TOUT EST DIT

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mardi 11 juin 2013

L'industrie auto tricolore accélère sa désindustrialisation... en France


Michelin annonce de nouvelles suppressions d'emploi. PSA et Renault réduisent très fortement la voilure. En sept ans, la production des deux constructeurs dans l'Hexagone a chuté de moitié. Les effectifs des usines françaises d'équipements pour véhicules sont passés de 114.000 à moins de 80.000 personnes entre 2007 et 2012. Inquiétant.
Michelin annonce 730 suppressions d'emplois à Joué-lès-Tours (Indre-et-Loire). La Française de Mécanique (FM), filiale de Renault et PSA employant quelque 3.400 personnes à Douvrin (Pas-de-Calais), pourrait supprimer « plus de 1.000 emplois » d'ici à 2016, affirme la CGT. En attendant, le groupe PSA a prévu de réduire ses effectifs de 11.200 personnes entre 2012 et 2014 en France ainsi que de fermer son usine d'Aulnay-sous-Bois, en région parisienne.
Renault procédera pour sa part à 7.500 suppressions nettes d'emploi dans l'Hexagone d'ici à fin 2016.  Aïe. Du côté des usines françaises d'équipements automobiles, c'est tout aussi désastreux. Leurs effectifs globaux ont chuté de 7,3% l'an dernier à 79.000 personnes, selon la Fédération des fabricants d'équipements pour l'automobile Fiev, contre 114.000 en 2007 ! Une vraie Bérézina de l'emploi.
Chiffre d'affaires en berne
Certes, PSA Peugeot-Citroën et Renault incriminent la chute du marché auto européen. Le chiffre d'affaires de la branche automobile de PSA a ainsi reculé de 10,3% à 8,7 milliards d'euros au premier trimestre. Renault a vu ses ventes reculer de 11,8% à 8,27 milliards. Quant aux équipementiers automobiles, le chiffre d'affaires de leurs sites français a fléchi de 13,4% l'an passé à 16,15 milliards, d'après la Fiev. En corollaire, la balance commerciale des composants pour véhicules a vu son excédent fondre à 1,7 milliard d'euros à peine l'an dernier, contre... 2,5 milliards en 2010. Et les perspectives pour l'année 2013 ne sont pas vraiment réjouissantes.
Plongeon de moitié
Toutefois, la crise en Europe n'explique malheureusement pas tout. Car les deux constructeurs tricolores sont engagés dans une spirale structurelle de désindustrialisation en France, entraînant logiquement dans leur sillage celle de leurs fournisseurs. PSA a ainsi vu sa production de voitures particulières et d'utilitaires baisser de 35,7% dans l'Hexagone à 230.337 unités au premier trimestre. De son côté, Renault a reculé de 23,7% à 118.060. Sur l'ensemble de l'année 2012, PSA avait déjà réduit ses fabrications françaises de 16% à 1,11 million et Renault de 17,6% à 532.571 exemplaires... soit à peine moins que l'ensemble de la production de son allié japonais Nissan dans sa seule usine britannique de Sunderland.
Des niveaux quasi-dérisoires, qui témoignent d'un mouvement de fond. Les sites français de PSA ont en effet fabriqué 41% de véhicules en moins l'année dernière par rapport à... 2005. Les usines de Renault dans l'Hexagone ont réduit, elles, de presque 60% leurs volumes en sept ans. Du coup, la production cumulée de Renault et PSA en France a plongé exactement de moitié par rapport au milieu des années 2000. Cela va au-delà d'une crise du marché européen.
Effectifs en pleine chute
Dans ces conditions, les usines voient leurs effectifs fondre. Le site PSA de Rennes a produit 129.600 unités à peine l'an dernier.... contre plus de 360.000 au milieu des années 2000, pour un potentiel installé qui était alors de 400.000 ! A cette époque, le site employait 10.000 personnes, le double d'aujourd'hui. Sacrée dégringolade.
Et ce n'est pas fini. Rennes, où la suppression de 1.400 emplois est prévue, sera d'ailleurs à l'arrêt durant six semaines cet été en raison de nouvelles mesures de chômage partiel. L'usine de Renault à Flins (Yvelines) a assemblé l'an passé 115.500 Zoé et Clio avec 2.600 salariés, contre 270.000 voitures avec 4.750 personnes en 2004. A Sandouville, le site phare de Renault en Seine maritime voué jusqu'ici à la gamme moyenne et au haut de gamme comme celui de PSA à Rennes, a vu ses effectifs passer de 5.300 employés en 2004 à 2.150 aujourd'hui seulement.
Des produits qui se vendent moins
La baisse d'activité des usines tricolores reflète celle de la popularité des modèles. Le fameux monospace compact Scénic (et son dérivé Grand Scénic) a été  produit à une cadence réduite des deux-tiers à 132.760 unités l'an passé par rapport à il y a dix ans. La familiale Renault Laguna a atteint péniblement les 27.700 unités en 2012, contre plus de 145.000 dix ans auparavant. Quant à l'Espace, longtemps considéré comme le fleuron du génie français, il n'était plus assemblé l'an passé qu'à raison de 12.900 véhicules, soit six fois moins. Quant à PSA, il assemblait certes encore 566.000 petites Peugeot l'an dernier. Mais la production était répartie entre trois modèles (206, 207, 208), dont une grosse part construite hors de l'Hexagone.
Il y a dix ans, en revanche, PSA fabriquait 816.500 Peugeot 206, pour l'essentiel en France. Dans la gamme moyenne supérieure, PSA produisait 259.000 Peugeot 407 en 2005 (à Rennes). En 2012, PSA n'assemblait plus que 116.400 Peugeot 508, son successeur, dont une moitié environ seulement dans l'Hexagone...
Les gros véhicules n'ont plus la cote
La chute de production en France de Renault et PSA s'explique en partie par la délocalisation vers des pays à bas coûts, surtout au sein de l'ex-Régie. Mais pas seulement. Le plongeon des volumes en France reflète aussi la désaffection des clients pour les véhicules de gamme moyenne et supérieure à fortes marges potentielles des deux constructeurs tricolores, traditionnellement fabriqués dans les usines hexagonales.
Les modèles vendus à des prix élevés sont logiquement moins sensibles au différentiel de coûts en France par rapport à l'Europe de l'est que les véhicules d'entrée de gamme devenus la spécialité de Renault et PSA, sous la pression en particulier des pouvoirs publics dont la politique fiscale favorise les petites voitures. Dans le même temps, l'industrie automobile allemande a, elle, globalement maintenu ses volumes de production outre-Rhin grâce au succès de ses véhicules en général mais surtout de son haut de gamme!
710. 000 voitures en 2016?
Alors, cette descente aux enfers de l'industrie automobile dans l'Hexagone est-elle irrémédiable ? Pas forcément. PSA, qui vient d'industrialiser des modèles nouveaux comme le « Crossover » 2008 en France, négocie avec les syndicats un accord de compétitivité pour améliorer sa productivité en France. Il souhaite conclure un accord du même genre que celui paraphé à la mi-mars par Renault, lequel prévoit notamment une augmentation de 6,5% du temps de travail, une refonte des comptes épargne temps, un gel des salaires en 2013.
Le constructeur au losange s'est engagé en échange à ne fermer aucune de ses usines dans l'Hexagone à court terme et à leur assurer une activité minimum de 710.000 véhicules par an: 630.000 Renault et 82.000 Nissan (à Flins à partir de 2016). Formidable, non ? Bof. En 2004, Renault ne produisait-il pas en France plus d'1,3 million d'unités ? On sera loin du compte...
Douai, espoir de Renault
Carlos Ghosn, PDG de Renault,  est très fier de l'annonce fin mai par le groupe de solides perspectives pour l'usine de Douai (Nord). Le plus important site du constructeur au losange en France doit lancer à partir de 2014 toute une série de nouveaux modèles sur une nouvelle plate-forme modulaire commune Renault-Nissan. Premier jalon : le futur remplaçant du fameux Espace. Viendra ensuite le successeur de la Laguna de gamme moyenne supérieure.
Douai espère produire jusqu'à 250.000 voitures par an d'ici à la fin 2016, grâce au lancement de cinq nouveaux véhicules. Cocorico ? Non, pas vraiment. Car Douai ne fabriquait-il pas plus de 450.000 véhicules au milieu des années 2000 ? Au fond, dans le meilleur des cas, tout juste peut-on espérer que Renault et PSA maintiennent globalement leurs niveaux actuels de fabrication dans l'Hexagone. Auxquels on peut heureusement ajouter les 200.000 Toyota produites annuellement à Valenciennes (Nord) et les 100.000 Smart (Daimler) environ à Hambach (Moselle)... Piètre consolation.

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