'IEP traduit une diversification de ses étudiants".
Et pour ajouter un peu de piment à l'article et pour que leurs coreligionnaires s'y retrouvent, les auteurs ont sellé leur cheval de bataille constructiviste favori, la reproduction des élites : "Cette politique de démocratisation doit s'étendre, car elle permet d'éviter que, la sélection favorisant les jeunes issus des catégories sociales supérieures, l'établissement ne s'ancre trop dans une logique de reproduction des élites."
À la reproduction des élites, les auteurs préfèrent leur concentration, en donnant toujours plus de place à l’État dans la gestion de tous les pans de la vie des citoyens, de l'école au cimetière. Le refus de laisser son financement à la charge de ceux qui en bénéficient pour le faire peser sur tous les contribuables est le meilleur moyen d'enfermer l'enseignement dans un vase clos de la pensée étatiste, dont il souffre aujourd'hui et qu'illustrent les auteurs.
"Au fond, le débat qui s'ouvre sur le statut de Sciences Po et sa place dans l'enseignement supérieur français doit déboucher sur une issue constructive." On ne peut qu'être d'accord ; il faut veiller à ce que l'issue soit constructive, et non constructiviste.

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