samedi 9 avril 2011
De la dictature à la démocratie
Presque tout le monde a été surpris par la soudaineté des révoltes égyptiennes et tunisiennes, ainsi que par leur rapide propagation dans le Moyen-Orient.
Ces évolutions ont été attribuées, au moins en partie, à l'extension des réseaux sociaux sur Internet. Il est évident que leur pratique a joué un rôle moteur et cela pour une simple raison que feraient bien d'étudier de plus près tous les pratiquants du pouvoir absolu dans le domaine politique ou dans le domaine social.
Si l'on regarde le fonctionnement des dictatures, on voit qu'elles adoptent une forme pyramidale et qu'elles s'efforcent d'organiser en pyramide la société qu'elles contrôlent. Tout en haut, à la pointe, le chef unique, puis en dessous le parti unique et le syndicat unique avec leurs réseaux de partisans et d'acteurs qui sont, du reste, souvent les mêmes. Ceux-ci reçoivent l'information, les orientations d'en-haut et les diffusent, en bas, aux citoyens. Ces derniers sont considérés comme de simples récepteurs d'ordres qui n'ont ensuite qu'à les appliquer sans discuter ; surtout sans discuter parce que la discussion, l'échange amènent forcément tôt ou tard questions, contestations, voire refus, rejets.
Pour éviter ces inconvénients, le pouvoir, par une police supérieurement organisée, protège ses représentants et partisans, en même temps qu'il leur demande de contrôler les échanges entre citoyens et même de les empêcher. C'est ici que les réseaux sociaux interviennent. Leur diversité, leur complexité, leur instantanéité multiplient contacts, informations, échanges entre tous les membres de la société, du moins entre ceux qui sont « branchés ». Dès lors, les mesures policières sont débordées et ne suffisent pas à endiguer le flot des échanges puis des protestations qui font boule de neige jusqu'à rassembler des foules immenses dans les rues et sur les places publiques. C'est ce qui s'est produit au Caire, place Tahrir.
Vigilance
Tout se passe donc comme si Internet, transformé en explosif, venait torpiller la pyramide dictatoriale à sa base et la faire s'effondrer soudainement. Ces réseaux sont particulièrement dangereux pour le dictateur. Encore faut-il qu'un événement, un fait, fasse surgir l'étincelle et donne à la flamme qui vacille la force de s'élever et de se propager. Cet événement, c'est le plus souvent une atteinte à la dignité qui provoque un drame, comme cela s'est produit avec le petit vendeur de légumes tunisien diplômé qui n'en pouvait plus d'être méprisé et s'est volontairement immolé par le feu. Beaucoup se sont reconnus en lui.
C'est donc l'aspiration au respect, l'exigence de dignité qui, tout à coup, devient essentielle pour ceux qui découvrent qu'ils ne sont pas les seuls méprisés, mais que beaucoup d'autres le sont aussi comme eux, autant qu'eux, parfois plus qu'eux. C'est alors que la révolution se met en marche et balaie le pouvoir.
Ceci est le premier acte, mais le deuxième est toujours à venir. La communication, l'échange, si utiles soient-ils, et l'indignation, si respectable et fondée soit-elle, ne suffisent pas à établir ou rétablir une société démocratique. En effet, Internet peut aussi aider les semeurs de doute, de trouble, les manipulateurs, les faux prophètes
L'acte deux, ce peut être une authentique démocratie, mais une telle instauration est toujours difficile et lente. Les anciens pouvoirs ou les réseaux cachés profitent de ces hésitations. Ils tentent de se reconstituer de nouvelle manière et de reprendre insidieusement le dessus. C'est pourquoi les populations qui se sont libérées de l'oppression qu'elles subissaient doivent rapidement, et ce n'est pas facile, se constituer en organisations pluralistes pratiquant le dialogue pour fixer les objectifs et définir les moyens. Il leur faut aussi se montrer extrêmement vigilantes pour parvenir à leurs fins. Chacun le sait : rien n'est joué d'avance.
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