samedi 14 juillet 2012
Peugeot et le socialisme
On ne parlera pas, cette année, de torpeur de l’été. A la veille du
14 Juillet et du premier grand rendez-vous médiatique du nouvel occupant
de l’Elysée avec les Français, patatras, mauvaise nouvelle. Peugeot,
qui puise actuellement dans sa trésorerie à hauteur de 200 millions
d’euros par mois, selon le directeur général des marques PSA,
Frédéric Saint-Geours, entend supprimer 8 000 emplois en France – sans
licenciements secs, promet son patron –, ce qui entraînera la fermeture
de son site historique d’Aulnay, en Seine-Saint-Denis.
L’affaire est politique. Najat Vallaud-Belkacem, porte-parole du gouvernement, accuse PSA
d’avoir tu une décision prise depuis longtemps pour éviter au
gouvernement précédent de « subir les foudres en pleine campagne
électorale d’une telle annonce ».
Affaire politique ? Cela pose la question du rôle de l’Etat dans ce
genre de situations : faut-il – comme le préconise Marine Le Pen, l’une
des premières responsables politiques à avoir réagi à l’annonce – que
l’Etat « monte au capital de PSA » ? Le président du directoire du
groupe, Philippe Varin, a aussitôt rejeté cette solution.
Marine Le Pen a également demandé que l’Etat « s’affranchisse des
règles ultralibérales de l’Union européenne et mette immédiatement en
place un plan national de soutien à la filière automobile française »,
en protégeant notamment l’industrie de la « concurrence internationale
déloyale ». « En ce sens il faut se doter des instruments d’un
protectionnisme intelligent : droits de douane et quotas
d’importation. »
De fait le problème auquel fait face le groupe PSA
est le fruit de plusieurs facteurs où la délocalisation de la
production des modèles bas de gamme, dont la production en France coûte
trop cher, l’insuffisant prestige des véhicules haut de gamme face aux
géants allemands notamment, et la saturation du marché français et
européen où la concurrence est rude, créent un contexte des plus
difficiles.
L’Etat, qui n’est pas par nature constructeur automobile, ni
spécialiste en marketing, ni en mesure de dire aux Français qu’ils
pourront acheter une voiture de leur choix, pourvu que ce soit une
Peugeot ou une Citroën fabriquée en France, n’est décidément pas la
solution.
Ce dont souffre Peugeot, ce n’est pas d’un manque de savoir-faire, ni d’un besoin d’aide directe de l’Etat. Le patron de PSA,
Philippe Varin, ne souhaite pas une nouvelle prime à la casse : « C’est
du dopage, ce sont des prix cassés, on ne va pas acheter deux fois les
voitures. » Non : il plaide pour que « la capacité d’innovation de cette
filière puisse se réaliser », et pour cela, il faut une baisse
« massive » du coût du travail en France. Ce n’est pas que Peugeot
manque de sécurité financière, ni d’usines qui marchent, ni de clients :
l’entreprise produit bien à l’étranger et les marchés étrangers lui
sont ouverts.
Ce sont les lois sociales, les charges, les 35 heures, la
socialisation de l’économie et tout ce qui est au service de
l’Etat-nounou – largement financé par les entreprises – qui entravent la
marche normale de l’entreprise en France, en somme. « Pour restaurer
nos marges, il y a une marge de flexibilité sur le coût du travail. Nous
avons le coût du travail le plus cher en Europe et nous produisons 44 %
de notre production en France, donc il faut baisser les charges qui
pèsent sur le travail de manière massive. » 44 %, c’est plus que n’en
fait Renault…
Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, a préféré parler du « devoir » de PSA
Peugeot Citroën « vis-à-vis de la nation France ». Mais c’est d’abord
le gouvernement qui a un devoir vis-à-vis de la nation France. Le devoir
de ne pas laisser l’Etat prendre une place démesurée.
Le travail et l’économie au service de l’homme ? Au service du
patriotisme ? Cela ne peut fonctionner que dans le cadre d’une
entreprise qui réussit sur le plan économique et financier, sans être
entravée par l’idéologie à la fois mondialiste et socialiste qui empêche
d’agir en fonction de la complexité du réel.
Les syndicats, et spécialement la CGT, s’annoncent combatifs. « On va devenir le pire cauchemar de Peugeot », clame Jean-Pierre Mercier, délégué CGT
à Aulnay-sous-Bois. Et à Varin, « on va lui faire la guerre ». Langage
qui en dit long sur la difficulté de faire fonctionner une entreprise
dans une logique de lutte des classes. Casser le patronat ne peut
aboutir qu’à casser l’entreprise…
On reproche aussi à PSA de distribuer des dividendes à ses actionnaires et de licencier quand même. Usine nouvelle apporte un éclairage intéressant, en soulignant que PSA
« ne fait pas d’argent en tant que constructeur depuis longtemps »,
avec des marges quasi inexistantes. « Et quand les salariés affirment
que les bénéfices partent à 50 % dans la poche des actionnaires, ce
qu’ils oublient de dire c’est que ce ne sont pas les usines qui génèrent
ces revenus mais la banque PSA Finance et son activité de crédit », ajoute le journaliste.
Comme quoi il est imprudent de juger sur des apparences…
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