TOUT EST DIT

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lundi 13 mai 2013

La dernière carte de Monsieur 25 %


Voici François Hollande placé devant une double crispation-exaspération, à droite et à gauche. Sur quoi peut-elle déboucher ? S’il ne tenait qu’à lui, sur rien…
Monsieur 25 % est très calme : il a tout bon. Il a respecté ses engagements, tenu ses promesses. Le reste, dit Michel Sapin, ministre du Travail, qui traduisait la pensée de François Hollande dans la Provence du 6 mai, « le reste, c’est de l’écume qui s’efface » — les scandales, les tête-à-queue gouvernementaux, l’incohérence politique. L’opinion, dit Sapin, ne retient qu’un chiffre, un seul, concret, le chômage (« Un déficit du budget, c’est un pourcentage, un déficit du commerce extérieur, c’est hors du sens commun »), mais, s’il est mauvais aujourd’hui, attendez, la courbe va se redresser, « les résultats seront là ». Telle était l’ambiance du séminaire gouvernemental qui se réunissait pour le premier anniversaire de l’élection présidentielle, quand “Monsieur 51 et quelques” se retrouve à 25 % d’opinions favorables.
Un score pathétique qui explique pourquoi François Hollande a pu envoyer tant de monde dans la rue. De droite mais aussi, maintenant, de gauche. Et ceux de gauche criaient dimanche la même chose que ceux de droite : “On ne nous entend pas, on nous méprise.” « La période d’essai est terminée », a lancé Mélenchon à la Bastille. « On ne lâchera rien », répètent les manifestants de droite.
La gauche a l’habitude de descendre dans la rue ; le défilé en foulard derrière les banderoles pour l’emploi et les salaires, cela fait partie du folklore ; elle a tout l’arsenal en réserve, les drapeaux rouges, les autocars et le service d’ordre des syndicats, son parcours est tracé, de la Nation à la Bastille. Rien de tel à droite. Chez elle, c’est exceptionnel. Une grande manif par génération. Mais, cette fois, elle y a pris goût. Jamais elle n’aura autant défilé que sous Hollande. Ce n’est pas fini ; elle s’est donné rendez-vous le 26 mai, au moment de la promulgation de la loi sur le mariage gay. Une telle mobilisation, partout, à n’importe quelle date, ne peut s’expliquer que parce que François Hollande l’a provoquée, en mettant en cause des principes, des valeurs, une fondation de la société — la famille. Le pire est qu’à côté de toutes ces associations dont le but affiché est bien de “dynamiter” nos structures sociales et nos traditions, lui n’a pas compris le contenu irréversible et destructeur de son projet. N’en ayant pas saisi les causes, il ne sait pas comment en tirer les conséquences. Et le voici placé devant une double crispation-exaspération, à droite comme à gauche. Sur quoi peut-elle déboucher ? S’il ne tenait qu’à lui, sur rien. Protégé par les institutions, il estime qu’il a quatre ans devant lui et qu’en quatre ans, les choses ne pourront pas aller de pire en pire. Mais la politique est ainsi faite qu’elle ménage perpétuellement des surprises. Cela, il le sait aussi. Va-t-il donc s’y préparer ?
En remaniant le gouvernement ? Il ne changera pas de premier ministre — pourquoi en changerait-il ? celui-ci est un excellent “punching-ball” pour tout le monde. Et, surtout, observe Michel Sapin dans la Provence, un remaniement en tant que tel « n’a aucune valeur», « dès le lendemain, il aura été oublié ». « Un remaniement ne peut être que la traduction d’une volonté politique », précise-t-il, en ajoutant : « Nous verrons si le président voudra manifester cette volonté. » Autrement dit, l’un des tout premiers membres du gouvernement, camarade de régiment de François Hollande, exprime là de gros doutes — “nous verrons si”.
Plus improbable encore, la dissolution. Certes, devant une situation aussi chaotique, la récession, le chômage, la chute de la consommation, la méfiance des patrons, la sanction des élections partielles, le chahut dans sa majorité et le durcissement évident de l’opposition de droite, il pourrait éprouver le besoin d’une nouvelle légitimité en revenant devant les Français. Ce serait à eux de trancher. Il ne le fera pas : pourquoi chasser une majorité qui lui apporte son soutien ? Surtout, en retrouvant au mois de juin le droit de dissolution de l’Assemblée (celle-ci ne peut pas être dissoute avant une année d’existence), il dispose d’une arme de dissuasion à l’encontre des députés socialistes : si vous vous rebellez, vous retournerez devant les électeurs. Un argument définitif pour la moitié d’entre eux, élus pour la première fois.
Il n’a qu’une carte en réserve, une petite carte de diversion politique, qui a déjà servi sous François Mitterrand et a l’avantage de semer la discorde chez l’ennemi, à droite. C’est la carte qu’un pouvoir politique déconsidéré sort quand il a épuisé son crédit : le changement de mode de scrutin, l’adoption de la proportionnelle en dose massive. L’arme de la dispersion.

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