TOUT EST DIT

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vendredi 10 février 2012

Panne verte 

Eva Joly ruine, dans les deux sens du terme, les espoirs de ses amis. Créditée d'un résultat (2 %) proche de la marge d'erreur, elle affaiblit politiquement son parti, incapable d'imposer l'écologie dans le débat présidentiel. Et elle l'épuise financièrement avant les législatives. Daniel Cohn-Bendit avait raison : plutôt que de concourir dans une épreuve sans influence sur le fond, mieux valait négocier des circonscriptions pour peser au Parlement. L'échec pressenti risque même de compromettre l'accord PS-Verts. Quel socialiste acceptera d'avoir été sacrifié au profit d'écologistes aussi faibles ? Après la révision à la baisse de son budget de campagne ¯ en dessous de 5 % des suffrages, la dépense n'est pas remboursée ¯ la question du maintien d'Eva Joly se pose. Pour plusieurs raisons qui ne tiennent pas qu'à sa personne. Une élection si personnalisée ne correspond pas à la culture des écologistes. Dans un jeu plus collectif, comme le scrutin de liste des élections européennes, ils savent capter une opinion inquiète du réchauffement climatique ou du pillage de la planète. À l'inverse, ils ont toujours réalisé des petits scores à la présidentielle. Seconde explication, la fusion entre les Verts « canal historique » et Europe Écologie, composée de mouvements d'origines diversifiées, ne se passe pas aussi bien qu'espéré. On l'avait vu lors de la primaire : la défaite de Nicolas Hulot au bénéfice d'Eva Joly témoignait déjà d'un contrôle d'EELV par les Verts. En fait d'élargissement du mouvement, on a plutôt assisté à un recentrage sur son noyau dur. Troisièmement, la crise a modifié la hiérarchie et l'urgence des préoccupations. Les électeurs sont plus préoccupés par le chômage, le prix du logement, le pouvoir d'achat que par un changement de mode de vie qui apparaît ¯ provisoirement ? ¯ comme un luxe. Pour l'heure, les engagements de François Hollande sur le nucléaire leur semblent un risque suffisant. Quatrièmement, il faut beaucoup de temps pour sortir d'une thématique spécialisée et proposer, comme ce sera la cas ce samedi, un projet de gouvernement global et crédible. L'exercice est d'autant plus difficile que les partis traditionnels ont, eux, verdi leurs programmes et que la conjoncture ¯ la crise financière, la compétitivité, etc. ¯ crée des exigences qui peuvent sembler bien lourdes pour être renversées par les réponses écologistes. Tout bien examiné, la personnalité d'Eva Joly n'est qu'un élément conjoncturel. On peut toujours regretter l'élimination de Nicolas Hulot. Mais même la star d'Ushuaïa aurait éprouvé la différence entre une cote d'amour et un résultat électoral. L'ex-juge, quant à elle, découvre la violence d'un combat qu'elle affronte avec un handicap qui va bien au-delà de son style, objet d'attaques insultantes. Eva Joly a une pensée globale qui relie constamment le village et la planète, l'oppression sociale et l'exploitation des richesses, les appétits financiers et les ravages environnementaux. Cette réflexion complexe, inadaptée au monde du slogan et aux nouveaux formats médiatiques, la rend inaudible. Et sa méconnaissance des règles de la politique la fait paraître pour sectaire. Ça fait beaucoup pour espérer un score !

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