TOUT EST DIT

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vendredi 9 décembre 2011

Double jeu

Le vote des étrangers « non communautaires » aux élections municipales est une question noble qui appelle un débat noble. S’il y a un sujet où la confrontation d’arguments contradictoires est politiquement légitime et intellectuellement stimulante, c’est bien celui-là. S’il est un choix où se disputent le cœur et la raison, c’est encore et toujours celui-là. Ensuite, quand on aura épuisé toutes les rhétoriques ne resteront que les convictions.

Accorder aux immigrés - parlons carrément - le droit d’élire les conseillers municipaux serait une réforme réaliste et civique. Quand un pays ouvert, comme le reste la France, prétend tous les quatre matins «mieux intégrer», au nom de quelle logique pourrait-on interdire à des résidents en France depuis cinq ans de participer à la vie de la cité ? Pourquoi leur claquer la porte des bureaux de vote au nez quand - il suffit pour cela de vivre le quotidien de la ville ! - on les voit participer aux comités de quartier, agir au sein des associations et même siéger dans les commissions municipales ? C’est bien au titre de ce bon sens-là, et de la perception de la France réelle du XXI e siècle, que Nicolas Sarkozy s’était dit favorable, en 2005, à l’avènement de cette nouvelle catégorie d’électeurs.

Hier au Sénat, le premier ministre a opposé à cet élan spontané, partagé - si on en croit les sondages (mais peut-on les croire ?) - par une majorité grandissante de Français, une très brillante théorie de la citoyenneté. Le chef du gouvernement a été séduisant, et sans doute beaucoup plus sincère que le chef de l’État, mais sa démonstration a été celle d’une nation figée, plutôt sur la défensive, et ouvertement méfiante à l’égard d’un changement dont il redoute à tort ou à raison les dérives communautaristes.

La double instrumentalisation de la controverse a des fins politiciennes n’en est que plus détestable. Entre la déformation grossière d’un texte par un ministre de l’Intérieur qui en gomme sciemment tous les garde-fous, et la tentative de passage en force d’une gauche sénatoriale qui sait que la cause législative est perdue d’avance tant que l’alternance au parlement n’aura pas eu lieu, la définition d’un juste statut pour les immigrés est une fois de plus massacrée, caricaturée et au bout du compte sacrifiée aux petits intérêts électoraux des uns et des autres et à leurs médiocres calculs. Au bout du compte c’est la France de demain qui risque d’être ensevelie sous les bulletins de la facilité.

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