Les polémiques qui s’enchaînent et se ressemblent, ont une fonction bien précise : celle de leurre médiatique pour détourner l’opinion des tourments et des dangers de notre époque.
La dernière en date, par exemple, concernant une supposée interdiction « du voile et de la kippa » dans la rue, accapare l’actualité depuis vendredi. La proposition est sans intérêt, totalement irréaliste, revenant à interdire de sortir de chez soi autrement que tête nue… (comment prouver l’intention religieuse de telle ou telle coiffe?) Le FN nage dans ses contradictions, lui qui fustigeait deux ans plus tôt l’interdiction de la burqa par le gouvernement de l’époque: « Nicolas Sarkozy continue d’amuser la galerie en annonçant aujourd’hui une loi d’interdiction de la burqa » disait du chef de l’Etat le leader de ce mouvement. Qui amuse aujourd’hui la galerie avec des futilités ? L’ensemble de la classe politico-médiatique: le parti lepéniste tout d’abord, sur un mode typiquement politicien, ne songeant qu’à faire parler de lui à tout prix ; et face à lui, une nomenklatura qui n’adore rien tant que de s’enflammer pour des sornettes et de jouer le choeur des vierges effarouchées.
Pendant ce temps, on ne dit plus rien, ou presque, des drames de notre temps : le désastre économique et les trois millions de chômeurs, la crise de l’éducation, l’insécurité, le drame des banlieues et de l’immigration non maîtrisée, la pétaudière internationale. Voilà qui arrange tout le monde !
Moi, je pense souvent aux générations de 1914 et de 1939, qui avançaient à l’aveuglette vers des cataclysmes dont elles n’avaient pas la moindre idée. Le feu couvait sous la cendre mais nul n’avait la moindre idée de l’ampleur ni de la tournure des évènements qui se tramaient. Le même mur opaque de l’imprévisible nous prive de toute idée de l’avenir proche ou lointain et des gouffres qui s’ouvrent devant nous. Nous n’avons pas la moindre raison objective de penser que le XXIème siècle sera moins atroce et moins sanglant que son épouvantable prédécesseur.
Les ingrédients d’une tragédie planétaire sont peut-être, (qui sait ?) réunis devant nous, par exemple dans le chaos généralisé qui sévit au Maghreb et au Moyen Orient, à quelques milliers de kilomètres de chez nous et la perspective d’une attaque contre Israël qui enclencherait une logique de déflagration mondiale. Qui songe à anticiper les scénarios du pire, à mobiliser les consciences, à préparer le pays, ses forces vives, son armée? Nous sommes à moins de deux ans du centenaire d’août 1914, cette échéance symbolique du début de la grande guerre et de tous les drames du XXème siècle. Sans verser dans le lyrisme ni la superstition, les derniers mois qui précèdent l’an 2014 se prêtent à une prise de conscience du caractère infiniment fragile, précaire et menacé, de ce trésor qu’est la paix.
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