TOUT EST DIT

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vendredi 15 avril 2011

Mobilisation pour Skyrock et son directeur


La radio Skyrock, spécialisée dans la musique rap, première radio de France des moins de 25 ans, radio des « jeunes », donc, est dans la tourmente depuis que, mardi, a été annoncée l’éviction du poste de directeur général de son fondateur Pierre Bellanger. Désormais cantonné à la présidence du conseil d’administration, il se retrouve sans fonction opérationnelle.

Le soir même, Difool, emblématique animateur de la station après avoir été celui de Fun Radio en compagnie du « Doc », appelait les auditeurs à manifester leur soutien à Pierre Bellanger et à se mobiliser pour défendre la liberté d’expression et l’« esprit Skyrock », menacés selon lui par ce départ.

La personnalité de Pierre Bellanger n’est pas anodine. Ecologiste de la première heure (il a été secrétaire général de Génération Ecologie au début des années 1990), pionnier des radios libres, impliqué dans le développement de la blogosphère avec la plateforme Skyblog, il a également été impliqué dans une sordide affaire de corruption de mineure, qui lui a valu, en appel l’année dernière, trois ans de prison avec sursis et 50 000 euros d’amende. Il avait fait entrer dans sa « communauté d’Halcyon », dont il se disait « le maître », une fille de 17 ans, sœur d’une femme avec laquelle il vivait en compagnie de deux autres femmes. Cette jeune fille avait alors « bénéficié » d’une initiation à la sexualité de groupe, à l’homosexualité, au sado-masochisme, et autres pratiques accompagnées de sévices et humiliations (voir l’article de Caroline Parmentier du 24 novembre 2009).

Cette affaire n’avait pas défrayé la chronique médiatique. Un silence respectueux avait été observé. L’homme appartient au système, ses positions « iconoclastes » sont elles-mêmes un signe de cette appartenance. Bellanger est d’abord un « fils de » : fils de Claude Bellanger, co-fondateur du Parisien libéré et de la romancière Christine Arnothy. Deux proches de François Mitterrand.

Le soutien du PS a d’ailleurs été immédiat. « Le Parti socialiste exprime sa préoccupation, son attachement à l’identité et à l’offre artistique de Skyrock, et sa solidarité à l’égard des amateurs et des créateurs de rap et de r’n’b [un mélange de soul, de hip-hop] qui manifestent aujourd’hui leur inquiétude. » François Hollande s’est rendu dans les locaux de la radio mercredi, et jeudi ce fut le tour de Benoît Hamon et de Jack Lang. Celui-ci, interviewé par le JDD.fr mercredi, se dit « ulcéré » et « scandalisé ». Lui qui adore Pierre Bellanger, et qui admire son combat pour les radios libres, estime que sa mise à l’écart par le groupe AXA, actionnaire majoritaire, est « une expropriation morale » : « des capitalistes veulent changer l’identité de Skyrock ! ».

Mais Bellanger veut-il être soutenu ? C’est toute la question, puisque si AXA, actionnaire à 70 %, vend ses parts, il semble que Bellanger, actionnaire à 30 %, vende aussi les siennes… Le limogeage n’est peut-être qu’une façon de quitter son poste, dans le rôle de la victime. N’en déplaise à Jack Lang, l’homme a des convictions sociologiques, sexuelles, mais aussi capitalistes : dans les années 1980, il investissait dans le minitel rose.

Outre ce soutien politique, la radio a reçu le soutien « culturel » des chanteurs de rap français, dont elle promeut assidûment les rengaines : Sexion d’assaut, Rohff, La Fouine, Sinik, le 113, Soprano, la crème de tout ce qui éructe dans sa capuche contre les flics, les Blancs. « Skyrock représente cette France multiculturelle qui a toute sa place et sa liberté », a pris la peine de rappeler Laurent Bouneau, directeur général des programmes. Les auditeurs, multiculturels eux aussi, ont réagi massivement aux appels de Difool : manifestation devant la radio située près des Halles, création d’une page Facebook ; des pétitions circulent dans les collèges et les lycées. La France « jeune » et « métissée », musulmane et dhimmi, se mobilise pour défendre sa culture. Cela aboutira-t-il à des nuits chaudes en banlieue ?

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