vendredi 31 août 2012
Quelle voix pour la France ?
Pourquoi la France est-elle impuissante - sinon absente - face aux
événements de Syrie ? Certes, le ministre des Affaires étrangères et le
président français s'égosillent à demander le départ d'Assad. En vain.
Soutenu par la Russie, l'Iran et la Chine, le régime syrien se maintient
et semble gagner du terrain sur les insurgés. Ces derniers, pourtant,
sont régulièrement alimentés en armes, en hommes et en matériel par le
Qatar et l'Arabie saoudite, qui appuient partout où ils le peuvent les
salafistes aussi bien que les islamistes, faisant passer ces derniers
pour des modérés aux yeux de l'opinion publique.
À l'Onu, Russes et Chinois rendent un fier service aux Occidentaux en
opposant régulièrement leur veto à toute résolution laissant poindre
une intervention internationale en Syrie. Serions-nous prêts à envoyer
nos soldats, avions et navires de guerre en Méditerranée ? L'armée
syrienne est loin d'être aussi inefficace que l'armée libyenne.
Aujourd'hui, la Libye est déchirée entre tribus et régions qui
veulent toutes une part du gâteau. La situation en Syrie est
différente : mosaïque d'ethnies - Circassiens, Turkmènes, Kurdes - et de
religions - chrétiens rattachés ou séparés de Rome, sunnites
(majoritaires), chiites alaouites, druzes ou chiites ismaéliens - le
pays est menacé d'éclatement, à l'instar de l'Irak. Tout cela n'explique
pas toutefois l'impuissance de la France, hier encore puissance de
référence au Levant.
En février 2005, lors du tragique assassinat de Rafic Hariri, ancien
président du Conseil du Liban, Jacques Chirac, qui connaît pourtant bien
la région, s'était laissé emporter par l'émotion et la passion causées à
juste titre par la perte d'un « ami » très « cher », accusant
immédiatement les Syriens d'être les commanditaires de l'attentat.
Peut-être ! Sans doute ! Mais l'enquête n'avait pas encore commencé !
La France, dont la force dans cette région était de parler avec tout
le monde, ne parlait plus avec les Syriens. Elle ne parlait déjà plus
avec l'Iran, pourtant puissance régionale incontestée, alliée de la
Syrie et contrôlant le Hezbollah au Liban. Elle ne parle plus avec une
partie des Libyens, certaines tribus et régions s'accrochant à l'ancien
régime tandis que le nouveau tarde à « récompenser » les pays qui l'ont
installé ! La France ne parle pas souvent avec l'Algérie dans un
perpétuel jeu du « je t'aime moi non plus ». Elle a du mal à parler avec
les Irakiens. Elle a du mal à établir un dialogue avec l'Égypte,
nouvelle tombée dans l'escarcelle des Frères musulmans. Elle a perdu son
rôle, sa crédibilité et l'efficacité de ses médiations.
Mais plus que tout cela, la France protectrice des chrétiens dans les anciennes provinces de l'Empire ottoman depuis François Ier
se voit désormais contestée avec succès dans ce rôle par Vladimir
Poutine. Le « Tsar russe » ne cache pas son ambition de prétendre être
désormais le défenseur des chrétiens d'Orient. À travers la diplomatie
de l'État russe, mais également celle de l'orthodoxie et des popes.
Selon un adage levantin, il n'y a pas de guerre possible au
Proche-Orient sans l'Égypte et il n'y a pas de paix possible sans la
Syrie. Certains n'hésitaient pas à ajouter qu'il ne pouvait y avoir de
stabilité sans une présence française, rempart contre les velléités
hégémoniques anglo-saxonnes. Cette sentence ferait-elle déjà partie du
passé ?
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