TOUT EST DIT

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lundi 30 avril 2012

Mettons que Hollande soit élu président... (ou le triomphe du relativisme culturel)

Denis Tillinac imagine une France dans laquelle le candidat PS est élu. Un cauchemar pour l'écrivain qui craint de voir "démonétiser le sens de l'honneur, de l'altitude, de l'aventure et de l'humour" au cours de cet éventuel quinquennat à venir.

Mettons que François Hollande soit élu président.
Aubry, Fabius, Montebourg, Joly, Duflot, Mélenchon et consorts le laisseront régner, mais pas  gouverner. La France sera à la merci d'un mixe d'idéologues obtus, de snobinards parisianistes et de notabilités régionales prudhommesques. Les pulsions inquisitoriales des militants et le clientélisme bananier des ducs, comtes et marquis  « décentralisés » produiront un univers grisaillant de planqués serviles et de tartufes coincés. La police du langage prohibera toute allusion au fuselage d'une minette (sexisme), toute présomption d'une supériorité esthétique de Vermeer sur le tag, de Mozart sur le rap (élitisme discriminant). Le propos de hiérarchiser tant soit peu les goûts et les couleurs, voire de présumer qu'une marge implique une norme, sera tenu au mieux pour  « réac », au pire pour  « facho » . Une flicomanie sournoise enténèbrera le pays de Rabelais, du Cid de Corneille, du Cyrano de Rostand, de la môme Piaf et de Gabin dialogué par Audiard. Une bigoterie fielleuse s'évertuera à démonétiser le sens de l'honneur, de l'altitude, de l'aventure et de l'humour.
La gauche ruinera la France avec la pharmacopée en usage auprès des incurables et des dépressifs : morphine des emplois bidons (« culture », « communication »), Prozac de l'« animation » depuis la crèche jusqu'à la maison de retraite. Caser son rejeton ad vitam dans un bureau quelconque d'une collectivité territoriale sera le must des ambitions parentales. L'animateur « socio-cul » à catogan et oreille baguée et le journaliste frotté de « sciences humaines » seront les anesthésistes au quotidien d'un peuple jadis gai, fécond et indocile. Leur catéchisme sirupeux, d'un pharisaïsme qu'un Peguy, un Bernanos ou un Mauriac auraient vomi, fragmentera le tissu social en « minorités » dont les revendications seront par principe « légitimes ».
En vertu du même principe, les aspirations de la majorité dite silencieuse, et pour cause, seront non avenues. L'invocation d'une filiation, d'un genre, d'un terroir ou d'une affinité élective sera suspecte et le recours à la mémoire historique, strictement encadré par le clergé des bulletins paroissiaux (Libé, L'Obs, Télérama, Médiapart, France Culture...).
Il sera périlleux d'afficher du respect pour l'intériorité, de l'appétence pour le panache, de la sympathie pour Saint-Louis sous son chêne, Jeanne-d'Arc à Orléans, Bayard à Marignan, Bonaparte au Pont d'Arcole. Et même pour De Gaulle, réputé factieux en son temps par les consciences de la gauche (Mitterrand, Mendès, les communistes, etc.). Le patriotisme sera taxé de « xénophobie » franchouillarde s'il s'abreuve à d'autres sources que le droit du sol, la  « laïcité » selon le père Combes et la défense des langues régionales.Tout enracinement affectif dans la mythologie et la poétique de la France sera coupable de péché mortel contre l'esprit cosmopolite; il faudra taire notre dû à la civilisation occidentale sous peine d'être expédiés dans l'enfer des esclavagistes, des colonialistes, des impérialistes, et caetera. Mieux vaudra pour mendier une subvention se targuer d'un pélérinage au mur des Fédérés qu'à la cathédrale de Chartres ou à Colombey-les-deux-églises. Bien entendu l'allusion la plus précautionneuse à l'impact éventuel des flux migratoires sera passible d'une mise en parallèle avec le racisme des nazis. Rien de moins. Autant dire que le sens des distinguos et des nuances sera décoté à la bourse des convenances. Tout se vaut, tout s'équivaut : de ce présupposé inepte, nul ne sera cencé s'affranchir.

Mettons que Hollande soit élu président.
L'arrosage aura une fin et les hochets du « sociétal » (mariage homo, euthanasie, etc.) n'abuseront pas indéfiniment des militants qui ont biberonné le lait sûri du ressentiment. Tôt ou tard, ils exigeront des bûchers et des potences pour assouvir leur frénésie de ratiboisage par le bas. Mais les vrais « riches » ayant décampé depuis belle lurette, vers qui, vers quoi orienter leur vindicte ? Vers le « réac » et le « facho », soit. Mais ces mots qu'on croirait exhumés d'un manuel de démonologie médiévale qualifient à peu près n'importe quel voisin de palier ou de bureau. On le débusquera. On le dénoncera. Chacun sera le réac d'un autre, le double mauvais de sa propre rancoeur. Ça promet des moeurs de vicelards qui s'épieront derrière leurs persiennes. Ça promet pire que la ruine : le deuil de toute jouvence, la réclusion dans un ennui nauséeux. Ça promet une manière de pétainisme rosâtre et verdâtre, frangé de rouge, un pétainisme bio et soft mais pas clean où l'on s'emm...comme des rats morts.
Mettons que Hollande soit élu président.
Il n'aura pas voulu ce désastre mais le vin de la haine étant tiré, il le boira jusqu'à la lie, pour survivre en son palais. Les insoumis s'en tireront mieux que lui car les nihilistes  de l'« ordre moral » socialiste n'oseront pas mettre à l'index notre patrimoine spirituel, intellectuel et esthétique bien qu'il soit très majoritairement « élitiste » et assez foncièrement « réac ». Ni fermer les bonnes auberges où les vins ont le goût du pays. Ni attenter à nos jardins secrets, où l'âme de la France continuera de rayonner. A leur insu puisque l'âme n'a pas droit de cité dans le réduit bétonné de leur imaginaire. Ils nous débineront, ils nous excommunieront mais nous sommes trop nombreux pour qu'ils nous embastillent. Dans l'exil intérieur où ils croiront nous enclore, l'ironie sera notre clé des champs ; nous filouterons du bonheur entre les mailles de leur « social ».
Mettons que j'ai cauchemardé et que Sarkozy soit réélu.
Tout n'ira pas au mieux dans le meilleur des mondes, il s'en faudra de beaucoup. Au moins sera conjurée pour un temps la menace d'une torpeur sans rêve dans la morne bienséance d'un cléricalisme de basse saison.


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